Intervention de Jean-Pierre Sueur

Réunion du 19 septembre 2006 à 16h00
Prévention de la délinquance — Article 12

Photo de Jean-Pierre SueurJean-Pierre Sueur :

Je m'en étonne presque, tout en comprenant leur silence. En effet, mes chers collègues, s'il fallait trouver un exemple du caractère vétilleux, obsessionnel et parfois un peu dérisoire des mesures qui sont accumulées dans ce texte à tout propos, hors de propos, mais qui sont toujours rattachées à la prévention de la délinquance, ce serait ce 3° !

Vous nous proposez, monsieur le ministre, de modifier la loi relative non pas aux fourrières, mais aux véhicules hors d'usage qui se trouvent dans les fourrières. C'est un grand problème de délinquance dans ce pays, chacun en conviendra !

Permettez-moi d'analyser la modification proposée. Quel est l'état actuel de la loi ? Selon les termes de l'article L. 25-4 du code de la route, « les véhicules qui n'ont pas trouvé preneur, à l'expiration d'un délai fixé, pour chaque département, par le représentant de l'État dans le département, sont livrés à la destruction sur l'initiative de l'autorité administrative ».

Une telle disposition est assez simple à comprendre ! Je ne suis pas sûr qu'il soit nécessaire de la modifier. Or vous proposez, monsieur le ministre, la rédaction suivante : « Ceux d'entre eux » - il s'agit des véhicules - « que le service chargé du domaine estime invendables et ceux qui ont fait l'objet d'une tentative de vente infructueuse sont livrés sans délai par l'autorité dont relève la fourrière à la destruction. »

Deux cas de figure sont donc distingués. Tout d'abord, les véhicules que le service des domaines estime invendables. À ce propos, je m'étonne d'ailleurs - je vais ainsi dans votre sens, monsieur le ministre - que vous n'ayez pas fait inscrire la mention « sans délai ». §Par exemple, on pourrait écrire : « Le service des domaines donne un avis sans délai » et « les véhicules sont sans délai remis au destructeur et la paix publique est ainsi rétablie ».

Ensuit, les véhicules pour lesquels une seule tentative de vente s'est révélée infructueuse. Comment cela se passe-t-il ? On trouve quelqu'un, et on lui demande s'il veut acheter. En cas de refus - je ne suis pas sûr que ce soit conforme à l'équité ! -, ce véhicule est livré sans délai à la destruction.

Très franchement, monsieur le ministre, le texte actuel convient très bien. Celui que vous proposez est moins clair, plus confus, plus compliqué.

Par ailleurs, je voudrais que vous nous expliquiez en quoi cette mesure relative aux véhicules usagés qui se trouvent dans une fourrière et qui sont, par conséquent, très bien gardés sera efficace. En apportant la précision « ils seront livrés sans délai à la destruction », vous pensez que le responsable de la fourrière, dès lors que ce projet de loi sera voté, enverra sans délai à la destruction toutes les épaves qu'il trouvera ? Êtes-vous sûr qu'il le fera ? Sinon, il n'appliquera pas la loi ! Or nul n'est censé l'ignorer !

Nous tombons ainsi, vous le voyez bien, dans un abîme dérisoire, avec cette obsession de mettre la prévention de la délinquance partout, y compris là où elle n'a franchement rien à faire !

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