Je voudrais, en ma qualité d’intervenant au nom du groupe de l’UMP, aborder les sujets qui fâchent et traiter de questions plus politiques. Les questions de compétences ont été très bien présentées par les rapporteurs. Je souscris à la plupart de leurs conclusions.
Si nous avons examiné ce projet de loi, nous n’avons pas esquivé, pour autant, un certain nombre de problèmes posés, que ce texte a le mérite de traiter avec réalisme et bon sens. Comme fil conducteur, certes, pas très original, de mes réflexions, je suivrai l’ordre des titres.
Pour ce qui concerne le titre Ier, trois sujets fâchaient, lorsque les travaux de la commission spéciale ont débuté. Aujourd’hui, pour l’essentiel, les malentendus ont été dissipés.
Le premier sujet qui fâche sur le titre Ier, c’est le statut d’auto-entrepreneur. Monsieur Daniel Raoul, je ne pense pas comme vous qu’il constitue un retour en arrière ou entre en conflit avec celui des TPE, bien au contraire.
En réalité, il s’agit de développer un nouvel esprit d’entreprise, qui prépare l’accès au statut de TPE, pour les entrepreneurs qui débutent, qui doivent être encouragés, qu’ils soient jeunes – universitaires, étudiants -, demandeurs d’emploi, qu’ils décident de quitter le statut du salariat pour devenir entrepreneur à leur compte. Il s’agit, en quelque sorte, d’un démarrage sous des auspices de liberté, tout au moins de libre contrainte.
Mais peuvent être aussi concernés les retraités ou les salariés, dont la capacité de travail n’est pas saturée et qui veulent exercer une activité complémentaire. Dans les deux cas, il existe un butoir, qui a été relevé par l’Assemblée nationale.
Alors, de deux choses l’une : ou c’est un nouvel entrepreneur qui accède au statut de TPE en passant le seuil fatidique et il doit alors respecter l’ensemble des obligations, d’ailleurs considérablement allégées, et qui, j’en suis convaincu, continueront de l’être, ou c’est une personne qui décide de rechercher un revenu complémentaire et qui trouve sa place dans un interstice du marché. Toute offre créant sa propre demande, ces activités nouvelles créeront des richesses nouvelles. Dans de très nombreux cas, ces activités permettront de répondre à l’attente de clients que les TPE aujourd’hui ne sont pas en mesure de satisfaire. Ainsi, par exemple, nous savons que c’est le cas dans le secteur du bâtiment ou du second œuvre. Le système, qui n’est pas conflictuel, s’inscrit dans une logique soit de complément, soit d’initiation.
Comme l’a dit Jean Boyer, il ne faudrait pas qu’un monde gris se développe à côté des TPE institutionnalisées. Je suis certain, madame le ministre, messieurs les secrétaires d’État, que vous pourrez nous apporter des réponses à ce problème au cours du débat.
Par ailleurs, le projet de loi prévoit des mesures qui facilitent l’accès des salariés à l’acquisition de l’entreprise dans laquelle ils travaillent. C’est une réponse à la crainte légitime de ceux qui, ayant développé un fonds de commerce ou une entreprise artisanale tout au long de leur vie professionnelle, penseraient que la cession de ce fonds serait rendue difficile par l’émergence de nouveaux concurrents subissant de moindres contraintes.
Parallèlement à la possibilité de démarrer une activité, le projet de loi permet, dans des conditions très généreuses et réalistes, au salarié qui travaille dans l’entreprise de devenir le successeur de son patron dans un objectif de coopération. Assurément, c’est une façon de réaliser rapidement un chiffre d’affaires non négligeable et d’accéder à une dimension auxquels l’auto-entrepreneur ne peut pas prétendre. J’estime que le malentendu pourra être dissipé et que les débats permettront de rassurer les organisations représentant les artisans et les commerçants, à juste titre sourcilleuses de ne pas voir apparaître une concurrence déloyale.
Le deuxième sujet qui fâche sur le titre Ier va sans doute vous surprendre puisqu’il s’agit du problème des délais de paiement, une faiblesse française constatée par tout le monde. Nous sommes un capitalisme sans capitaux et nos entreprises ont l’habitude de vivre sur le crédit fournisseurs, ce qui est malsain. Pour vous donner un ordre de grandeur, le délai moyen de paiement en France s’établit à 67 jours, alors qu’en Allemagne il est de 47 jours. Cette différence de 20 jours est, certes, faible. Mais, quand on sait que le crédit inter-entreprises est de 600 milliards d’euros, réduire d’un tiers cette somme représente 200 milliards d’euros. On comprend que l’on ne puisse remettre en cause qu’avec d’infinies précautions cette mauvaise habitude de délais interminables.
Pour autant, il ne faut pas se résigner. Le projet de loi vise donc à revenir à un délai raisonnable de 45 jours fin de mois, 60 jours calendaires, dans des conditions qui tiennent compte d’un certain nombre de réalités.
Sur ce point, madame le ministre, messieurs les secrétaires d’État, soyons attentifs à ce que, une fois le principe posé par la loi, les dérogations proposées n’aboutissent pas à des situations dans lesquelles les rapports de force priveraient certaines entreprises de la possibilité de survivre. Si une entreprise est durablement condamnée à régler ses fournisseurs à 60 jours alors qu’elle est payée à 90 jours, à un moment donné, le système ne peut plus fonctionner. Je sais que certains secteurs connaissent des difficultés. Au cours du débat, nous entrerons très probablement dans le détail du sujet.
Je souhaite vraiment que la crédibilité du législateur ne soit pas démentie par l’octroi de dérogations meurtrières pour certains secteurs d’activité.