Intervention de Isabelle Pasquet

Réunion du 11 octobre 2010 à 15h00
Réforme des retraites — Article 6 suite

Photo de Isabelle PasquetIsabelle Pasquet :

Selon M. le ministre, ces mesures devraient avoir pour effet de réduire les économies escomptées de l’application de cette réforme, profondément injuste, de 3, 4 milliards d’euros.

Plutôt que d’attendre une loi de finances, nous proposons immédiatement une piste de financement : l’abrogation du bouclier fiscal et l’affectation des sommes ainsi récupérées à la Caisse nationale d’assurance vieillesse des travailleurs salariés, la CNAVTS.

Alors que sont annoncées de nouvelles ponctions sur les revenus des salariés au titre des dépenses de soins, les derniers chiffres connus relatifs au bouclier fiscal laissent pantois.

En effet, 1 169 foyers dont la fortune dépasse 16 millions d’euros vont se voir allouer un chèque de 362 126 euros en moyenne. Le bouclier fiscal coûte donc à l’État la modique somme de 679 millions d’euros.

Pendant que les plus grandes fortunes continueront de se « gaver » aux frais de l’État, des familles, des salariés auront de plus grandes difficultés à accéder aux soins et se verront refuser le remboursement de certains médicaments. Plus d’un quart des Français ne se soignent plus en raison de l’augmentation du coût des soins.

Le pouvoir se surpasse pour rivaliser avec le cynique Guizot et son fameux « Enrichissez vous ! », lancé aux banquiers et autres bourgeois nantis du xixe siècle. Il est grand temps de stopper cette fuite en avant !

Il faut supprimer le bouclier fiscal et mettre en œuvre une grande réforme de la fiscalité, pour plus de justice et d’égalité. Nous rappelons que l’égalité fiscale recouvre une dimension politique et juridique.

D’abord, ce principe est compris comme l’égalité des contribuables devant l’impôt. « Une contribution commune […] doit être également répartie entre tous les citoyens, en raison de leurs facultés », dispose l’article XIII de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen.

Égalité fiscale sous-entend ici justice fiscale, reflétée par une répartition plus juste de la charge et une égalité de sacrifices financiers. Le législateur est donc censé être amené à instaurer une différence de traitement entre les contribuables, car il est difficile, pour un ménage à faibles revenus, de consacrer 20 % de ceux-ci à l’impôt.

Votre politique fiscale, qui plus est, s’attaque, entre autres mesures, à la demi-part des veuves, à celle des couples mariés, aux accidentés du travail, sans remettre en cause les exonérations fiscales accordées aux grandes entreprises.

Quant au bouclier fiscal, plus qu’une injustice, c’est une indécence ! Deux Français sur trois contestent aujourd’hui le bien-fondé d’une exonération fiscale visant à mettre à l’abri de l’impôt les plus riches. C’est le principe même du bouclier fiscal qui est aujourd’hui battu en brèche, car il comporte un défaut majeur : il protège les seuls intérêts de ceux qui ont tout.

Dernièrement, M. Fillon affirmait à la télévision que la suppression du bouclier fiscal n’était pas un sujet tabou et que, si elle devait intervenir, il faudrait qu’elle soit couplée à la disparition de l’impôt sur la fortune, à l’occasion d’une « réforme fiscale d’ensemble », envisagée pour 2011…

Or c’est maintenant que les caisses de l’État ont besoin d’être renflouées par de l’argent qui a été volé à ceux de nos concitoyens n’ayant pas la « chance » de faire partie des mille familles les plus riches de France.

Nous demandons donc au Sénat de prendre au mot M. le Premier ministre et de mettre fin à une situation qui n’a déjà que trop duré. Nous souhaitons également que notre proposition de loi sur le financement du régime de retraite soit inscrite à l’ordre du jour sans plus attendre.

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