Intervention de Guy Fischer

Réunion du 12 février 2007 à 15h00
Protection de l'enfance — Article 1er

Photo de Guy FischerGuy Fischer :

Passée inaperçue lors de son adoption à l'Assemblée nationale, l'introduction d'un « examen systématique psychosocial » - j'insiste sur le terme « psychosocial » - pour toutes les femmes dans leur quatrième mois de grossesse ne laisse pas d'inquiéter.

Une telle rédaction change profondément le sens de l'entretien prénatal précoce prévu par la circulaire relative à la promotion de la collaboration médico-psychologique en périnatalité du 4 juillet 2005.

L'entretien prénatal, réalisé sous la responsabilité d'une sage-femme, se situe en effet dans une logique de prévention des troubles de la relation entre parents et enfant et a pour objectif « d'ouvrir le dialogue [et] de recueillir les facteurs de vulnérabilité ». Il vise à « accrocher la confiance et/ou maintenir la confiance dans le système, afin que les parents puissent mettre au monde l'enfant dans les meilleures conditions de sécurité émotionnelle et qu'ils puissent faire appel ultérieurement si besoin ».

Instituer un entretien psychosocial systématique revient à sortir de cette logique d'accompagnement des parents, fondée sur la confiance, pour entrer dans celle du dépistage de troubles futurs de la parentalité, avec les effets pervers inhérents à ce type d'approche. Je me permettrai de citer le récent avis du Comité consultatif national d'éthique sur le dépistage précoce des troubles du comportement qui mettait en garde contre « le danger d'émettre une prophétie autoréalisatrice, c'est-à-dire de faire advenir ce que l'on a prédit du seul fait qu'on l'a prédit. » Il ne s'agit plus ici d'une démarche de soutien qui permet, à partir des difficultés sociales évoquées par les parents, de déceler un besoin de prise en charge ou de précautions particulières. On part au contraire du postulat qu'existe un lien entre difficultés sociales et souffrance psychique pour « fliquer » les familles les plus défavorisées.

Cette dérive est accentuée par le caractère systématique donné à l'entretien, qui en fait une démarche subie et non choisie, contraire à l'esprit de confiance et de respect des personnes qui inspirait la circulaire précitée.

En outre, faute de moyens suffisants, l'examen psychosocial ne pourra pas être mis en place ou le sera de manière formelle. On peut dès lors craindre qu'il soit réservé effectivement aux catégories sociales ou aux familles déjà suivies par les services sociaux, ce qui en fera, au mieux, une mesure inutile, au pire, un instrument de stigmatisation supplémentaire. Le dépistage précoce des troubles de comportements qu'on avait cru enfin enterré ressusciterait-il de ses cendres ?

Le présent amendement tend à revenir à la philosophie actuelle de l'examen prénatal, qui permet de combiner les approches médicale et psychologique, également indispensables. Par rapport au régime actuel, il précise seulement que cet examen est désormais « proposé systématiquement », afin qu'il puisse bénéficier à toutes les personnes qui en ont besoin.

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