Je m'efforcerai d'être synthétique et de simplifier ce sujet très technique.
Il y a un paradoxe redoutable dans cette affaire. Les communes se sont battues pendant des années pour obtenir la banalisation de France Télécom au regard de la taxe professionnelle. Je me souviens d'avoir pétitionné en ce sens, d'avoir signé et fait voter des amendements, contre la volonté du gouvernement de l'époque.
Puis, nous avons obtenu cette banalisation. Je dis « nous » parce que j'essaie de me placer du point de vue des auteurs des amendements.
Cependant, depuis lors, les structures de France Télécom ont évolué et les bases se sont effondrées. Autrement dit, après avoir obtenu la banalisation - ce qui était d'ailleurs conforme à une exigence du droit européen de la concurrence - l'évolution économique a fait que nous nous sommes retrouvés perdants et, paradoxalement, il eût finalement mieux valu en rester au régime antérieur.
En 2003, avec l'article 29 de la loi de finances, le gouvernement de Jean-Pierre Raffarin - Alain Lambert était alors ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire - a fait droit à cette demande récurrente des collectivités locales.
Le système alors mis en place a neutralisé, pour l'Etat et pour les collectivités territoriales, le passage au droit commun. L'outil de cette neutralisation a été le prélèvement, et j'insiste sur le fait que le rôle de ce dernier, même s'il est pérennisé, s'arrête là : c'était un moyen d'égalisation.
Ensuite, les bases de France Télécom ont connu le même sort que les autres bases de taxe professionnelle. Si une entreprise diminue son activité, a fortiori si elle disparaît, les collectivités locales subissent, comme toujours en cas de perte de substance économique, une perte de produit de taxe professionnelle. Pour la base de taxe professionnelle de France Télécom, on observe le même phénomène que pour n'importe quelle entreprise de droit commun !
Dès lors, pourquoi des réactions aussi vives, largement partagées par tous les groupes de la Haute Assemblée ? Parce que le dispositif technique est très difficile à comprendre. Il existe un problème de bonne appréhension de l'information. Cette information apparaît quelque peu biaisée à nombre d'élus locaux.
Lors du récent débat budgétaire à l'Assemblée nationale, où les mêmes réactions se sont exprimées, le rapporteur général, Gilles Carrez, a indiqué, en réponse à un amendement de son prédécesseur, M. Didier Migaud, député de l'Isère, qu'il fallait résoudre ce problème, comme M. Lambert s'y était engagé, afin de mettre fin à une injustice. Il a ajouté : « Nous comptons sur vous, monsieur le ministre, pour nous proposer une solution dans le collectif ». Le ministre en question était encore M. Bussereau, et celui-ci a affirmé qu'il répondrait à ces préoccupations soit dans le cadre du collectif, soit à l'occasion de la discussion budgétaire au Sénat.
Nous en sommes, non pas à l'examen du collectif, mais à la discussion au Sénat, et c'est vous, monsieur le ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire, qui êtes à présent interrogé.
La commission serait donc heureuse de vous entendre sur ce sujet, tout en réaffirmant que, à ses yeux, il n'y a pas lieu de sortir du droit commun, même si l'on peut néanmoins envisager des solutions adéquates en cas de très grave discontinuité.
Les quelques commentaires que je viens de formuler peuvent s'appliquer à toute la liasse d'amendements qui sont en discussion commune sur ce point.
Je réserverai un sort un peu particulier à la série d'amendements qui ont été présentés par notre collègue Mme Gourault, première vice-présidente de l'Association des maires de France. Dans un effort pour se montrer très constructive, elle a déposé, non pas un seul, mais une « rafale » d'amendements, proposant une solution de base et des solutions de repli, ce qui montre bien que les communes cherchent, d'une part, à mieux comprendre ce qui se passe et, d'autre part, à trouver un système d'atténuation de certaines discontinuités trop brusques.
Cela dit, je remercie les auteurs de tous ces amendements d'avoir aussi bien posé le problème.
Monsieur le ministre, nous souhaitons que le Gouvernement exprime son avis et qu'il réfléchisse à des éléments de solutions qui pourraient nous permettre de progresser.