Enfin, monsieur le ministre, reste ce qui constitue une des insuffisances de ce texte, et non la moindre, je veux parler de la répartition de la charge de la protection de l'eau entre les différents acteurs de l'eau en France.
Eu égard au statu quo proposé en la matière - très défavorable, on le sait, aux consommateurs d'eau, qui supportent l'essentiel de la charge, soit 82 % -, la future loi sur l'eau, en l'état, pourrait avoir le triste privilège d'être le premier texte à bafouer la charte de l'environnement promulguée le 1er mars dernier par le Président de la République.
Une question essentielle mérite, à mes yeux, d'être posée à ce stade : a-t-on véritablement pris la mesure du risque environnemental créé par l'utilisation excessive et incontrôlée des produits phytosanitaires et des engrais chimiques ?
On sait, en effet, qu'un très grand nombre de cours d'eau sont aujourd'hui concernés. Ainsi, le dernier rapport de l'IFEN, l'Institut français de l'environnement, met en évidence que près des trois quarts des points d'eau superficiels analysés en France sont contaminés par les pesticides. Or, comme l'indique le site internet du ministère de l'environnement lui-même, l'ensemble de la communauté scientifique s'accorde sur le danger et la nocivité des produits phytosanitaires.
Doit-on, par ailleurs, rappeler la teneur de l'appel de Paris lancé à l'issue du colloque organisé par l'ARTAC, l'association pour la recherche thérapeutique anticancéreuse, le 7 mai 2004, en son article 2 : « La pollution chimique constitue une menace grave pour l'enfant et pour la survie de l'homme » ?
Or votre projet de loi, monsieur le ministre, ne manifeste aucune ambition nouvelle concernant ce risque majeur créé par l'utilisation déraisonnable des produits phytosanitaires et des engrais chimiques.
C'est la raison pour laquelle nous avons déposé plusieurs amendements, en particulier un qui vise à accroître la taxation à la source des entreprises chimiques qui réalisent des profits considérables par la vente de ces produits. Ce serait une bonne façon de rééquilibrer la charge de protection de la ressource en eau, tout en recherchant un effet incitatif sur la réduction des volumes achetés par les utilisateurs.
Voilà, monsieur le ministre, un certain nombre de pistes pour améliorer ce texte, sur les questions tant de solidarité que de rééquilibrage de la charge de la protection de la ressource en eau. Bien entendu, notre groupe sera attentif aux réponses que vous apporterez à ces suggestions.