Je pense en particulier au droit à l'eau, mais il en est d'autres. À plusieurs reprises, on nous a parlé de ralliement ; pour ma part, je préfère parler d'habileté.
Le rôle du service public, garant de l'intérêt collectif, a été réduit au profit d'une ouverture à la concurrence dans plusieurs domaines, comme l'assainissement non collectif, les SATESE ou les laboratoires. Je ne suis pas sûre que le service de l'eau y gagnera en efficacité.
Les collectivités voient leurs responsabilités accrues. Ainsi l'article 28 permet-il aux départements de lever un nouvel impôt. Cette disposition a été adoptée à l'unanimité, et - habileté encore -, cet article a été mis aux voix par scrutin public. Nous l'avons voté pour répondre à la demande de nombreux conseils généraux, y compris ceux de gauche, relayée par l'ADF, l'Assemblée des départements de France. Certes, cela permettra aux conseils généraux d'aider les petites communes et de faire vivre la solidarité au sein des départements, mais ce faisant, ils suppléeront l'État, qui se désengage de plus en plus de ses responsabilités en ce domaine.
J'ai eu l'occasion de le souligner, la pression de certains intérêts a pesé sur nos débats. Qu'il s'agisse des producteurs d'hydroélectricité indépendants, largement favorisés par un allégement de contraintes que je considère comme peu compatibles avec les objectifs généraux du texte, ou bien qu'il s'agisse de certains milieux agricoles, dont nombre d'amendements ont porté les propositions, notamment sur le volet de la fiscalité écologique, cette pression a largement contribué à « polluer » le texte, si vous m'autorisez cette expression.
Les arguments les plus discutables ont ainsi été avancés pour légitimer le statu quo - en témoigne encore l'une des dernières propositions que nous avons examinée et qui, heureusement, n'a pas été adoptée -, et ne pas appliquer, dans les faits, les principes constitutionnels relatifs à la protection de l'environnement, que nous avons inscrits à la demande pressante du Président de la République.
Il est étrange de constater comme les préoccupations environnementales s'effacent, dans l'esprit de certains, devant des considérations économiques.
La pression fiscale que créera ce texte pourra-t-elle vraiment être tenue pour responsable des difficultés des agriculteurs - par exemple les éleveurs de porcs -, alors qu'ils subissent surtout la pression constante des grandes centrales d'achat ? Ce n'est pas sérieux !
Notre intérêt aurait été de conférer à ce texte, à la faveur de cette deuxième lecture, une inflexion, sinon une orientation générale, plus conforme aux enjeux de l'environnement, de cadre de vie, de santé publique, qui mobilisent aujourd'hui nos concitoyens. Cela n'a pas été fait, de mon point de vue : je ne crois pas que nous ayons pris la mesure des problèmes qui se poseront dans l'avenir.
Parce que cette loi n'est pas suffisamment volontariste, parce qu'elle continue de prendre en compte des intérêts particuliers au détriment de la volonté générale, parce qu'elle ne nous dote pas des outils répondant aux enjeux posés par la problématique de l'eau dans son ensemble, le groupe CRC votera contre ce texte.