Intervention de Thierry Foucaud

Réunion du 29 juin 2006 à 15h00
Finances publiques et finances sociales — Suite du débat d'orientation sur une déclaration du gouvernement

Photo de Thierry FoucaudThierry Foucaud :

Monsieur le président, messieurs les ministres, mes chers collègues, le débat d'orientation budgétaire que nous menons chaque année est, le plus souvent, l'occasion de faire état de nos profondes divergences d'appréciation sur la réalité économique et sociale de notre pays et, partant, de sa traduction concrète en termes budgétaires, au-delà d'ailleurs du simple examen des données chiffrées propre à tel ou tel exercice ou à tel ou tel département ministériel.

Le débat d'orientation pour 2007 se situe dans un contexte assez spécifique, puisque rien ne nous garantit que l'équipe gouvernementale qui portera le projet de loi de finances initiale à l'automne prochain sera celle qui mettra en oeuvre l'exécution budgétaire.

Il fait suite à quatre années de gestion des affaires du pays ayant conduit, entre autres, à accroître de 200 milliards d'euros le déficit cumulé de l'État, c'est-à-dire la dette publique, dont la réduction est pourtant votre priorité.

La France a clairement besoin d'un changement de politique budgétaire, économique et sociale et d'autres orientations dans l'action de l'État que celle consistant à réduire sans arrêt la dépense publique pour faire plaisir aux marchés financiers et aux détenteurs de capitaux.

D'ailleurs, comme le rappelait ce matin M. le président Arthuis, les entreprises du CAC 40 ont réalisé plus de 80 milliards d'euros de bénéfices et ont redistribué plus de 30 milliards d'euros de dividendes à leurs actionnaires.

Monsieur le président de la commission des finances, vous nous avez certainement fourni les bons chiffres, mais notre façon de les interpréter ne sera pas du tout la même que la vôtre.

Cette insolente santé montre que la controverse sur la réalité des créations d'emplois reste d'actualité. Je pourrais également évoquer la situation de Total, la rémunération du capital, les primes d'installation confortables des PDG ou l'accumulation des plus-values sur les cessions d'actions.

Dans ces conditions, comment parvenir à relancer l'activité économique sans que l'intervention publique, et notamment l'investissement public, puisse constituer l'un des moteurs de cette croissance ?

Depuis 2002, nous avons tout connu, qu'il s'agisse de la baisse de l'impôt sur les sociétés et de la réduction de son assiette, de l'élargissement des allégements de cotisations sociales, de la diminution de la fiscalité pour les hauts patrimoines, de la nouvelle baisse de la taxe professionnelle et de la réforme de l'impôt sur le revenu, qui profite de manière quasi exclusive aux plus hauts revenus !

Or quels sont résultats ? Vous vous glorifiez de porter le taux de croissance à 2 % cette année après avoir dégagé moins de 1, 5 point de croissance. Ce discours est assez répétitif. Selon les statistiques de l'INSEE, le taux serait aujourd'hui de 1, 2 %.

L'effet de cette situation sur les comptes publics est tel que vous avez été contraints de procéder à quelques astuces pour respecter le fameux critère d'un déficit budgétaire à 3 % du PIB. Je pense notamment à la soulte EDF, à l'annulation massive de dépenses votées par le Parlement ou encore au règlement anticipé du premier acompte de l'impôt sur les sociétés au titre de l'année 2006 !

Cette situation a été relevée par la Cour des comptes dans son rapport annuel, qui met en cause la réalité du déficit annoncé pour 2005, compte tenu des procédés utilisés.

Monsieur le ministre, la consommation populaire, qui est le moteur de la croissance, trouve l'origine de son développement dans l'augmentation spectaculaire de l'endettement des ménages. Or celle-ci est notamment due à l'ascension des prix de l'immobilier. Certes, ces prix ne doivent pas figurer dans l'indice INSEE, mais ils constituent une réalité de plus en plus présente dans le budget des familles.

Dette pour dette, vous nous expliquez que tout sera mis en oeuvre dans les quatre années à venir pour réduire l'endettement public et que cet effort sera prioritaire, au détriment de tout autre !

Si vous gérez encore les affaires du pays après le printemps 2007, c'est tout sauf une bonne nouvelle !

Si j'ai bien compris ce qui a été dit ce matin, toute recette fiscale supplémentaire sera consacrée à réduire l'endettement public dans les années à venir. Dans le même temps, toutes les administrations publiques seront appelées à goûter aux délices des redéploiements et des économies budgétaires. C'est le produit d'une loi organique comprise comme une machine « assimilée à une politique de restriction budgétaire pure et simple », selon la formule de notre collègue M. de Raincourt.

Ainsi, 15 milliards d'euros seraient consacrés à réduire la dette publique dans les années à venir. De notre point de vue, ces 15 milliards d'euros manqueront pour l'éducation, la formation, le développement des équipements publics ou la construction de logements et viendront grossir les portefeuilles de ceux qui ont fait de la dette publique une véritable rente de situation !

Une telle démarche masque toutefois plusieurs problèmes essentiels.

D'abord, la dette publique n'est pas une catastrophe en soi.

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