Intervention de André Lardeux

Réunion du 6 juin 2006 à 21h45
Immigration et intégration — Suite de la discussion d'un projet de loi déclaré d'urgence

Photo de André LardeuxAndré Lardeux :

Vous vous sentez visé, mon cher collègue ?

Ceux qui ont cette position ont tendance à confondre l'État avec la planète, la citoyenneté avec l'humanité. Tout le monde ne peut pas devenir citoyen français !

Les solutions proposées sont-elles moins conformes à l'impératif d'humanité que la situation présente ? Il est permis de ne pas le penser pour l'essentiel.

Laisser faire, c'est en grande partie accepter le jeu de passeurs sans scrupules ou de négriers exploiteurs de main-d'oeuvre corvéable à merci.

Laisser faire, c'est souvent légitimer, à défaut de légaliser, mariages de complaisance et polygamie. Monsieur le ministre, vous renforcez le rôle des consulats ; il faudra très certainement les doter des moyens humains convenables, aussi bien en quantité qu'en qualité.

Adapter le nombre de nos hôtes à nos capacités d'accueil et d'emploi est un impératif pour nous-mêmes, mais aussi pour ceux qui sont accueillis et qui doivent l'être dans des conditions décentes. Si l'on veut vraiment réussir leur intégration, il est indispensable de réguler les mouvements migratoires, sinon les immigrés connaîtront des situations de plus en plus indignes sur le plan humain et cela suscitera des réactions de rejet de plus en plus fortes, avec toutes les conséquences dramatiques que l'on peut envisager.

Il ne faut pas se contenter de parler des droits ; il faut aussi parler de devoirs. C'est ce qui élève l'homme au dessus de l'animal, car faire son devoir, c'est être libre. La France doit accueillir dans des conditions convenables les étrangers, mais ceux-ci, en contrepartie, doivent choisir la France pour s'y amalgamer.

Parmi les critiques émises, deux méritent particulièrement d'être examinées et sont d'ailleurs liées. Elles concernent l'aide au développement et la sélection des diplômés. Ce sont les plus fondées. Mais on ne réglera pas la question de l'aide au développement dans le cadre d'une loi, sauf à se contenter d'incantations. Les réponses à la dimension internationale des problèmes migratoires relèvent de la concertation entre États ou grands ensembles d'États.

A cet égard, on ne peut que regretter l'incohérence des pays européens qui pratiquent des mesures de régularisation à la « va comme je te pousse », sans souci d'accorder leurs violons, et se trouvent par la suite confrontés à des problèmes insolubles, comme nos amis espagnols qui ont oublié que « Dieu se rit de ceux qui déplorent des effets dont ils continuent de chérir les causes ».

On doit également s'interroger sur nos politiques d'aide au développement, quand elles existent, ce qui n'est pas toujours le cas ; les politiques agricoles et commerciales du Nord sont-elles une des causes des mouvements migratoires ? Peut-être.

Nos déficits publics, résultat du profond égoïsme de nos sociétés à l'égard des générations futures, sont-ils conformes à la solidarité que nous devrions manifester vis-à-vis des pays en développement ? Pas plus que nous ne devons financer notre prétendu modèle social à crédit, nous ne pouvons assurer une aide efficace au développement à crédit. En effet, le transfert de richesses vers les moins favorisés doit être réel et non virtuel. Si nous n'agissons pas sans tarder sur les causes des mouvements migratoires, et la France ne peut pas le faire seule, « le pas des mendiants fera trembler la terre » !

S'agissant des immigrés qualifiés, la réciprocité me semble nécessaire et être la règle de base pour résoudre cette question.

Vous avez, monsieur le ministre, essayé de répondre aux difficultés à venir sur un sujet éminemment sensible ; votre essai mérite d'être tenté, et je souhaite que l'application de cette loi soit la plus efficace et la plus humaine possible.

En dépit de ce que pensent les adeptes du multiculturalisme, l'amour de la France ne se négocie pas, et nul n'est tenu d'être Français. La logique du laisser-faire en matière d'immigration conduit à la ségrégation dans la mesure où ses considérants sont hostiles à l'unitaire et à l'universel. On ne peut pas superposer indéfiniment des « différences » sans se soucier du principe d'unité qui leur permettra de cohabiter ensemble.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion