Nous arrivons au terme de ce texte, dont la discussion s'est déroulée à un rythme extrêmement soutenu, dans des conditions difficiles, puisque, pour la moitié du temps, nous avons siégé en séance de nuit, c'est-à-dire entre 21 heures 30 et une heure du matin.
Par ailleurs, aucun respect des conventions admises pour permettre l'élaboration d'un travail parlementaire digne de ce nom n'a été observé, puisque, après avoir commencé la discussion de ce texte lundi 13 juin, nous avons ensuite examiné les amendements en commission, après la discussion générale.
Qui plus est, et contre toute attente, ce projet de loi a été déclaré d'urgence, ce qui nous prive d'une deuxième lecture, pourtant nécessaire tant les questions traitées sont importantes et risquent d'avoir des conséquences sur le quotidien de nombre de nos concitoyens. Je pense notamment aux jeunes apprentis : vous les contraignez à travailler le dimanche.
Vous avez obligé Mme Procaccia, rapporteure pour la commission des affaires sociales, à retirer l'amendement qui visait à encadrer le travail des apprentis mineurs et à en restreindre le champ d'application. Nous avions le même type d'approche lorsque nous insistions sur la nécessité de renvoyer à un accord collectif de branche et de restreindre la liste des professions concernées.
De tels garde-fous nous semblaient essentiels, mais vous les avez balayés au prétexte qu'il faut faire vite pour ne pas pénaliser les apprentis qui pourraient être embauchés dès la rentrée prochaine ! Autrement dit, mais ce n'est peut-être là qu'un raccourci que m'autorisent certains des propos tenus, on les embauche pour les faire travailler le dimanche !
Par ailleurs, nous avons abordé des sujets très complexes et si diversifiés que plusieurs d'entre eux auraient pu faire l'objet d'un projet de loi.
Certains auront, je le crois, des répercussions douloureuses sur la cohésion économique et sociale de notre pays.
Je pense tout particulièrement à la réforme de la loi Galland et à ses incidences sur l'organisation du secteur de la distribution. Je redoute aussi des conséquences négatives pour les petites entreprises qui fournissent les grandes et moyennes surfaces.
Cette question de la coopération commerciale et des marges arrière est si compliquée qu'il nous aurait fallu beaucoup plus de temps pour en apprécier les implications.
Elle est même si compliquée que le rapporteur a préféré retirer, en commission, soit quelques heures avant son examen en séance publique, un amendement modifiant le calcul du seuil de revente à perte : l'article 31 aura donc été voté sans modification, comme le Gouvernement l'avait souhaité.
Quant à l'article 46 relatif au chèque emploi dans les TPE, le Gouvernement a décidé de le retirer pour l'intégrer dans les prochains textes d'ordonnances en préparation. Ce n'est pas la première fois que le Gouvernement nous prive d'un débat sur des questions aussi fondamentales.
Pendant ce temps, on nous concocte le fameux « contrat nouvelle embauche » qui ne concernerait que les très petites entreprises, mais qui n'a même pas été évoqué lors du débat, et qui ouvre la porte à une remise en cause fondamentale de notre droit du travail en matière de licenciements et de contrats à durée déterminée.
Toutes ces remarques, malgré certains points positifs que je vais évoquer, suffisent déjà pour que nous votions contre ce projet de loi.
Le statut du conjoint collaborateur est incontestablement une avancée.
L'encadrement des enchères électroniques était indispensable, mais votre refus de prendre en considération la question des enchères salariales est une grave erreur, car ce type de recrutement va très probablement se généraliser : il existe déjà en Allemagne et pourrait franchir la frontière sans tarder.
Une fois de plus, vous refusez de réglementer alors que certaines barrières sont indispensables si l'on veut éviter le creusement des inégalités, conséquence d'un libéralisme débridé. Une telle proposition doit au contraire être portée au niveau européen.
La réforme des chambres de commerce et d'industrie s'imposait, mais vous leur accordez des prérogatives qui risquent de les placer en situation de confrontation, voire de concurrence avec les collectivités territoriales, au lieu de mettre en place une réelle synergie entre les différentes instances participant au développement local.
Votre texte visait à répondre à un problème réel : assurer la transmission des PME et des très petites entreprises dans les dix prochaines années. Le dispositif que vous avez envisagé est insuffisant.
Vous avez refusé nos propositions tendant à faciliter la transmission au collaborateur principal de l'entreprise, qui est très souvent l'unique salarié. Or c'est ce principal compagnon qui est souvent le repreneur potentiel, plus que le conjoint ou les enfants.
On retrouve ici beaucoup d'aspects d'une vision un peu trop « paternaliste » et insuffisamment dynamique, qui vous fait rater l'un des maillons essentiel de la transmission.
Quant au tutorat, c'est une demi-mesure, et je demeure réservé quant à son efficacité pour les raisons que j'ai soulignées lors du débat.
Nous voterons donc contre ce projet de loi.