Madame le sénateur, la question du prix de l'acier est effectivement préoccupante pour de nombreuses entreprises de notre pays. Plusieurs actions ont été menées par le ministère de l'économie, des finances et de l'industrie sur ce sujet depuis le mois d'avril dernier.
L'augmentation des prix de l'acier est due à deux facteurs : d'une part, la hausse de la demande, tirée par la Chine, que vous avez évoquée, madame le sénateur, et, d'autre part, les tensions pesant sur l'approvisionnement en matières premières nécessaires à l'industrie sidérurgique telles que le coke, les ferrailles et les minerais.
Aucun de ces deux paramètres ne trouvera de solution rapide. Ainsi, on n'assistera pas, tout à coup, à l'effondrement d'un marché ou à un approvisionnement bien supérieur. Il faut donc s'attendre à supporter pendant un certain temps des prix élevés de l'acier. La croissance de la Chine, bien que contrôlée par son gouvernement, est sans aucun doute durable. Aujourd'hui, les prix de l'acier pratiqués dans ce pays sont plus élevés que ceux que l'on enregistre en Europe.
L'augmentation de l'offre mondiale de matières premières afin de pallier ces difficultés nécessite des investissements extrêmement lourds en ce qui concerne les mines et les infrastructures de transport dans les pays producteurs et, par conséquent, demande du temps.
Ces déséquilibres structurels ont conduit à des hausses ininterrompues du prix de l'acier depuis 2003 dans tous les pays du monde. Cependant, il est à noter des disparités. L'Europe continue ainsi de bénéficier de prix sensiblement moins élevés que ceux de la zone américaine, tarifs équivalents à ceux qui sont pratiqués en Asie.
Dans ce contexte, la France, sur ma requête, a demandé au commissaire européen chargé du commerce, au mois d'avril dernier, d'engager toutes les actions possibles pour lever les barrières s'opposant à la circulation des matières premières et des produits finis.
Depuis lors, chacune des pistes évoquées dans le courrier qu'avait envoyé à cette fin M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie a été explorée. Plusieurs résultats notables doivent être relevés, en particulier l'assouplissement du système de licences d'exportation de coke mis en place par la Chine, qui contribuait à la hausse très rapide des prix de cette matière. En effet, les Chinois n'exportaient pas suffisamment de coke par rapport aux besoins de l'industrie européenne.
La Commission européenne a aussi supprimé les droits antidumping sur les bobines à chaud et entame actuellement la renégociation des « accords acier » avec l'Ukraine et la Russie, pays dont la croissance est très forte et qui consomment une importante quantité de ferraille.
La France a besoin de ferraille, de coke. Elle ne doit plus se heurter aux droits antidumping qui ne font qu'entraîner une hausse des prix. Sur tous ces points, le Gouvernement a agi avec tous les moyens disponibles dans le cadre de l'Union européenne. Il reste déterminé à exploiter encore davantage toutes les possibilités d'action.
Par ailleurs, il a été demandé aux services du ministère de l'économie, des finances et de l'industrie d'être extrêmement attentifs à l'exercice correct de la concurrence dans le secteur de la distribution d'acier en France. En dehors du problème des quantités de production et de consommation, les circuits de distribution doivent en effet être transparents à l'égard des moyens de production existants.
Cette vigilance, bien que nécessairement peu visible, est très importante pour éviter que des ententes ne se créent à l'occasion de la hausse des prix et qu'une spéculation ou des stockages ne soient pratiqués pour accentuer encore la tendance. La situation est d'ailleurs similaire s'agissant du pétrole.
Madame le sénateur, en ce qui concerne plus précisément les suggestions que vous faites, je vous signale que des actions ont aussi été menées dans le domaine des marchés publics, l'Etat se devant d'être un client exemplaire à l'égard de ses fournisseurs. La « théorie de l'imprévision », qui veut que les marchés puissent être révisés en cas d'événements extérieurs imprévisibles bouleversant l'équilibre des contrats, a été rappelée aux services concernés. Le ministère de l'équipement a envoyé une circulaire aux préfets en ce sens. Cependant, nous constatons que peu d'entreprises ont fait appel à cette possibilité pour l'instant. Celles qui l'ont fait ont vu leurs difficultés examinées au cas par cas.
Enfin, M. le ministre délégué à l'industrie a organisé le 22 octobre dernier une table ronde consacrée spécifiquement à la filière automobile, au cours de laquelle les participants se sont notamment engagés sur la mise en chantier d'un tableau de bord du prix de l'acier et sur le principe d'une prise en compte de la hausse du prix de l'acier le long de la chaîne de sous-traitance. Il est en effet primordial que les entreprises touchées par l'augmentation des prix aient la possibilité de répercuter cette hausse, au moins partiellement, sur leurs clients.
Comme vous le constatez, le Gouvernement est très attaché à ce que les conséquences de la hausse du prix de l'acier sur le tissu industriel français soient maîtrisées au maximum. Il utilise tous les leviers d'action de l'Etat pour y remédier.