L'article 37 propose deux nouveaux cas d'ouverture au travail temporaire.
Le 2° concerne l'hypothèse de l'engagement réciproque de l'entreprise de travail temporaire et de l'entreprise utilisatrice à assurer un complément de formation professionnelle au salarié.
Nous sommes bien évidemment favorables à cette disposition qui consacre d'ailleurs les efforts réalisés depuis plusieurs années par la branche du travail temporaire à laquelle les employeurs demandent une main-d'oeuvre de plus en plus qualifiée et immédiatement opérationnelle. Il s'agit là de l'intérêt bien compris de chacun. Si le salarié peut trouver un bénéfice dans cette mesure, c'est une bonne chose.
En revanche, le 1° est tout à fait nocif, dangereux et inacceptable. Comme bien souvent dans ce texte, une mesure positive en apparence ou une bonne intention affichée dissimulent des dispositions beaucoup moins claires.
Il s'agit, en effet, de faciliter l'embauche de personnes sans emploi confrontées à des difficultés sociales et professionnelles particulières. Comme précédemment, le texte que le Gouvernement nous propose, faute de comporter une définition précise de ces publics en difficulté, ouvre la porte à toutes les dérives.
Cela étant, ce texte pose surtout un problème de principe. L'introduction dans le projet de loi d'un nouveau cas de recours au travail temporaire constitue en fait un exemple supplémentaire de dérégulation du droit du travail, au détriment des catégories de salariés les plus démunies. Si cette disposition est adoptée, elle permettra d'utiliser - j'emploie à dessein le verbe « utiliser » - des personnes en difficulté, sous contrat précaire, pour accomplir des tâches permanentes relevant de l'activité normale de l'entreprise.
Dans ces conditions, est-il encore nécessaire de prévoir une énumération limitative des cas de recours au travail temporaire ? Il suffira de trouver une personne sans emploi depuis quelques mois : elle pourra être embauchée sans aucune garantie. En effet, les salariés dont il est question ici ne bénéficieront d'aucune garantie, le texte ne prévoyant cette fois aucune obligation en matière d'accompagnement ou de formation. S'il y était fait mention de telles garanties, le projet de loi viserait les entreprises de travail temporaire d'insertion.
Cependant, une question surgit immédiatement : souhaitez-vous que les entreprises de travail temporaire d'insertion perdurent, monsieur le ministre, ou cédez-vous aux sirènes de quelque lobby qui préférerait leur disparition et le retour au droit commun de la main-d'oeuvre des personnes qu'elles emploient et, surtout, qu'elles aident à se réinsérer ? Le 2° de l'article 37 sert-il à masquer le 1° ? Ce qui importe dans cette disposition, ce n'est plus le besoin de l'entreprise à un moment donné en vue de l'exécution d'une tâche précise, c'est la caractéristique essentielle du salarié, le fait qu'il soit démuni et en situation de faiblesse.
Ce texte est l'expression de vos intentions réelles, il est la négation même de votre discours sur l'insertion, il laisse supposer que ce qui vous intéresse, c'est, d'une part, le traitement statistique du chômage et, d'autre part, la mise à disposition des entreprises de main-d'oeuvre d'un personnel employé au meilleur coût.
Nous demandons donc que le 1° de l'article 37 soit supprimé et que seul subsiste le 2°, ce qui permettrait aux entreprises de travail temporaire de poursuivre leurs efforts en matière de formation et de démontrer leur utilité sociale, du point de vue non seulement des employeurs, mais aussi des salariés.