Par cet amendement, mon groupe entend soumettre l'installation des médecins à l'autorisation des agences régionales de santé, notamment dans le cas des zones sur-densifiées et pour certaines spécialités médicales, afin d'éviter que certaines zones ne soient sursaturées, alors que d'autres manquent cruellement de médecins.
Je sais bien sûr quel sort M. le rapporteur et Mme la ministre réservent à cet amendement. Mon groupe entend néanmoins signaler le problème. Il serait regrettable que les questions qui se posent ne soient pas abordées au cours de notre débat en séance publique.
D’après une étude menée par l’INSEE, la France comptait, au 1er janvier 2007, 101 549 généralistes et 106 642 spécialistes, soit un total de 208 191 médecins. Ce chiffre apparemment élevé pourrait inciter à penser que l’offre de soins est très largement suffisante dans notre pays ; il s’agit effectivement de l’offre la plus dense de l’Union européenne. Or, comme nos débats l’ont montré, la réalité est tout autre, certaines zones géographiques étant entièrement désertées, du moins du point de vue médical.
Ce nombre important de professionnels de santé est en effet à minorer car, en réalité, il s’agit, pour un grand nombre d’entre eux, de médecins âgés. Il s’explique par l’importante formation de professionnels qui eut lieu jusque dans les années soixante-dix, avant l’instauration du numerus clausus.
Intitulée « La démographie médicale à l’horizon 2030 : de nouvelles projections nationales et régionales », une étude de février 2009 de la direction de la recherche, des études, de l’évaluation et des statistiques du ministère de la santé, prévoit que le nombre de professionnels devrait diminuer de 10 % dans les dix ans à venir. Fondé sur des données connues, ce constat est partagé et clairement établi.
Certes, les gouvernements successifs, y compris le vôtre, madame la ministre, ont entamé une politique souhaitable mais peut-être insuffisante de rehaussement du numerus clausus ; nous en avons parlé. Cette politique est insuffisante, d’une part, parce que rien ne garantit que les médecins formés s’installeront dans des zones qui en ont besoin, d’autre part, parce qu’il faut entre huit et dix ans pour former des professionnels de santé.
Face à ces données statistiques, la question suivante se pose : quelles mesures prendre pour endiguer les déserts médicaux ?
Depuis des années, la tendance est aux mesures incitatives. Ce texte va dans ce sens, puisque, après débat en commission, les contrats de solidarité sont devenus non plus obligatoires mais volontaires. Pour les gouvernements successifs, il n’a jamais été question de contraindre les médecins à s’installer dans les zones qui en ont pourtant besoin. Les manifestations des professionnels de santé se sont révélées payantes ; ils ont été entendus.
Que les besoins en santé ne soient pas satisfaits n’est pas l’enjeu du débat. Ce qui compte, c’est de garantir la liberté d’installation des médecins…
Est-ce à croire que ces derniers seraient spécialement sensibles aux mesures incitatives ? Nous en doutons, et ce d’autant plus que, d’après un sondage effectué en 2007 par l’ordre des médecins et l’institut BVA, 63 % des étudiants et 60 % des jeunes médecins n’envisagent pas de s’installer en zone rurale, et ce en raison de la forte disponibilité requise et de l’isolement de ces zones. En outre, pratique médicale et modes de vie ont radicalement changé, si bien que les jeunes générations aspirent à mener une tout autre vie que celle des anciens généralistes comme François Autain. Nous le savons fort bien.