Intervention de Jean-Pierre Chevènement

Réunion du 27 avril 2011 à 14h30
Projet de programme de stabilité européen — Déclaration du gouvernement suivie d'un débat et d'un vote

Photo de Jean-Pierre ChevènementJean-Pierre Chevènement :

… pour répondre aux aléas économiques et politiques qui sont prévisibles dans les quatre ans qui viennent. Or, ce que vous nous proposez, c’est de mettre définitivement la démocratie en vacances.

Votre programme de stabilité débouchera sur une récession européenne qui rendra encore plus inaccessibles les objectifs de réduction des déficits et de la dette que vous nous assignez, comme on le voit déjà en Grèce et au Portugal.

Il est temps de concevoir pour l’Europe une sortie de crise par le haut, comme aux États-Unis : en effet, seule la croissance peut permettre de réduire les déficits et la dette.

On attendrait de la France qu’elle mette l’accent sur une initiative européenne de croissance fondée sur la relance salariale dans les pays les plus importants de la zone euro et sur la réforme des statuts de la Banque centrale européenne, et cela pour, premièrement, introduire la croissance et l’emploi au rang des missions de la BCE et lui permettre de racheter les titres de dette sur les marchés autant que de besoin ; deuxièmement, modifier les textes européens qui s’opposent, par exemple, au lancement d’un grand emprunt ou à une politique industrielle, au nom du dogme fondateur de la concurrence ; troisièmement, enfin, rééchelonner les dettes publiques autant qu’il le faudra, en mobilisant, notamment, l’épargne des résidents, à l’exemple de ce que fait le Japon.

Toutefois, ne rêvons pas : ce changement de logique n’est pas à l’ordre du jour avec vous, madame la ministre.

Le choix de la monnaie unique a été une monumentale erreur – il serait temps de le reconnaître ! – qu’ont commise solidairement la plupart des dirigeants de la droite ainsi que, hélas, la quasi-totalité des responsables socialistes. J’adjure ceux-ci de chercher une solution autre qu’une intégration politique toujours plus poussée de la France à une Europe qui, dans l’état actuel des textes et des rapports de force, ne peut signifier que l’engloutissement de la République dans un nouvel empire, celui des marchés financier.

Il est temps que la France propose pour l’Europe une autre orientation, fondamentalement différente. Il est temps de changer les règles du jeu de la zone euro, si l’on ne veut pas voir s’ouvrir la crise de cette expérimentation passablement hasardeuse.

Une chaîne de récifs, sociaux, économiques et politiques, se laisse voir à l’horizon. Des élections générales auront lieu en France, en Allemagne et en Italie en 2012-2013. Plutôt que de programmer un avenir qui n’aura pas lieu, madame la ministre, il serait temps que vous vous prépariez à d’autres hypothèses et que vous fassiez preuve d’imagination – vous n’en manquez pas, j’en suis sûr. Aude sapere, disaient les hommes de la Renaissance : « Osez penser », madame la ministre !

Demain, il faudra faire face. Votre « plan A » ne marchera pas, …

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