Intervention de Michelle Demessine

Réunion du 11 octobre 2010 à 15h00
Réforme des retraites — Article 6 suite

Photo de Michelle DemessineMichelle Demessine :

Monsieur le président, monsieur le ministre, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, ce projet de loi est-il financé ? C’est cette question que l’on peut se poser à l’occasion de la discussion de cet amendement tendant à maintenir à 60 ans l’âge légal de départ à la retraite.

Bien entendu, le Gouvernement nous répète que c’est le cas, notamment parce que le projet de loi de finances pour 2011 prévoit une taxation symbolique des revenus du capital et du patrimoine pour faire face aux coûts éventuels de la réforme. En pratique, il s’agit par exemple de relever d’un point le taux du prélèvement libératoire sur les plus-values de cession d’actifs.

Nous avons examiné cette mesure. Les plus-values soumises au régime particulier d’imposition représentent aujourd’hui un ensemble de 18 milliards d'euros. Certes, toutes les plus-values ne sont pas imposables – la vente de sa maison ou de son appartement pour cause de mutation professionnelle demeure exonérée –, mais les contribuables, peu nombreux à la vérité, qui font jouer la retenue à la source sont ceux qui y ont intérêt, car ils savent pertinemment que leur revenu serait normalement taxé à 40 % s’il ne bénéficiait pas du taux privilégié de 18 %.

Pourtant, 1 point sur 18 milliards d'euros de plus-values représente 180 millions d'euros, soit, pour avoir une idée concrète de ce que cela représente, 3 euros environ par habitant ou 7 euros environ par actif salarié.

Dans le même temps, vous allez contraindre les 3 millions de smicards de notre pays à cotiser deux ans de plus pour bénéficier d’une retraite à taux plein, ce qui représenterait au total un prélèvement complémentaire de 5 milliards d’euros sur deux ans, pour la seule part abusivement qualifiée d’ouvrière. Car, part ouvrière ou part patronale, les cotisations de retraite sont d’abord et avant tout une utilisation de la richesse créée par le travail, ce que les comptables nationaux appellent le produit intérieur brut ou la valeur ajoutée.

Soyons clairs : que la richesse créée par le travail, au lieu d’alimenter les stock-options des cadres dirigeants, les dividendes distribués et les intérêts bancaires, revienne sous forme de cotisations sociales qui pourraient être relevées ou modulées, notamment pour la part patronale, ne nous choque pas.

Mes chers collègues, monsieur le ministre, monsieur le secrétaire d'État, nous ne sommes pas opposés à l’entreprise. Nous sommes pour que ce qui est l’espace de création de la richesse nationale, c’est-à-dire l’entreprise, redevienne le lieu où l’on crée les moyens de répondre aux besoins de l’ensemble de la société. Et répondre aux besoins de l’ensemble de la société, ce peut être décider de cotisations sociales. C’est pour cela que nous voterons cet amendement.

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