Monsieur le président, monsieur le Premier ministre, monsieur le ministre d’État, messieurs les ministres, monsieur le président de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées, mes chers collègues, la décision était difficile. Ce qui était en cause n’était pas un risque imaginaire, comme en Irak en 2003. C’était un risque bien réel : celui de voir un gouvernement s’affirmant lui-même « sans pitié » utiliser tous les moyens de terreur pour faire taire une opposition, comme on l’a vu dans maintes villes libyennes reprises aux insurgés et comme on le voit encore aujourd’hui à Misrata, où les violences ont fait quarante morts et trois cents blessés. Et cela à un moment particulier, vous l’avez souligné, où les aspirations à la démocratie et à la dignité se manifestent avec force dans différents peuples arabes, à commencer par le peuple tunisien, si proche de nous, et par le peuple égyptien, cœur vivant du monde arabe.
Depuis 2005, l’ONU reconnaît à son Conseil de sécurité la « responsabilité de protéger » un peuple sur lequel ses dirigeants commettraient un « crime contre l’humanité ». C’est cette décision qui a été prise par le vote de la résolution 1973, adoptée quand il en était encore temps, le 17 mars dernier, par le Conseil de sécurité des Nations unies et qui est mise en œuvre par la France, la Grande-Bretagne, les États-Unis et plusieurs autres pays volontaires, y compris des pays arabes. Il est important que cette intervention n’apparaisse pas comme celle de l’Occident et encore moins comme celle de l’OTAN.
Voilà une quinzaine de jours, on s’interrogeait dans les gazettes pour savoir si la politique extérieure de la France devait être faite par les diplomates ou par les politiques. On a cru l’affaire tranchée il y a huit jours, quand un philosophe autoproclamé, s’appuyant sur les émotions suscitées par les images, annonça sur le perron de l’Élysée que la France reprenait à son compte le fameux « droit d’ingérence » et rompait avec la règle selon laquelle elle reconnaît des États et non des gouvernements. Heureusement, le ministre d’État a recadré l’expression du Gouvernement