Intervention de Roland Ries

Réunion du 17 juillet 2007 à 21h45
Dialogue social et continuité du service public dans les transports terrestres — Suite de la discussion d'un projet de loi déclaré d'urgence

Photo de Roland RiesRoland Ries :

Tout d'abord, je tiens à vous redire, monsieur le ministre, que l'objet de mes réserves ne porte absolument pas sur l'idée de vouloir assurer dans toute la mesure possible la continuité des services publics de transport. Je crois même pouvoir dire que personne ici - en tout cas, je n'en ai pas eu d'écho - ne s'est déclaré contre ce principe.

Dans le même esprit, il y a lieu de se réjouir de ce que le Gouvernement place la concertation au coeur des relations sociales. À l'heure où les autorités politiques prennent enfin la mesure de la nécessité de développer les modes de transports alternatifs à la voiture dans les agglomérations par l'amélioration de la qualité des transports collectifs, la négociation constitue la voie que doivent privilégier tous les acteurs des transports publics.

De ce point de vue, je souhaite naturellement, comme vous-même, monsieur le ministre, que la France s'engage pleinement dans cette voie, comme c'est le cas en Allemagne ainsi que dans les pays scandinaves, où la grève ne constitue que l'ultime recours et non un mode normal de gestion des conflits sociaux.

Si je me réjouis donc pleinement de voir le Gouvernement promouvoir le dialogue social, il m'est toutefois difficile de vous suivre, monsieur le ministre, sur le sens que vous entendez donner concrètement à cette notion.

En effet, se pose la question de la méthode et des moyens utilisés pour parvenir à cette fin. Or, sur ces points, le projet de loi que vous nous soumettez montre clairement qu'ils ne sont pas à la hauteur des enjeux.

Je ne puis tout d'abord que regretter la forme très polémique que prennent certaines orientations de votre projet de loi. Cela a déjà été dit, mais je tiens à le redire fortement : quel peut être l'intérêt de ce fameux article 9, sinon de désigner à la vindicte de l'opinion les salariés des transports ? Qui pourrait aujourd'hui prétendre sérieusement que ceux-ci sont payés lorsqu'ils ont décidé de se mettre en grève ?

Monsieur le ministre, au cours des douze années pendant lesquelles j'ai présidé la Compagnie des transports strasbourgeois, pas une seule fois, les salariés n'ont été payés pour leurs journées de grève et, pas une seule fois, les syndicats ne sont venus négocier le paiement de ces jours de grève. Cette règle, édictée dès le départ, n'a souffert, je le répète, aucune exception pendant ces douze années.

En outre, sur le plan du droit, cet article ne comporte aucune disposition nouvelle : il ne fait que reprendre les dispositions du code du travail. Dès lors, cette approche ne me semble absolument pas de nature à promouvoir l'esprit de dialogue et de concertation que vous prétendez privilégier par ailleurs à travers ce projet de loi.

Sur ce point, les représentants des organisations syndicales que nous avons auditionnés ont été unanimes, Mme le rapporteur pourra le confirmer. Il serait donc, selon moi, grandement souhaitable de retirer cet article 9, inutile sur le fond et, à certains égards, provocateur sur la forme.

Plus fondamentalement, il y a de quoi s'interroger sur un projet de loi qui prétend promouvoir la concertation, mais qui, dans ses formulations, la met sous étroite surveillance.

Vous savez bien que, dès aujourd'hui, les efforts accomplis par les élus, les syndicats et les représentants des entreprises ont souvent abouti à prévenir les conflits, dont le nombre s'est considérablement réduit au fil des ans.

L'encadrement que vous prévoyez du dialogue entre les partenaires sociaux et surtout le calendrier de la négociation collective avec l'objectif du 1er janvier 2008 me paraissent totalement contradictoires avec la sérénité nécessaire pour établir l'indispensable climat de confiance que présuppose tout dialogue social efficace.

Je note, par ailleurs - et cela me paraît essentiel -, que, dans votre projet de loi, la confusion est permanente entre la notion, non affirmée explicitement mais présente en filigrane, de service minimum et la notion de prévisibilité du service. Autant, en ce qui me concerne, je suis favorable à une amélioration de la prévisibilité afin d'informer à l'avance, dans la mesure du possible, les voyageurs, autant j'estime très dangereux, monsieur le ministre, de prévoir un niveau de service fondé sur la définition d'un « plan de transport adapté ».

Informer les usagers de l'offre qui sera mise à leur service et négocier avec les organisations syndicales le mécanisme de prévisibilité va, pour l'ancien président d'une société de transport que je suis, dans le bon sens.

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