L'irrigation se pratique plutôt via des forages individuels, pour 57 % des surfaces équipées, alors que le réseau collectif en représente à peine 20 %.
Sur le plan des résultats comptables, on constate que les irrigants s'en tirent mieux au bout du compte, mais l'« effet revenu » de l'irrigation est variable en raison des coûts d'investissement et de fonctionnement.
En ce qui concerne les redevances pour prélèvements sur la ressource en eau, le projet de loi prévoit un encadrement des taux volumétriques de l'eau d'irrigation consommée en deux catégories.
Les taux plafond proposés s'appuient sur le taux maximal actuellement appliqué en agriculture dans le bassin Artois-Picardie. Or, vous le savez, monsieur le ministre, ce taux n'est pas du tout représentatif de ceux qui sont habituellement appliqués en France. Il concerne un secteur représentant beaucoup moins de 20 % des prélèvements dans cette région pour l'irrigation, eux-mêmes correspondant à une proportion très faible de la totalité de l'eau consommée pour l'irrigation sur notre territoire. Ainsi, dans notre bassin Adour-Garonne, en zone de répartition des eaux, ce taux plafond est près de sept fois supérieur au taux actuel. Son application conduirait inévitablement à des baisses importantes de résultat courant avant impôt pour les agriculteurs.
Une évaluation réalisée par l'assemblée permanente des chambres d'agriculture à partir d'exploitations types - selon les bassins, les pourcentages de surface agricole utile irriguée et la nature des productions - fait ressortir que, en appliquant le taux de 2 centimes d'euro, les baisses de résultat courant avant impôt se situent entre 2 % et 7 % dans certains bassins.
Cette situation aura forcément des répercussions en termes d'activité, d'emplois agricoles et agroalimentaires. C'est pourquoi je présenterai un amendement visant à abaisser les taux plafonds, tout en laissant des marges de manoeuvre à l'échelle des bassins afin de prendre en compte la diversité des situations.
Dans le même esprit, je proposerai d'appliquer un abattement incitatif afin de renforcer la gestion collective là où elle existe déjà et de l'encourager là où ce n'est pas encore le cas.
Concernant les retenues collinaires, la région Adour-Garonne est certainement l'une des mieux équipées, car pas moins de 10 000 lacs se répartissent prioritairement entre le Tarn-et-Garonne, le Lot-et-Garonne et le Gers, couvrant ainsi 20 % de l'eau utilisée pour l'irrigation. La création de retenues collinaires met en oeuvre le principe de recueil et de stockage des eaux de ruissellement en période d'abondance pour ne pas prélever dans le milieu en période d'étiage, c'est-à-dire en période de tension sur la ressource.
De nombreux agriculteurs ont, sans aides publiques, créé leurs propres ressources en eau sur des parcelles privées. Actuellement, le règlement Adour-Garonne leur accorde, en zone de répartition, le taux de 1 sans majoration. Afin de tenir compte de leurs efforts, il me paraîtrait opportun et logique d'introduire ce dispositif dans le projet de loi. Cela constitue un enjeu important pour les propriétaires des lacs.
Par ailleurs, je proposerai la reconnaissance de la notion de « prélèvement net » afin de conserver un principe d'équité entre irrigants face aux redevances, notamment au regard des fortes disparités existant sur le plan tant des ressources que des besoins en eau pour les productions.
En effet, pour les sols sablonneux très filtrants - c'est le cas, en particulier, de la région des Landes -, la distinction entre le prélèvement brut dans la nappe des sables et la consommation nette par les cultures s'impose. Des études menées par l'INRA et le CEMAGREF ont mis en évidence et quantifié les retours d'eau dans la nappe d'origine par infiltration. Cette particularité est déjà reconnue dans le bassin Adour-Garonne, et les redevances de l'agence de l'eau prennent en compte ce principe de prélèvement net.
Enfin, monsieur le ministre, je souhaiterais vous demander des précisions sur les modalités pratiques de la mise en place de la redevance pour pollutions diffuses, car ce sujet intéresse au premier chef les agriculteurs.
Le projet de loi, nous l'avons dit, a un objectif clair : atteindre un bon état écologique des eaux d'ici à 2015, comme nous y engage la directive européenne. Les agriculteurs sont pleinement conscients des enjeux de la politique de l'eau et ils mènent déjà souvent des actions actives pour améliorer leurs pratiques. Les principes d'éco-conditionnalité, fixés par la PAC, et, maintenant, la redevance pour pollution diffuse sont des moyens déterminants pour atteindre ces objectifs.
La redevance pour pollution, telle que proposée dans le projet de loi, s'articule de la manière suivante : toute personne distribuant des produits anti-parasitaires y est assujettie ; la redevance est assise sur les quantités de substances dangereuses contenues dans les produits concernés ; elle est exigible lors de la vente à l'utilisateur final, et le montant de la redevance apparaît sur les factures, lesquelles font l'objet d'un registre.
Cette redevance remplace la taxe générale sur les activités polluantes assise sur les produits phytosanitaires, qui est, aujourd'hui, prélevée au niveau des fabricants, ce qui me paraît plus juste et aussi plus facile pour sa perception.
Dans cette perspective, monsieur le ministre, nous aimerions obtenir un certain nombre de réponses aux questions qui se posent. Ainsi, quels seront les montants perçus au titre de la redevance ? Quelles seraient les conséquences si le taux de la redevance venait à varier fortement d'un bassin à un autre ?
Il paraît que certains acteurs se fournissent directement auprès des fabricants : comment s'acquitteront-ils de la redevance ? Comment les distributeurs seront-ils informés de la qualification des substances dangereuses ?
La procédure de délivrance de l'agrément aux distributeurs est en cours de modification : comment veillez-vous à ce que les deux textes soient compatibles ?
Il s'agit de questions très concrètes sur lesquelles il me semble utile que la représentation nationale et les agriculteurs soient informés.
Avant de terminer mon propos, permettez-moi de m'interroger sur le montant exorbitant des sanctions et des amendes infligées pour cause de pollution viticole.
J'ai l'exemple de deux viticulteurs récemment installés en GAEC. La police de l'eau, rattachée au conseil supérieur de la pêche, propose au procureur d'infliger aux deux jeunes, personnes physiques, une peine de deux ans de prison et de 75 000 euros d'amende, ainsi qu'une peine de 375 000 euros d'amende à la personne morale, le GAEC, ...