Intervention de Jean-François Copé

Réunion du 17 décembre 2004 à 9h45
Loi de finances rectificative pour 2004 — Discussion d'un projet de loi

Jean-François Copé, ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire :

Madame la présidente, monsieur le président de la commission, monsieur le rapporteur général, mesdames, messieurs les sénateurs, après nous être quittés tard cette nuit à l'issue de l'examen, en première lecture, du projet de loi organique tendant à modifier la LOLF, nous nous retrouvons ce matin pour examiner le collectif budgétaire. Je suis heureux de vous en présenter les grandes lignes aux côtés de M. Hervé Gaymard.

Comme vous le savez, nous avons sur ce sujet pris en quelque sorte le train en marche. Mais je veux dire clairement que nous assumons totalement ce collectif et que nous nous inscrivons pleinement dans la démarche de nos prédécesseurs, MM. Nicolas Sarkozy et Dominique Bussereau.

Ce collectif traduit une volonté politique forte et des ambitions que nous souhaitons poursuivre, au besoin en enclenchant la vitesse supérieure sur un certain nombre de sujets.

Ce rendez-vous que constitue l'examen du projet de loi de finances rectificative est une excellente occasion de voir ce qui marche et ce qui pourrait être amélioré dans notre procédure. Ainsi, nous avons tous souffert, collectivement, du nombre d'amendements à examiner dans des conditions loin d'être idéales, aussi bien pour vous que pour moi, et c'est fort regrettable.

Je veux dire à cet instant à quel point j'ai conscience des limites de ce type de pratiques. Vous pouvez compter sur moi pour en tirer toutes les leçons pour nos prochains rendez-vous.

J'ai eu l'occasion, lors de l'examen tant du projet de loi de finances pour 2005 que du projet de loi organique modifiant la LOLF, de vous expliquer l'esprit dans lequel Hervé Gaymard et moi-même avons l'intention de travailler. Il est temps de bannir un certain nombre de pratiques qui nuisent à la clarté et à la sincérité du débat budgétaire. Sur ce point, je rejoins tout à fait les préoccupations exprimées par Philippe Marini dans son rapport.

Le collectif que nous vous présentons aujourd'hui n'est pas un simple ajustement des dotations budgétaires en fin d'exercice. Il est également l'expression de choix politiques significatifs et engageants pour notre pays.

Il traduit, d'abord, notre obsession d'une gestion saine de nos finances publiques. L'année 2004 est l'année de reprise de la croissance. Ce projet de loi de finances rectificative en est la preuve puisqu'il permet de confirmer les 6 milliards d'euros de recettes supplémentaires pris en compte lors de la présentation du budget pour 2005 : 1 milliard d'euros au titre de la réduction du prélèvement au profit des Communautés européennes, auquel s'ajoutent 5 milliards d'euros de plus-values de recettes fiscales liées au rebond économique de 2004.

Par ailleurs, le collectif constate 1, 5 milliard d'euros de recettes supplémentaires, liées à deux facteurs nouveaux : d'une part, le coût du contentieux relatif à la taxe sur les achats de viande, qui avait été provisionné à hauteur de 1, 4 milliard d'euros, mais l'analyse précise de la décision du Conseil d'Etat conduit à revoir à la baisse, à hauteur de 1 milliard d'euros, cette estimation, ce qui est une bonne nouvelle ; d'autre part, l'intégration au collectif de 560 millions d'euros au titre du reversement par la Société française pour l'assurance du capital-risque, la SOFARIS, d'excédents de subventions.

Ainsi, au total, les recettes supplémentaires s'élèvent à 7, 5 milliards d'euros par rapport à ce qui avait été prévu dans la loi de finances initiale.

Les temps changent. Désormais, et je rejoins les propos de M. Hervé Gaymard, on dit ce que l'on fait de ces recettes supplémentaires.

Ayant fait le choix de ne pas répéter le malencontreux précédent de la cagnotte de 7 milliards d'euros de plus-values de recettes enregistrés en 1999, dont moins de la moitié avait servi à réduire nos déficits publics, nous allons consacrer ces recettes à la réduction du déficit et travailler dans la transparence la plus totale. De ce fait, les plus-values anticipées ont été annoncées en temps réel, au fur et à mesure que le Gouvernement prenait lui-même connaissance des résultats de l'exécution.

Comme j'ai pu vous le dire hier, nous avons l'intention, à travers la LOLF, de veiller à ce que tout gouvernement ait l'obligation d'annoncer à l'avance devant le Parlement ce qu'il fera d'éventuelles plus-values.

Le principe qui guide notre démarche est de faire en sorte que l'on puisse, à travers ce collectif, ouvrir des crédits pour les dépenses qui sont aujourd'hui nécessaires à notre pays.

Nous assumons clairement ces choix politiques, car ils répondent à de réels besoins.

C'est, d'abord, le choix d'une défense nationale à la hauteur des enjeux du moment. Nous sommes là face à un vrai choix politique. Qui peut sérieusement contester aujourd'hui, au moins dans la majorité, l'exigence de poursuivre l'effort indispensable de remise à niveau de notre outil militaire, compte tenu du retard considérable accumulé ces dernières années ?

C'est la raison pour laquelle nous ouvrons des crédits à hauteur de 870 millions d'euros dans ce domaine.

Par ailleurs, 1 milliard d'euros supplémentaires sont affectés aux interventions sociales.

C'est enfin la volonté assumée de relancer l'investissement public, notamment par le financement du volet routier des contrats de plan Etat-région, qui constitue une nécessité, compte tenu des engagements pris.

Au total, le collectif qui vous est présenté comportait 1, 8 milliard d'euros d'ouvertures nettes de crédits. Par rapport à cette épure, nous nous sommes engagés à financer la reconduction de la prime de Noël pour les RMIstes à hauteur de 283 millions d'euros et l'attribution d'une prime de 70 euros aux 700 000 titulaires du minimum vieillesse à hauteur de 46 millions d'euros, en compensation de la hausse du prix du pétrole.

Mais, comme je m'y étais engagé, nos dépenses publiques doivent être maîtrisées : ces nouvelles dépenses seront donc entièrement gagées par des mesures d'économies, à l'euro près. Tel est le sens des amendements déposés qui tendent à proposer près de 330 millions d'euros de réduction de crédits. Il n'est donc pas question de baisser la garde et de laisser dériver nos dépenses.

Pour autant, nous avons vocation à préserver les grands équilibres de nos finances. Pour la troisième année consécutive, il ne sera pas dépensé un euro de plus que le plafond de dépenses autorisé par le Parlement en loi de finances initiale, soit 283, 7 milliards d'euros. En effet, l'essentiel de la dépense supplémentaire de 1, 8 milliard d'euros qui vous est soumise correspond à de l'investissement et ne pourra donc pas matériellement être dépensé avant le 31 décembre 2004. Il s'agit là d'un montant minime au regard de la masse globale des dépenses de l'Etat. C'était l'engagement du Gouvernement et nous le tenons !

De la même manière, nous poursuivons sans faille la réduction du déficit budgétaire afin de restaurer notre crédibilité, notamment auprès de nos partenaires européens.

Tel est l'esprit qui a animé le Gouvernement.

Plusieurs objectifs nous semblent essentiels. Le premier est de simplifier la vie des Français en mettant en oeuvre toute une série de mesures relatives à la fiscalité et à la relation entre le contribuable et l'administration fiscale.

Il ne s'agit que d'une première étape. Hervé Gaymard et moi-même entendons bien passer à la vitesse supérieure en 2005 et vous faire un certain nombre de propositions allant dans le sens d'une parfaite transparence et d'une amélioration constante des relations entre l'administration et le contribuable.

Nous avons fait beaucoup cette année pour la relation entre l'entreprise contribuable et l'Etat. Je souhaite que, l'année prochaine, nous puissions progresser au même rythme en ce qui concerne la relation entre les ménages contribuables et l'administration fiscale.

Le second objectif est de poursuivre un travail de simplification de notre environnement fiscal, je pense en particulier aux mesures destinées à encourager la télédéclaration. Ainsi prorogeons-nous de trois ans la dispense de production des reçus fiscaux pour tous ceux qui déclareront leurs revenus par voie électronique.

La démarche de modernisation des relations entre l'Etat et les contribuables est essentielle. J'entends bien poursuivre ce travail en 2005 et faire avec vous, là aussi, de nouvelles propositions pour l'an prochain.

Le troisième grand objectif est de renforcer l'attractivité de notre territoire.

De ce point de vue, monsieur Marini, vous avez souhaité faire évoluer le traitement fiscal des plus-values sur les cessions de participations, ainsi que des cessions concernant les brevets.

Notre précédente discussion à ce sujet était intervenue dans les heures qui avaient suivi ma prise de fonctions. Je vous avais demandé de bien vouloir accepter de me donner un temps de réflexion pour que je puisse, avec Hervé Gaymard, étudier ce dispositif. Nous sommes l'un et l'autre toujours ouverts à l'innovation. Il nous arrive même d'apprendre vite, mais quelques heures supplémentaires nous ont tout de même été nécessaires pour travailler sur ce sujet.

Je vous avais immédiatement fait part, de manière très intuitive, de mon grand intérêt pour cette mesure, car votre préoccupation rejoignait totalement celle du Gouvernement, qui est de donner à notre pays les moyens de faire valoir pleinement ses atouts dans le contexte de concurrence fiscale et économique qui existe au sein de l'Union européenne.

Un constat s'impose : la grande majorité des pays de l'Union européenne exonère désormais totalement les plus-values sur les cessions de titres de participation. Alors que, voilà encore quelques années, le match entre « taxateurs » et « exonérateurs » était dans ce domaine relativement équilibré, il ne l'est plus du tout. Les « exonérateurs » ont désormais plus que la majorité absolue. Il aurait donc été tout à fait préjudiciable à notre économie de ne pas réagir. C'est vrai pour les plus-values sur les cessions de titres de participation, mais également pour les brevets.

Hervé Gaymard vient de rappeler à l'instant l'importance que le Premier ministre et l'ensemble du Gouvernement attachent à une relance de la politique en matière d'attractivité dans le domaine de la recherche scientifique. Il est vrai que ce sujet particulier des brevets exige que nous prenions des mesures ambitieuses afin de nous aligner sur la fiscalité européenne. Le passage de 19 % à 15 % des droits fiscaux en la matière était donc tout à fait indispensable.

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