Tout d'abord, je tiens à exprimer mon accord total avec M. Peyronnet lorsqu'il souligne que la décision d'ouvrir ou de fermer les portes des immeubles ne relève pas de la loi.
Il m'a été objecté à plusieurs reprises, alors que je présentais des amendements à visées environnementales, écologistes, que, en dépit de leur intérêt incontestable, mes propositions n'avaient pas leur place dans la loi mais relevaient du domaine réglementaire. Que ne pourrait-on dire, à cet égard, des dispositions qui nous sont ici soumises !
Cela étant, je suis d'accord avec M. le ministre sur un point : les articles 10 et 11 sont de la même veine, la veine sécuritaire ! C'est pourquoi je demande, comme mes collègues du groupe CRC, la suppression de l'article 11.
En effet, les dispositions qu'il contient illustrent la volonté du ministre de l'intérieur et de l'aménagement du territoire de renforcer sa politique ultrasécuritaire à travers des procédures d'enfermement et de « bunkerisation » de la société.
Ces dispositions ont pour objet de faciliter la prise de décision relative à l'engagement de dépenses de sécurité dans les parties communes des copropriétés, en modifiant les articles 25 et 26 de la loi du 10 juillet 1965, qui fixe les statuts de la copropriété des immeubles bâtis. Or cette loi comporte déjà de nombreuses mesures relatives à la sécurité, notamment l'autorisation permanente donnée aux forces de l'ordre de pénétrer dans les parties communes de l'immeuble, qui doit être accordée à la majorité simple.
Nous assistons ici à un dévoiement de l'urbanisme et de l'architecture, soumis au prisme déformant du « tout-sécuritaire ». On édifie une société où l'obsession sécuritaire va jusqu'à modifier notre rapport à l'habitat. Or ce qui importe, c'est non pas de copier une méthode anglo-saxonne de prévention dite situationnelle lorsque l'on pense l'architecture et l'urbanisme de nos villes, mais bien de tout faire pour faciliter la création et le maintien du lien social.
Prévenir la délinquance, c'est permettre de faire émerger des villes et des quartiers où se développe un mieux-vivre social, culturel, intergénérationnel et environnemental, des villes où tout est mis en oeuvre pour que les gens se parlent, se côtoient, se respectent mutuellement, des villes où la solidarité et la diversité s'expriment dans des réalités quotidiennes. En tout cas, c'est s'opposer à la logique sécuritaire et répressive !
D'un côté, on pose partout des verrous, on s'enferme, on met en place une vidéosurveillance, on se « bunkerise » et on « ghettoïse » toujours plus. De l'autre, on fait en sorte qu'aucun espace n'échappe à l'emprise des forces de l'ordre ; c'est la suspicion permanente, on criminalise la présence des personnes en tout lieu, comme on a pu le constater s'agissant des jeunes stationnant dans les halls d'immeuble ou des femmes accusées de racolage passif.
Enfin, pour achever de justifier mon opposition totale à ce dispositif, je rappellerai qu'une partie des dispositions de l'article 11 sont issues d'un amendement déposé, entre autres signataires, par M. Serge Dassault, qui illustre cette crainte grandissante, chez les bourgeois, d'être assiégés par les pauvres, contre lesquels ils se défendent en se barricadant.