Vous pourrez, monsieur le ministre, nous apporter des explications. Pour ma part, je me fonde sur les informations disponibles !
J’en viens à présent à la question de la rétention administrative et de ses conditions.
Deux rapports ont été récemment rendus sur ce sujet, celui du commissaire des droits de l’homme du Conseil de l’Europe, qui faisait d’ailleurs suite à un premier rapport d’un précédent commissaire aux droits de l’homme, et celui du Contrôleur général des lieux de privation de liberté. Tous deux rappellent les mauvaises conditions matérielles qui prévalent dans les centres de rétention ainsi que les difficultés que rencontrent les personnes qui y sont placées pour être informées des moyens dont elles pourraient disposer pour assurer leur « défense », si j’ose dire.
Le projet de budget pour 2009 augure mal des suites qui seront données à ces rapports. Les étrangers enfermés seront plus nombreux, et les crédits alloués au fonctionnement des centres de rétention augmenteront de 4 % ; au total, 2 000 places devraient être disponibles en 2009, contre 773 en 2003. Voilà de l’augmentation ! Voilà du chiffre !
Je voudrais évoquer un autre aspect de ce même sujet : l’assistance juridique accordée aux étrangers placés en rétention administrative, question qui a un peu occupé les gazettes.
Cette très difficile mission, on le sait, est remplie depuis de nombreuses années par le Service œcuménique d’entraide, plus connu sous le nom de CIMADE. En effet, lorsque, au moment de la création des centres de rétention administrative, le ministre alors en fonctions avait lancé un appel aux associations, ce fut la seule organisation qui accepta de s’en charger, sans doute parce que, depuis la fin de la guerre, elle assumait une fonction similaire et avait donc une expérience en la matière.
Le remarquable travail qu’elle effectue est aujourd’hui menacé parce que, sous prétexte de mettre fin à sa position de monopole, vous avez tenté, monsieur le ministre, de réduire sa place dans les centres de rétention. Vous avez ainsi prétendu que la CIMADE refusait de travailler avec d’autres organisations, ce qui, à ma connaissance, est faux : depuis deux ans, la CIMADE travaille en partenariat avec au moins deux associations, dont le Secours catholique – protestants d’un côté, catholiques de l’autre : on ne peut pas être plus œcuménique ! –, et souhaite étendre ce travail collectif à d’autres associations, à des syndicats, à des avocats…
Monsieur le ministre, l’appel d’offres que vous avez lancé a été annulé par le tribunal administratif de Paris, et le contrat de la CIMADE s’arrête à la fin de l’année. Vous avez affirmé, lors de votre audition par la commission des lois, que vous envisagiez de prolonger le contrat de la CIMADE. Il me semble qu’il serait souhaitable de ne plus travailler dans le cadre d’un marché public et de mettre en place une délégation de service public.
Enfin, vous projetez de créer un nouvel opérateur unique qui serait responsable de l’intégration des primo-arrivants et s’appellerait « office français de l’immigration et de l’intégration », ou OFII. Voilà bien un grand jeu français : créer des organismes au fur et à mesure que l’on avance ! Cet office serait issu de la fusion de deux établissements publics, l’ANAEM et l’ACSé. En tirera-t-il une plus grande efficacité ? Peut-être ! Quoi qu’il en soit, monsieur le ministre, j’aimerais obtenir des précisions sur le rôle que vous envisagez de lui confier et sur la politique qu’il sera chargé de mener.
Je me réjouis au passage de constater la suppression, à cette occasion, de la taxe de 45 euros qui était perçue en faveur de l’ANAEM lors de la demande de validation d’une attestation d’accueil.
En revanche, et contrairement au rapporteur pour avis de la commission des affaires étrangères, je ne pense pas que ce soit une bonne idée de réduire de 1, 5 million d’euros les crédits de l’ANAEM., car je considère que la formation professionnelle des Français de l’étranger fait partie des tâches de l’ANAEM. Même si cet aspect ne relève pas de votre département, monsieur le ministre, je voudrais souligner à quel point il est important de donner aux Français de l’étranger une formation professionnelle sur place ; on peut ainsi éviter qu’ils ne soient placés dans des situations difficiles qui nous obligent ensuite à les ramener en France.
Les Français expatriés ont déjà beaucoup souffert, les crédits ont déjà été réduits de plus de moitié : supprimer encore 1, 5 million d’euros que l’ANAEM aurait consacré à la formation professionnelle n’est pas judicieux.
Pour conclure, monsieur le ministre, je vous ferai part de mon inquiétude et de celle de nombreux citoyens devant la suppression de la sous-direction de l’accès à la nationalité.
Le transfert aux préfectures de la charge des naturalisations entraînera un allongement des délais de traitement et une rupture d’égalité entre les demandeurs. En effet, les décisions risquent de varier, si bien que les personnes souhaitant accéder à la nationalité française feront le tour de France des préfectures, de Rodez à Charleville-Mézières, à la recherche des plus libérales. Ce n’est certainement pas une bonne chose : les décisions doivent être marquées d’une certaine homogénéité.
En outre, cette réforme ne sera pas pertinente, car la mission effectuée par les services préfectoraux ne peut pas être comparable, en qualité, au travail d’instruction qui est assuré par les agents de la sous-direction de l’accès à la nationalité. Je pense donc qu’il serait de bonne politique de maintenir cette sous-direction.