Monsieur le président, madame la ministre, monsieur le ministre, mes chers collègues, le Commissariat général du Plan a bien décrit, dans deux rapports successifs, l'ampleur des inégalités entre nos collectivités territoriales. De telles disparités n'ont pas d'équivalent dans le reste de l'Union européenne et constituent l'une des composantes les plus regrettables de l'exception française.
On ne peut donc que se féliciter de la constitutionnalisation, en 2003, du principe de la péréquation. Nous nous alignons ainsi sur l'Allemagne et sur l'Italie, entre autres.
La réforme de la DGF, qui a été inscrite successivement dans la loi de finances pour 2004, dans le projet de loi de programmation pour la cohésion sociale de 2005 et dans le projet de loi de finances pour 2005, traduit la volonté de parvenir à résorber la fracture territoriale. Telle est du moins l'intention affichée par le Gouvernement, ce qui ne signifie pas que l'objectif soit atteint.
En soi, pourtant, l'initiative est louable. Elle présente même trois aspects positifs.
Elle clarifie, d'abord, l'architecture des dotations. Il n'existe plus, pour chaque catégorie de collectivité, que deux types de dotation, l'une forfaitaire, l'autre de péréquation. Une telle structure contraste avec l'excès de sédimentation altérant l'évaluation du système et constitue une rupture heureuse avec le passé.
Elle alloue, ensuite, des moyens plus importants à la péréquation. S'agissant des communes, avec une progression de la dotation forfaitaire de 1 % d'un exercice à l'autre, près de 300 millions d'euros peuvent être dégagés, ce qui n'est pas négligeable. En termes dynamiques, la part relative de la péréquation dans le montant total de la DGF des communes est vouée à augmenter au fil des années, par le jeu des variations différenciées des taux de croissance. Cela représente un pas significatif dans le sens d'une meilleure répartition des ressources entre collectivités territoriales.
Enfin, la réforme de la DGF choisit avec pertinence ses principales cibles : elle prévoit une majoration de la dotation de solidarité urbaine en faveur des communes dotées de zones franches et de zones de redynamisation urbaine, même si l'application de cette mesure peut parfois poser des problèmes, ainsi qu'une majoration de la dotation de solidarité rurale pour les bourgs-centres en zone de revitalisation rurale. C'est bien dans ces deux catégories de collectivité que se concentrent les difficultés en termes de cohésion sociale et de présence, ou d'absence, de services publics.
En ces trois domaines, il s'agit en somme de réels progrès.
Mais d'autres aspects de la réforme éclairent différemment l'intention première ; leur juxtaposition autorise même une autre lecture. Nous sommes en droit, madame la ministre, monsieur le ministre, de nous demander parfois si le projet de loi de finances pour 2005 n'introduit pas une forme subtile de « dé-péréquation », autrement dit de démantèlement des politiques de péréquation mises en oeuvre notamment par les gouvernements de gauche en 1991 et 1992.