Intervention de Christian Estrosi

Réunion du 6 juin 2006 à 21h45
Immigration et intégration — Suite de la discussion d'un projet de loi déclaré d'urgence, amendement 106

Christian Estrosi, ministre délégué :

...mais justes à l'égard de ceux qui manifestent leur volonté d'aimer la France, de respecter ses valeurs, de s'intégrer à la vie de la cité.

Merci à Jean-Patrick Courtois du plein soutien qu'il a apporté au projet de loi, fort de l'expérience qui est la sienne en tant que rapporteur de la loi du 26 novembre 2003 relative à la maîtrise de l'immigration, au séjour des étrangers en France et à la nationalité. Je le remercie en particulier d'avoir souligné l'importance de l'immigration de travail et la nécessité absolue de construire un vrai parcours d'intégration, comme le projet de loi le permet.

Le président Pelletier a souligné, avec l'autorité qui est celle d'un ancien ministre de la coopération, l'importance stratégique d'une bonne articulation entre la politique d'immigration et la politique de développement.

Je tiens d'ores et déjà à marquer le plein soutien du Gouvernement à deux amendements très importants que vous avez présentés, monsieur le sénateur.

Nous pensons, comme vous, que la carte « compétences et talents » ne doit être renouvelable qu'une fois lorsque son titulaire est originaire d'un pays en voie de développement. C'est ce à quoi vise l'amendement n° 106 rectifié bis.

Surtout, je tiens à indiquer que le Gouvernement se montrera favorable à l'amendement n° 510 rectifié quinquies, très novateur, que vous présentez avec un grand nombre de vos collègues, issus des groupes du RDSE, de l'UMP et de l'UC-UDF. La création d'un « compte épargne développement » concrétisera notre volonté d'aider vigoureusement les pays d'émigration - notamment ceux de l'Afrique subsaharienne - sur le chemin du développement.

Permettez-moi, enfin, de vous remercier, monsieur le sénateur Pelletier, du soutien que vous avez apporté au mécanisme de la Commission nationale de l'admission exceptionnelle au séjour. Vous avez souligné que cette instance devait contribuer à définir des critères d'admission au séjour explicites, souples, évolutifs. Telle est précisément notre intention.

Mme Dini a fait part de plusieurs propositions du groupe de l'UC-UDF pour lesquelles je tiens d'ores et déjà à la remercier.

En matière de regroupement familial, l'Assemblée nationale a adopté, sur l'initiative de Jean-Christophe Lagarde, un amendement permettant de moduler les conditions de ressources du demandeur en fonction de la taille de sa famille. Le président Mercier a présenté un amendement qui tend à améliorer le texte voté par l'Assemblée nationale. Le Gouvernement y est favorable.

De même, nous nous félicitons de la réflexion que le groupe de l'UC-UDF a conduite pour améliorer le dispositif de l'admission exceptionnelle au séjour, défini à l'article 24 bis du projet de loi. Le Gouvernement sera très ouvert à vos amendements n°s 116 rectifié et 119 rectifié, qui permettront aux commissions départementales du titre de séjour de jouer à nouveau un rôle utile dans l'examen de certains de ces dossiers.

Je veux dire à M. Mermaz que nous pouvons, bien sûr, avoir des désaccords sur des options politiques. Mais essayons, pour la hauteur du débat démocratique, d'éviter de nous donner des leçons. Le respect des droits de l'homme n'est heureusement pas le monopole des élus de gauche. C'est le bien commun de tous les Républicains. Le présent projet de loi a été examiné par l'assemblée générale du Conseil d'État. N'est-ce pas une garantie du respect des libertés publiques ?

Je me garderai bien en outre, contrairement à vous, de me prévaloir de déclarations faites par tel ou tel responsable étranger et sorties de leur contexte. La politique d'immigration de la France, c'est au Parlement français qu'elle se définit ! Nous dialoguons avec des responsables de pays étrangers, mais chacun doit rester à sa place. C'est au Parlement de la France et à lui seul qu'il appartient de choisir la loi de la République.

Précisément, ce projet de loi prend en compte l'impérieuse nécessité du codéveloppement avec les pays d'origine. Le Gouvernement attend sur ce sujet décisif que chacun prenne ses responsabilités. Nous organisons une vraie circulation de compétences, dans l'intérêt de notre pays et dans celui des pays d'origine.

Monsieur Karoutchi, je vous remercie d'avoir brillamment rappelé dans quel contexte historique s'est définie, au fil des décennies, la politique d'immigration.

La vérité, c'est que les gouvernements n'ont pas fait de vrais choix depuis trente ans. La vérité, c'est que ce projet de loi rompt avec des décennies pendant lesquelles le débat a été confisqué par les extrêmes : « l'immigration zéro » d'un côté, « l'immigration sans limite » de l'autre.

Oui, notre choix consiste à assumer une régulation de l'immigration en nous dotant de nouveaux outils : des objectifs quantitatifs ; des cartes de séjour accueillantes pour les actifs, les talents ; enfin, des mécanismes de codéveloppement.

Monsieur Baylet, il n'est pas interdit de présenter deux projets de loi sur l'immigration au cours d'une même législature. En 2003, des outils de lutte contre l'immigration clandestine ont été mis en place : biométrie, rétention administrative, etc. En 2006, une stratégie d'immigration choisie est définie, qui suppose un effort d'intégration et une volonté de codéveloppement.

J'ai bien noté que vous mettiez l'accent sur l'intégration, et vous avez raison de souligner l'échec de nombreux gouvernements sur cette question. Avec la signature du contrat d'accueil et d'intégration, ainsi que la délivrance de la carte de résident subordonnée à l'intégration réussie, notre projet, pour la première fois, prévoit un vrai parcours d'intégration pour les immigrés qui souhaitent s'installer durablement en France.

Respecter les principes et les lois de la République et maîtriser la langue française, voilà les deux piliers de l'intégration.

Je dirai un mot, enfin, sur le regroupement familial. Vous nous parlez de droit européen. Parlons-en ! Notre réforme est en tout point conforme à la directive européenne de 2003.

Madame Boumediene-Thiery, je ne répondrai pas aux outrances qui vous tiennent lieu d'arguments, ni à cette longue et lassante énumération polémique. Je voudrais néanmoins corriger un point, qui me paraît particulièrement scandaleux. Je refuse, en tant que membre d'un gouvernement républicain, de vous laisser accuser d'arbitraire l'action des préfets et de l'administration ! Nous vivons dans un État de droit. Les fonctionnaires qui le servent sont trop attachés aux valeurs de notre République pour accepter d'être calomniés ! Je vous demande de les respecter !

Madame Khiari, vous nous avez rappelé que vous étiez une enfant d'immigré. Nous sommes un certain nombre, dans cet hémicycle, à être dans ce cas. Personnellement, je le dis avec émotion, je suis fils et petit-fils d'immigrés italiens.

Mon grand-père, arrivé à Nice au début du siècle dernier, aura attendu presque trente ans avant de pouvoir obtenir la nationalité française pour lui-même et ses enfants devant le syndic de Nice-Ouest et le préfet des Alpes-Maritimes. Il a dû démontrer qu'il était capable, par le fruit de son labeur, d'apporter sa contribution à la création de richesse et d'emplois, ainsi qu'à la cohésion sociale de notre pays. Il a également dû prouver que ses enfants avaient appris à l'école de la République à lire, écrire et parler le français correctement.

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