Intervention de Claude Lise

Réunion du 5 avril 2005 à 16h00
Eau et milieux aquatiques — Suite de la discussion d'un projet de loi

Photo de Claude LiseClaude Lise :

C'est également le cas en matière d'assainissement. C'est plus encore le cas en matière de pollution des sols, des rivières et des eaux littorales. Dans ce domaine, la situation a atteint une telle gravité, notamment aux Antilles, que l'Assemblée nationale a récemment créé une mission d'information. Celle-ci doit chercher à établir les conditions dans lesquelles ont pu être utilisés de façon intensive, dans l'agriculture, différents pesticides dangereux, notamment le chlordécone. Elle doit évidemment évaluer les conséquences qui en résultent.

Face à l'ampleur et à l'aggravation croissante de ces problèmes, force est de constater qu'il y a eu carence de l'Etat en matière de financement d'équipement, d'où les retards pris dans la réalisation d'un certain nombre d'entre eux, ou encore en matière d'application de textes législatifs et réglementaires, dont certains auraient pu, à l'instar de ce qui s'est passé dans l'Hexagone, avoir quelques effets positifs.

Il faut savoir, par exemple, que la loi du 16 décembre 1964 n'a, pendant longtemps, pas connu d'application dans les départements d'outre-mer et qu'il a fallu attendre la loi du 3 janvier 1992 pour que ceux-ci se voient habilités à créer des comités de bassin.

Toutefois, la carence la plus grave, qu'il importe de dénoncer, est l'absence de prise en compte réelle des spécificités des DOM en matière d'eau et de milieux aquatiques.

Comment ne pas comprendre qu'une île n'est pas un morceau de continent ? Comment ignorer, en milieu tropical, le régime particulier des eaux ? Comment ne pas tenir compte des risques naturels auxquels sont soumis certains bassins hydrographiques ? Comment ne pas prendre en considération ce qui est connu, tant aux Antilles qu'à la Réunion, sous le nom de « ravines », ces dépressions allongées et profondes, creusées par l'écoulement des torrents, et qui entraînent, en période de pluies, des crues parfois redoutables ? Je pourrais continuer l'énumération...

Le seul instrument spécifique en matière de politique de l'eau dans les DOM a été créé par la loi d'orientation de décembre 2000, à partir d'une proposition que j'avais faite dans un rapport co-rédigé avec le député réunionnais Michel Tamaya : il s'agit de l'office départemental de l'eau. Or ce dernier voit ses possibilités d'action, notamment la mise en oeuvre du SDAGE, entravées par la modicité des moyens qui lui sont alloués.

L'actuel projet de loi aurait pu contribuer à palier toutes ces carences et à ouvrir, enfin, la voie à une politique de l'eau ambitieuse pour les DOM, à la mesure des problèmes qui s'y posent, et, ne l'oublions pas, des objectifs fixés par l'Union européenne. Malheureusement, ce n'est pas le cas !

Bien sûr, ce texte comporte quelques avancées. Toutefois, elles sont loin d'être suffisantes. Les élus du conseil général de la Martinique ne s'y sont pas trompés puisqu'ils ont donné, il y a quelques jours, à l'unanimité, toutes tendances confondues, un avis négatif sur le texte, tel qu'il se présente en tout cas actuellement.

Monsieur le ministre, je veux cependant espérer que vous accepterez de prendre en considération les propositions constructives d'amélioration qui vous seront présentées au cours des débats.

Pour ma part, je défendrai quelques amendements qui traitent de points fondamentaux pour les départements d'outre-mer, et tout particulièrement pour celui que je représente : la Martinique. Ils concernent, notamment, le problème des ravines - elles doivent absolument faire l'objet d'un classement dans le domaine public fluvial -, les conditions d'une péréquation équitable, les ressources des offices de l'eau et la possibilité pour ces offices, situés dans les régions du monde que l'on sait, de participer à des actions de coopération internationale dont les collectivités auxquelles ils sont rattachés prennent déjà l'initiative.

Dans le domaine de l'eau, par exemple, le conseil général que je préside mène déjà des actions de coopération internationale importante ; il serait dommage que je ne puisse impliquer, dans ces opérations, l'office de l'eau dont je suis président de droit.

En conclusion, je ne peux me résigner à penser que, une fois de plus, on ne saisisse pas l'occasion de changer le cours des choses et de créer les conditions de mise en oeuvre d'une politique de l'eau en rapport avec la gravité de la situation que l'on connaît dans les départements d'outre-mer et à la hauteur des besoins et des attentes de ceux qui y vivent.

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