Intervention de Bernard Fournier

Réunion du 16 janvier 2008 à 15h00
Opérations spatiales — Adoption d'un projet de loi

Photo de Bernard FournierBernard Fournier :

Monsieur le président, madame le ministre, mes chers collègues, le projet de loi relatif aux opérations spatiales nous fait prendre la mesure, aujourd'hui, de l'importance et des enjeux liés à l'espace, dont les implications sont considérables sur les plans tant civil que militaire.

En dehors des grandes explorations planétaires qui marquent les esprits, les préoccupations plus générales de la société liées aux questions environnementales, en particulier, au réchauffement planétaire, relancent d'une certaine façon l'intérêt du grand public pour les spécialistes de l'espace. Celui-ci est désormais présent dans la vie quotidienne ; il touche tous les citoyens et doit, par conséquent, les mobiliser.

C'est la raison pour laquelle il faut que la France se dote aujourd'hui d'une législation spécifiquement dédiée aux opérations spatiales.

Si, dès les débuts de la conquête spatiale, les pouvoirs publics ont pris la mesure de l'enjeu stratégique que représentait la maîtrise de l'espace, ainsi que de l'intérêt commercial qui pouvait y être lié, la France ne possédait pas de véritable loi spatiale nationale. Aujourd'hui, les résultats de l'effort consenti par la France, depuis cette époque, en faveur des opérations spatiales, que ce soit dans un cadre national ou au sein de l'Agence spatiale européenne, sont tellement évidents que notre pays est devenu une puissance spatiale de niveau mondial.

En effet, à travers le Centre national d'études spatiales, la France a joué un rôle de premier plan dans le développement des lanceurs Ariane, qui ont réussi, dans un environnement commercial très concurrentiel, à faire reconnaître leur fiabilité et leurs qualités techniques. Les lanceurs sont la pierre de base, le fondement de toute politique spatiale ; ils nous ont permis d'être autonomes.

Je le répète, la France est devenue une grande puissance spatiale, puisqu'elle occupe la première place en Europe et la troisième à l'échelle mondiale, derrière les États-Unis et la Russie.

Jusqu'à présent, les opérations spatiales ont essentiellement été conduites par l'Etat, notamment par l'intermédiaire du Centre national d'études spatiales.

Le besoin d'un cadre juridique national, spécifique aux opérations spatiales, c'est-à-dire aux activités ayant pour objet de lancer et de guider, dans l'espace extra-atmosphérique, des objets qui permettront ensuite d'offrir au consommateur final un certain nombre de services, ne s'était donc pas vraiment fait sentir. L'État exerçait un contrôle de fait sur l'ensemble des activités spatiales développées sur son territoire ou avec son concours.

Cependant, cette configuration est aujourd'hui révolue, et il est désormais temps que la France possède, en matière spatiale, sa propre législation, digne de son rang de puissance spatiale mondiale.

L'explosion du marché des télécommunications et de la télévision par satellite ainsi que le formidable succès des lanceurs Ariane ont fait augmenter considérablement la demande sur le marché des opérations spatiales. L'État doit désormais compter avec des partenaires qui remettent en cause la place qu'il occupait jusqu'à présent. En outre, il devrait connaître prochainement de nouvelles expositions aux risques juridiques liés aux activités spatiales, du fait de la politique d'ouverture du centre de Kourou à des lanceurs originaires de nouveaux pays.

Ainsi, à partir du premier semestre 2009, le centre spatial guyanais devrait voir décoller des fusées russes de type Soyouz et des lanceurs italiens de type Vega, ce qui rend d'autant plus nécessaire la mise en place d'un cadre national applicable à l'ensemble des situations.

L'espace représente à l'évidence un objectif stratégique pour la France ; il est à la fois un outil de développement économique et une composante essentielle de l'autonomie de décision et d'action de notre pays.

L'intensification des opérations spatiales, tant nationales qu'internationales, et la multiplication des opérateurs dans ce domaine ont donc conduit le Gouvernement, dès 2004, à demander au Conseil d'État une étude sur le cadre juridique des opérations spatiales ; le projet de loi qui est présenté aujourd'hui par Mme le ministre de l'enseignement supérieur et de la recherche s'inspire directement des conclusions du rapport élaboré par cette institution en 2006.

En application du droit international, la France se trouve in fine financièrement responsable pour tous les dommages causés par les objets spatiaux lancés depuis son territoire ou par des opérateurs français, y compris lorsque ces objets sont envoyés dans l'espace depuis l'étranger.

Dans ce nouveau contexte d'exploitation commerciale accrue de l'espace, la France doit pouvoir honorer ses engagements internationaux en se dotant aujourd'hui, à l'instar des États-Unis, de la Russie ou de l'Allemagne, d'une législation dédiée aux opérations spatiales.

En visant un double objectif - mettre le droit interne en conformité avec le droit international et offrir un cadre juridique contribuant à la compétitivité globale de nos activités spatiales -, le projet de loi relatif aux opérations spatiales tend essentiellement à instaurer un régime d'autorisation permettant aux autorités françaises d'assurer un contrôle effectif sur les activités spatiales, et ce dans les différentes hypothèses susceptibles d'engager la responsabilité de l'Etat.

En contrepartie, le texte prévoit l'octroi d'une garantie financière de l'Etat au-delà d'un plafond des sommes dues par les opérateurs, au titre de la réparation des dommages causés par leurs activités.

Parallèlement à ce nouveau système d'autorisation et de garantie, sur lequel repose son équilibre global, le présent projet de loi vise à consolider, voire à créer, un cadre juridique sur des points plus spécifiques, tels que la gouvernance du centre spatial guyanais, les règles de la propriété intellectuelle applicables aux activités réalisées dans l'espace extra-atmosphérique, ou encore l'encadrement juridique de l'utilisation des données d'origine spatiale, notamment au regard des exigences de la sécurité nationale.

Enfin, je tiens à rendre hommage à notre excellent collègue Henri Revol, rapporteur de ce projet de loi au nom de la commission des affaires économiques, et à l'important travail qu'il a accompli, avec la très grande compétence que nous lui connaissons tous, ...

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