Intervention de Alain Juppé

Réunion du 22 mars 2011 à 15h15
Situation en libye — Déclaration du gouvernement suivie d'un débat

Alain Juppé, ministre d'État :

Je tiens à rappeler qu’il est possible à tout instant au régime de Kadhafi d’arrêter l’intervention militaire organisée sous mandat des Nations unies : il lui suffit d’accepter la résolution 1973, c’est-à-dire de respecter un cessez-le-feu, de retirer ses troupes des positions qu’elles occupent et de laisser les Libyens s’exprimer librement. Dans la minute où le régime de Kadhafi respectera les obligations résultant de la résolution 1973, les opérations militaires cesseront.

Au-delà de cette phase d’intervention, comment pouvons-nous essayer de progresser ? Nous devons bien sûr penser à une initiative de paix. Après avoir été en pointe dans la préparation des sanctions et de l’intervention militaire, le Président de la République prendra, au nom de la France, des initiatives pour favoriser la paix.

Cela signifie non pas se substituer aux Libyens pour mettre en place un « régime de remplacement », mais – telle est d’ailleurs la finalité de la résolution 1973 – créer les conditions qui permettront au peuple libyen de choisir lui-même son destin et son avenir, par un dialogue national impliquant le Conseil national de transition et d’autres forces politiques qui se sépareront de Kadhafi et voudront bien participer à ce processus de reconstruction nationale. Nous les y aiderons, bien entendu, mais sans jamais nous substituer aux Libyens.

La cinquième et dernière question que je souhaite traiter – je ne veux pas être trop long – concerne le rôle de l’Union européenne.

Plusieurs d’entre vous, mesdames, messieurs les sénateurs, ont soutenu que l’Union européenne avait été incapable de faire entendre une position commune. Or ce n’est pas tout à fait exact. L’Union européenne a bien exprimé une position commune très clairement lors du Conseil européen du 11 mars, convoqué à la demande du Président de la République française. Une déclaration a alors été adoptée condamnant le régime libyen et exigeant le respect des résolutions du Conseil de sécurité, la mise en œuvre, voire le renforcement, de sanctions. Il existe donc bel et bien un corps de doctrine commun à l’ensemble des Vingt-Sept.

Il a d’ailleurs été réaffirmé une fois encore hier, à Bruxelles, par le conseil des ministres des affaires étrangères, qui a adopté une déclaration soutenant la résolution 1973 et s’est réjoui des conclusions du sommet de Paris.

L’Union européenne s’est également engagée sur le plan humanitaire. Nous avons pris la décision, dans le cadre de la résolution du Conseil de sécurité, d’être à la manœuvre pour mettre en forme une action humanitaire, en recourant au besoin à des moyens maritimes.

Je veux être complet : malgré une position commune, il n’y a pas unanimité. Au sein des Vingt-Sept, il existe aujourd’hui un clivage à propos de l’utilisation de la force militaire.

Sur ce point, la délégation allemande a marqué son opposition à la mise en œuvre de ce volet de la résolution. Cette prise de position m’a amené, peut-être de façon excessive, à regretter que, dans sa conception actuelle, l’Union européenne se comporte comme une ONG humanitaire. À un moment donné, Gérard Longuet et moi-même devrons bien poser de nouveau la question de savoir si, oui ou non, nous voulons progresser dans la construction d’une politique de sécurité et de défense commune. Vous le savez, c’est le vœu, c’est la conviction de la France.

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