On ne peut que souscrire à l'objectif de notre collègue Pierre Hérisson, dont nul n'oublie les responsabilités qu'il exerce à la tête de la Commission nationale consultative des gens du voyage.
Son amendement a pour objet de mettre en place une procédure simple, rapide et peu onéreuse. Par ailleurs, il tend à garantir les droits des gens du voyage en leur ouvrant la possibilité d'introduire un recours suspensif devant le tribunal administratif contre la décision du préfet, le juge ayant alors l'obligation de statuer dans un délai de soixante-douze heures.
Le dispositif proposé n'en suscite pas moins plusieurs interrogations. J'en citerai trois.
En premier lieu, on peut se demander si cette nouvelle procédure n'est pas contraire à l'article 66 de la Constitution, aux termes duquel l'autorité judiciaire est la gardienne des libertés individuelles, en l'espèce le droit de propriété et la liberté d'aller et venir.
En deuxième lieu, bien souvent les difficultés rencontrées par les maires pour obtenir l'évacuation des terrains faisant l'objet d'une occupation illicite ne tiennent pas seulement à la longueur de la procédure, puisque le président du tribunal de grande instance statue en référé, mais sont liées également au refus des préfets de prêter le concours de la force publique. Il importe donc qu'à l'avenir les préfets soient moins timorés qu'aujourd'hui.
Enfin, en troisième lieu, la rédaction proposée est sans doute perfectible.
Premier exemple : il me semble que le maire n'aurait plus la possibilité de se substituer au propriétaire d'un terrain privé faisant l'objet d'une occupation illicite pour obtenir son évacuation. Que se passera-t-il en cas de carence du propriétaire ?
Second exemple : il est curieux d'exiger du préfet qu'il notifie aux occupants illicites d'un terrain sa mise en demeure « dans les formes habituelles », c'est-à-dire par voie postale. Cette mention pourrait être utilement supprimée.
Il importe donc que l'amendement soit rectifié ou fasse l'objet d'un sous-amendement, que la commission est prête à proposer. Mais elle souhaite tout d'abord connaître l'avis du Gouvernement.
Je n'évoquerai pas le sous-amendement n° 331, sous-amendement de coordination avec le sous-amendement n° 320.
Quant à ce dernier, il paraît difficile à la commission de ne pas émettre un avis défavorable. En effet, ce sous-amendement, proposé par notre collègue Jean-Claude Carle, a pour objet de supprimer la procédure de référé permettant aux occupants d'un terrain mis en demeure par le préfet de l'évacuer d'introduire un recours suspensif devant le tribunal administratif, ce dernier devant statuer dans les soixante-douze heures.
Ce sous-amendement n'a pas été examiné par la commission des lois. Cependant, je dois faire observer que le droit à l'exercice de recours juridictionnels effectifs est garanti par la Constitution.
Si l'objet de ce sous-amendement est de supprimer toute voie de recours contre une décision préfectorale mettant en demeure les gens du voyage d'évacuer le terrain qu'ils occupent, alors il est contraire à la Constitution.
Si son objet est de soumettre la décision préfectorale au droit commun des contentieux administratifs, alors il fait perdre à la procédure imaginée par notre collègue Hérisson une grande partie, voire la totalité, de son intérêt, puisque le tribunal administratif ne serait plus obligé de statuer dans les soixante-douze heures.
Dans le département du Nord, que je connais bien, le délai varie de un an et demi à trois ans.
C'est pourquoi la commission en demande le retrait. À défaut, elle émettra un avis défavorable.