Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, les données et le contexte de ce PLFR peuvent être qualifiés d’extraordinaires. Extraordinaires, en effet, les 138 milliards de déficit de l’État, un déficit public représentant 7, 9 % du PIB, une dette, 80 %, et une dépense publique absorbant 55 % de la richesse nationale. Extraordinaires, car qui, majorité ou opposition, aurait pu imaginer une telle situation au début de cette législature ? Extraordinaires, car certains s’interrogent aujourd’hui sur la survie même de l’euro.
La Commission européenne a engagé une procédure pour déficit excessif à l’encontre de vingt des États membres. Que nous soyons moins frappés que d’autres est une consolation bien modeste.
Monsieur le ministre, vous devez nous démontrer comment, et avec quelle croissance, nous pourrons résorber 5 points de déficit d’ici à 2013 pour parvenir aux 3 % de déficit compatibles avec les exigences de Maastricht, puis à un équilibre indispensable pour réduire la dette. Cette dette pénalise notre capacité d’investissement et, paradoxalement, rend nécessaire un emprunt qui l’augmente à son tour.
Pour ce qui est des PME, plutôt que d’emprunter pour les financer, il serait plus responsabilisant pour elles que l’État garantisse les prêts qu’elles sollicitent. Elles choisiraient en connaissance les investissements qui s’inscriraient le mieux dans leur stratégie de développement. De plus, les critères de Maastricht ne seraient pas concernés. Quelle articulation a-t-elle été prévue pour le FSI-PME ?
Il est difficile de trouver le meilleur niveau d’efficacité entre l’augmentation de la dette et le retour sur ces investissements d’avenir. Sont prévus 35 milliards d’euros pour l’économie de la connaissance et de la haute technologie dans des secteurs stratégiques, ce qui devrait entraîner 25 milliards d’euros d’investissements privés. Mais cet emprunt accentue de 12 % le déficit de 2009.
Cet emprunt est certainement indispensable. Comme le dit La Fontaine, « les vertus devraient être sœurs, ainsi que les vices sont frères ». Remédions donc aux vices de la dette et du déficit par les vertus d’excellence, de recherche, d’innovation, d’efficacité, maîtres mots du grand emprunt et du commissaire général à l’investissement, René Ricol.
En s’entourant des meilleurs et en s’adjoignant les conseils de personnalités étrangères, il veut s’assurer, entre autres, de la pertinence de nos projets à l’international, de l’exploitation des brevets et de la création d’emplois et de richesse que ceux-ci génèrent en France. Je rappelle, en effet, que, au-delà du quadruplement de leurs dépôts, nombre de brevets sont rachetés et exploités par des groupes étrangers.
L’accumulation, au fil des gouvernements, de faiblesses coupables est responsable de notre situation budgétaire actuelle, hors crise mondiale.
Nous avons été nombreux, président et rapporteur général de la commission des finances en tête, à exprimer depuis des années des inquiétudes devant l’incapacité à présenter des budgets où les dépenses se stabiliseraient en euros constants puis en euros courants.
Monsieur le ministre, vous avez justement déclaré que « quand on observe un écart aussi important entre les recettes et les dépenses alors même que les recettes publiques sont parmi les plus élevées du monde, c’est bien que le problème se situe du côté des dépenses. »
Pour ce qui est des dépenses, nous sommes toujours rattrapés par les faits. Nous maintenons, depuis la désastreuse mise en place des 35 heures, une compensation au niveau des entreprises qui coûte, à chaque budget, 15 milliards d’euros.
Bien sûr, c’est un sujet très délicat politiquement mais, est-ce si difficile d’expliquer que la compétitivité des entreprises, et donc l’emploi, sont en jeu ? Aujourd’hui, en Grèce, des mesures drastiques touchent notamment les agents publics. Or, seuls 10 000 d’entre eux défilaient à Athènes, preuve que les Grecs ont compris quel terrible effort était nécessaire pour redresser leurs finances.
En France, les dépenses publiques représentent, chacun le sait, 55 % du PIB. Cela handicape considérablement notre capacité à investir et donc notre compétitivité. Le Conseil d’analyse économique affirme que l’attractivité de la France a été surestimée, car le montant des investissements français à l’étranger est quatorze fois, et non deux fois, supérieur aux investissements étrangers en France en 2008. Il faut donc poursuivre la révision générale des politiques publiques.
Pour ce qui est des recettes, nous ne pourrons échapper à une augmentation des prélèvements nécessitant l’effort de tous. Le bouclier fiscal est un compromis pour ne pas supprimer l’impôt sur la fortune, que l’on sait très négatif pour l’investissement. Certes, il s’appuie sur un bon principe - ne pas payer plus d’un euro sur deux-, mais les augmentations d’impôts épargnent les plus gros revenus, et ce n’est pas juste.
Pourquoi n’acceptez-vous pas le fameux triptyque suppression de l’ISF, suppression du bouclier fiscal et création d’une cinquième tranche ?