Intervention de Charles Revet

Réunion du 7 décembre 2004 à 15h00
Loi de finances pour 2005 — Agriculture alimentation pêche et affaires rurales suite

Photo de Charles RevetCharles Revet :

Monsieur le ministre, je commencerai mon propos en vous disant à mon tour combien je me réjouis de votre arrivée au ministère de l'agriculture, en remplacement de M. Hervé Gaymard, qui s'y était beaucoup investi, et aux côtés de M. Nicolas Forissier, qui a pris ses responsabilités à bras-le-corps. Chacun connaît votre volonté et votre ténacité. Elles seront utiles pour l'accomplissement de votre mission. Mais vous savez que vous pouvez compter sur notre entier soutien.

Dans le temps bref qui m'est imparti, car nous sommes nombreux à intervenir, je souhaite présenter trois réflexions concrètes, qui sont à la fois des interrogations et des suggestions.

Ma première réflexion porte sur la politique agricole commune au travers de l'attribution des aides aux productions fourragères.

La Seine-Maritime, et ce n'est pas le seul département concerné, a subi, depuis une dizaine d'années, des inondations à répétition, avec des conséquences quelquefois dramatiques, en tout cas extrêmement coûteuses. Elle compte en effet sur son territoire de très nombreux bassins versants, qui étaient autrefois essentiellement laissés en prairie permanente. Aujourd'hui, la prairie permanente tend à disparaître au profit d'autres cultures, notamment du maïs fourrage.

Ma première interrogation porte sur la disparité qui existe en la matière : le maïs fourrage, comme beaucoup d'autres productions, bénéficie d'aides assez substantielles - et je ne souhaite en aucun cas la disparition de ces aides, bien au contraire - alors que la prairie permanente ne bénéficie d'aucune aide ou presque ? Pourtant, si on analyse ce que représentent ces cultures en termes de productivité, le rendement du maïs s'élève en moyenne à 12 000 unités fourragères par hectare, et celui de la prairie permanente à 6 000 unités, c'est-à-dire moitié moins.

La logique voudrait que la prairie permanente bénéficie au moins des mêmes aides. En effet, comme le savent les responsables des collectivités et la population, il est clair que, lorsqu'un bassin versant est maintenu en prairie permanente, on évite l'érosion des sols et, pour une grande part, les inondations.

Ma deuxième réflexion porte sur le développement des biocarburants, auquel le Gouvernement a indiqué qu'il souhaitait donner un coup de fouet, ce dont je me réjouis.

Lorsque j'étais député, j'avais fait venir à l'Assemblée nationale une voiture importée du Brésil qui fonctionnait à l'alcool pur de betterave. Le ministre de l'agriculture d'alors, M Jean Puech, m'avait fait l'amitié de monter à bord. Par conséquent, cela fonctionne !

Aujourd'hui, alors que le pétrole se fait rare et très cher, nous avons de l'espace à utiliser, particulièrement en France.

Quelles dispositions comptez-vous prendre, monsieur le ministre, monsieur le secrétaire d'Etat ?

Tout d'abord, il est clair que la filière des biocarburants ne pourra devenir compétitive qu'à partir du moment où la recherche sera suffisamment encouragée au niveau tant de la production que de la transformation.

Ensuite, en France et en Europe, certains agriculteurs ont commencé à mettre en place, dans leur exploitation, voire dans les groupements d'exploitations, des installations fonctionnant avec leur propre carburant, c'est-à-dire l'huile de colza, de tournesol ou autres.

Alors qu'en Allemagne cette pratique est, à ma connaissance, exemptée de toutes taxes, ce qui me paraît une bonne chose puisqu'il s'agit d'une incitation, il semblerait qu'en France se manifestent d'ores et déjà des velléités de taxation des producteurs qui s'engagent dans cette voie. Or une telle démarche, économe en produits pétroliers, offre, en outre, un débouché pour l'agriculture elle-même.

Ma troisième réflexion concerne la pêche, domaine qui relève également de votre compétence, monsieur le ministre. La pêche est largement pratiquée dans mon département, qui compte de nombreux ports. Je souhaite vous parler de la coquille Saint-Jacques : il s'agit non pas des problèmes sanitaires qui sont apparus ces derniers jours et qui, fort heureusement, sont en train de s'estomper, mais des quotas et des périodes de pêche.

Que je sache, la France et l'Angleterre sont en Europe ! Pourriez-vous m'expliquer les raisons pour lesquelles les Anglais peuvent pêcher, semble-t-il, toute l'année, alors que les Français sont soumis à des quotas, et doivent, en plus, respecter des périodes de pêche ?

Que l'on édicte des restrictions et des quotas pour permettre le renouvellement de la ressource, je suis tout à fait d'accord. Mais comment justifier cette disparité, qui est d'autant moins compréhensible que les coquilles pêchées par les Anglais, après avoir transité par les ports britanniques, arrivent sur les étals de nos poissonniers ?

Nos agriculteurs et nos pêcheurs sont assez souvent surpris que certaines dispositions, qui sont prises notamment à l'échelon européen, soient aussi éloignées du bon sens qui régit leur travail quotidien.

Je compte sur vous, monsieur le ministre, pour étudier tous ces aspects de la question.

Bien entendu, comme mes collègues, je voterai votre budget, monsieur le ministre.

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