Intervention de François Zocchetto

Réunion du 10 juin 2008 à 16h15
Fonctionnement des assemblées parlementaires — Adoption d'une proposition de loi

Photo de François ZocchettoFrançois Zocchetto :

Madame la présidente, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, la proposition de loi que nous sommes appelés à examiner vise à combler ce qui, du fait de la pratique judiciaire, est devenu un vide juridique.

Issu de l’Assemblée nationale, ce texte répond, comme cela a déjà été souligné à plusieurs reprises à cette tribune, à une offensive judiciaire menée par les mouvements sectaires : ceux-ci ont en effet entamé un bras de fer judiciaire en déposant un grand nombre de plaintes en diffamation contre les personnes qui étaient venues témoigner.

Dans la mesure où ces personnes sont contraintes de prêter serment et où, en même temps, elles ne peuvent bien évidemment bénéficier ni de l’immunité parlementaire ni de celle qui protège les parties à un procès, elles se trouvaient placées dans une situation d’insécurité juridique très délicate pour elles-mêmes et préjudiciable à la bonne marche des commissions d’enquête.

Il faut donc saluer l’initiative parlementaire, relayée par notre rapporteur, M. René Garrec, qui permet de pallier cette absence de protection des témoins.

Comme vient de le rappeler Mme Troendle, il faut souligner que l’immunité dont bénéficient les témoins grâce ce nouveau texte n’est qu’une immunité relative. En effet, les témoins sont protégés pour des infractions bien définies : la diffamation, l’injure et l’outrage. L’immunité ne jouera pas si les propos tenus ne correspondent pas à l’objet de l’enquête. De même, les faux témoignages ou la subornation de témoins resteront pénalement répressibles. C’était une préoccupation de la commission, qui en a longuement discuté.

Ainsi, nous faisons le choix d’une protection juridique encadrée, ce qui constitue un aspect important de la proposition de loi.

Le texte est novateur et apporte une protection utile et nécessaire pour la liberté des témoignages. Je pense qu’il aurait été difficile d’aller plus loin et d’accepter une immunité absolue : nous aurions alors créé un déséquilibre entre les droits des témoins et les droits des tiers, ce qui n’aurait pas été satisfaisant.

Le double objectif du texte est ainsi respecté : à la fois protéger les témoins qui déposent sous serment et concilier les droits des tiers, ainsi que ceux des commissions à recueillir les éléments nécessaires à leur mission.

Il est évidemment très important, cela a déjà été indiqué, que les personnes entendues sous serment par les commissions parlementaires puissent s’exprimer sans crainte, a fortiori lorsqu’il s’agit de commissions d’enquête dont la mission touche à des sujets sensibles liés aux libertés individuelles. La question des sectes est un exemple parfait, sachant que leurs membres peuvent être sous une emprise morale et psychologique extrêmement forte.

Il faut évidemment permettre à ces personnes de témoigner librement, pour leur droit, mais aussi pour la bonne conduite des commissions d’enquête.

Cette liberté de témoignage permet en effet aux commissions d’enquête d’accomplir pleinement leur mission, car nous savons bien que leur objectif est de faire la lumière sur un sujet précis. En leur offrant les meilleures conditions de fonctionnement, on leur donne les moyens de remplir au mieux leur tâche. Or ce pouvoir d’enquête est très important à nos yeux : il fait partie des prérogatives parlementaires qu’il faut encourager et qui participent de la revalorisation du Parlement.

Vous l’aurez compris, l’ensemble du groupe Union centriste-UDF soutiendra donc cette proposition de loi.

Je voudrais ajouter que, à titre personnel, je partage le souci du président de la commission des lois, Jean-Jacques Hyest, qui a souligné que, dans ce cadre, les présidents des commissions d’enquête devraient veiller à « assurer la modération et la sérénité des auditions, propres à respecter les divers intérêts en présence ». Avec ce texte, on voit bien le rôle déterminant du président de la commission d’enquête dans la conduite des débats. Il y va de l’équilibre et du respect des droits de chacun.

Enfin, je me permets de signaler à notre collègue M. Collombat que son amendement ne me paraît pas nécessaire.

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