En effet, les experts eux-mêmes le disent : le bracelet électronique, mesure de sûreté s'il en est, même s'il est porté durant vingt ans, ne constituera en rien une garantie ! Ne peut-on imaginer qu'un délinquant sexuel multipliera les provocations, du fait même qu'il porte un tel bracelet ? Cette question est réelle et, sur ce point également, il ne peut être question d'improviser.
En réalité, il faudrait aller beaucoup plus loin en matière budgétaire. Certes, vos efforts sont réels, monsieur le ministre, mais la justice a besoin de moyens supplémentaires. Elle manque par exemple de psychiatres. Robert Badinter avait souligné, à l'occasion de l'examen du budget de votre ministère, la gravité de la situation sanitaire à l'intérieur des prisons : 10 % des détenus seraient atteints de schizophrénie. Ce chiffre me paraît un peu excessif, mais il recouvre sans doute une réalité.
Dans la recherche permanente de l'équilibre - et l'exercice est délicat - entre le pouvoir d'appréciation laissé au juge, d'une part, et les mesures contraignantes, d'autre part, renforcer la répression n'a rien de scandaleux ; Montesquieu l'a bien admis. Nous sommes prêts à vous suivre sur ce point, monsieur le ministre, à condition que les moyens soient au rendez-vous.
Au demeurant, il ne me semble pas opportun que nous nous engagions plus avant dans cette voie avant qu'aient été rendues les conclusions de la mission Fenech et celles de la mission Burgelin sur le suivi socio-judiciaire.
La position de notre groupe est, je le répète, très nuancée. Mais l'hommage, certes un peu tardif, qui est rendu à notre collègue Guy-Pierre Cabanel, ainsi que la sagesse dont a fait preuve la commission des lois en apportant des modifications à l'ensemble du dispositif nous invitent à y être favorables.
Quant à moi, j'aurai, à l'instar de quelques collègues, une position un peu plus réservée.
Je conclurai par une remarque, qui n'est peut-être pas totalement hors sujet. Le président du Conseil constitutionnel, Pierre Mazeaud, lors de la présentation de ses voeux au Président de la République, a dénoncé l'inflation législative : trop de lois tue la loi. Nous ne sommes pas loin de partager ce point de vue.
En 2001 a été votée la loi relative à la sécurité quotidienne - certes, vous n'étiez pas aux affaires, monsieur le ministre ! -, mais, en 2002, lors de l'élaboration de la loi d'orientation et de programmation pour la justice, dite « Perben I », vous étiez bien là ; en 2003, ce fut la loi pour la sécurité intérieure - nous nous rappelons tous le débat qui a eu lieu dans cette enceinte sur les halls des immeubles : tout cela était assez stérile - ; puis vint, en 2004, la loi portant adaptation de la justice aux évolutions de la criminalité, dite « Perben II ».
Je vous pose une question à cent sous, monsieur le ministre : le législateur n'est-il pas finalement le premier récidiviste ?