Intervention de Hélène Luc

Réunion du 7 décembre 2004 à 15h00
Rappel au règlement

Photo de Hélène LucHélène Luc :

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, je veux vous alerter sur ce qui s'est passé hier soir, à la fin de l'examen du projet de budget de la défense.

Alors que je m'étais félicitée, au cours de la discussion, que le Conseil d'Etat ait refusé que le Gouvernement présente un amendement sur le projet de loi de finances rectificative pour 2004, qui viendra en discussion devant le Sénat à la fin du mois de décembre, décidant de l'ouverture du capital de DCN, Mme la ministre de la défense a annoncé qu'elle contournerait la difficulté en présentant un projet de loi. Celui-ci sera examiné demain par le Conseil des ministres, puis le 16 décembre à l'Assemblée nationale et le 23 décembre au Sénat. Pourquoi pas le 24 décembre ?

Mme la ministre a précisé que la discussion ne durera pas longtemps, car le texte ne comportera qu'un article. Je vous laisse juges du mépris dans lequel elle tient les salariés !

Je tiens à protester contre la gravité d'une telle décision, qui engage l'avenir de l'emploi et du statut de milliers de salariés. Elle signifie, à terme, la privatisation de cette entreprise nationale dont la renommée mondiale n'est plus à faire.

Le Gouvernement accélère la politique de privatisation en France et en Europe.

Je l'ai dit hier : « Il faut avoir le courage de dénoncer cette Europe qui prône la privatisation de l'industrie de défense européenne pour mieux l'assujettir aux desseins transatlantistes et la subordonner à l'OTAN.

« Il faut avoir le courage de nous ériger contre les recommandations de la Commission européenne, qui préconisent une libéralisation du marché de l'armement ».

La loi de l'argent prend le pas dans le secteur stratégique - c'est également le cas pour France Télécom, EDF ou ADP -où les armes ne sont pas une marchandise comme une autre.

La réponse de Mme Alliot-Marie a été claire : l'ouverture du capital de l'entreprise est une nécessité pour résister à la concurrence et permettre des rapprochements, afin de préparer le terrain à des regroupements dans l'industrie navale en France et en Europe. Le mariage de DCN et de Thales doit préparer un mouvement plus large de restructuration du secteur en Europe.

Il ne fait aucun doute qu'après DCN ce sera l'ouverture du capital de GIAT Industries. Nous nous y opposerons avec la même fermeté.

Je veux souligner le mépris dans lequel le Gouvernement tient le Parlement. J'ai appris ce matin que, hier après-midi, Mme la ministre avait informé les syndicats du dépôt dudit projet de loi. Mais elle n'a pas communiqué cette information au Sénat. Il a fallu que plusieurs sénateurs après moi lui posent la question pour lui arracher la réponse.

Ainsi, le Parlement n'est plus un lieu d'information et de débat. Non seulement on nous oblige à débattre du budget sous la forme de questions, ce qui ne permet pas aux groupes politiques d'exprimer leur position en cohérence, mais, en outre, Mme la ministre ne répond pas aux questions !

Nous protestons vivement contre la volonté de rabaisser de plus en plus le rôle du Parlement, qui s'explique par le fait que l'Europe prendra de plus en plus des décisions graves pour notre pays. Il n'est qu'à lire l'article I-40, paragraphe 2, de la Constitution européenne : « La politique de l'Union (...) respecte les obligations découlant du traité de l'Atlantique Nord (...) et elle est compatible avec la politique commune de sécurité et de défense arrêtée dans ce cadre. »

Telles sont, entre autres dangers, les raisons pour lesquelles nous voterons contre la Constitution européenne.

Mme Alliot-Marie a dit qu'elle était d'accord pour organiser, comme je le lui proposais, un débat sur l'industrie nationale d'armement. Je demande donc, monsieur le président, qu'il soit prévu dès la rentrée de janvier.

Les salariés de DCN, de GIAT Industries, de Thales et d'EADS peuvent compter sur le groupe communiste républicain et citoyen pour riposter, comme eux-mêmes le font, contre ces nouvelles attaques qui n'ont rien à voir avec l'intérêt de la France. Nous nous y opposerons avec toute la résistance possible.

Je demande, monsieur le président, que soit maintenu l'ordre du jour tel qu'il avait été prévu, et je compte fermement sur vous pour faire respecter le Parlement.

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