Madame la présidente, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, nous sommes appelés aujourd’hui à nous prononcer, en deuxième lecture, sur la proposition de loi visant à encadrer la profession d’agent sportif déposée en 2008 par notre collègue Jean-François Humbert. Je dois avouer ma satisfaction de constater que l’Assemblée nationale ne l’a modifiée que très marginalement.
Le sport professionnel a besoin d’un tel texte, et force est de constater, une fois encore, que le Sénat, notamment notre commission, est à l’avant-garde en matière de moralisation du sport. Nous ne pouvons que nous en féliciter.
Je remarque à cet égard que le Gouvernement a choisi d’inscrire cette proposition de loi à l’ordre du jour dans le cadre des semaines qui lui sont réservées par priorité, ce qui témoigne d’un engagement fort de sa part. Je souhaite que le Sénat l’adopte aujourd'hui sans modification, ce qui permettrait de la faire entrer rapidement en application.
Rappelons à grands traits l’économie du dispositif proposé pour moraliser la profession d’agent.
Il s’agit, tout d’abord, de durcir l’accès à la profession. Les personnes morales ne pourront plus avoir de licence, ce qui devrait permettre de mieux identifier les agents qui gravitent autour des sportifs français.
Le régime des incompatibilités et des incapacités est aussi très fortement renforcé, afin d’éviter les conflits d’intérêts et les risques de collusion entre les agents et les autres acteurs du monde du sport.
Les agents de l’Union européenne auront à respecter certaines règles spécifiques, en conformité avec les dispositions sur la liberté d’établissement et la liberté d’entreprendre fixées par le droit européen.
Enfin, les agents extracommunautaires ne devront plus disposer obligatoirement d’une licence ; il leur faudra en revanche forcément conclure une convention de présentation avec un agent détenteur de la licence en France. Sur ce point, comme sur d’autres, la proposition de loi n’est pas maximaliste, elle est pragmatique.
Il convient aussi de s’appuyer sur les pratiques existantes pour prévoir un encadrement adapté, réaliste et efficace. Nous en reparlerons à l’occasion de l’examen de l’amendement présenté par M. Jean-Jacques Lozach et ses collègues sur ce sujet.
Il s’agit, ensuite, de rendre plus transparent l’exercice de la profession. Il a été fait le choix, contesté par certains mais nécessaire à mes yeux, d’autoriser les clubs à payer les agents. C’est aujourd’hui interdit et cela pousse les clubs et les joueurs à faire comme si les agents n’existaient pas et à les rémunérer de manière officieuse, d’où le développement des circuits d’argent sale.
La réglementation actuelle est en fait vicieuse, absurde et sans fondement : il n’y a pas de logique de fond à s’opposer à ce que le club paie directement l’agent plutôt qu’il ne le paie indirectement via le salaire des joueurs. C’est ce qui se passe naturellement pour les agents immobiliers et pour les agents d’artistes sans que quiconque le conteste.
Parallèlement, l’ensemble des contrats, notamment ceux qui sont passés avec les agents, sera transmis aux fédérations pour améliorer la transparence du système.
Je suis satisfait à cet égard que l’Assemblée nationale ait imposé que les contrats passés entre les agents et les sportifs mineurs, qui ne peuvent, quant à eux, donner lieu à rémunération, soient également transmis à la fédération concernée.
Il s’agit, enfin, d’aggraver les sanctions, notamment financières, prises à l’encontre des agents exerçant dans l’illégalité.
L’Assemblée nationale a souhaité que les sanctions décidées par les fédérations dans l’exercice de leur pouvoir de contrôle soient publiées. Cet effort de transparence est à la fois louable et utile. On ne viendra en effet à bout du problème que si l’ensemble des acteurs du sport sont concernés.
Aujourd’hui, plus encore qu’en 2008, l’adoption de cette proposition de loi est nécessaire. En novembre 2009, une étude réalisée par la Commission européenne sur les agents sportifs dans l’Union européenne indique en effet que le seul moyen pour la Commission d’intervenir sur ce sujet est la voie des recommandations. Je ne doute pas que les éventuelles propositions qu’elle fera iront dans le sens du projet d’encadrement qui nous est soumis aujourd’hui. En attendant, la France doit avancer en la matière.
Alors qu’il n’y a jamais eu autant d’argent dans le sport et que les transferts se multiplient pour des sommes faramineuses, le Parlement devait se saisir de cette question.
Un point semblait cependant achopper entre les deux assemblées : les députés ont souhaité autoriser les avocats à devenir agents de joueurs, ce que nous avions formellement interdit. Il faut savoir que les avocats souhaitent pouvoir devenir agents sans même disposer de licence, ce que permet l’actuel règlement de la FIFA.
À mon sens, le choix de l’Assemblée nationale est finalement assez équilibré et le maintien d’une licence d’agent pour tout le monde est la garantie que le régime spécifique applicable aux agents sera pleinement respecté.
En conclusion, madame la secrétaire d'État, mes chers collègues, la commission de la culture, de l’éducation et de la communication a adopté cette proposition de loi sans la modifier.