Afin de prévenir tout conflit d’intérêts et de réduire autant que possible la pratique des rétrocommissions, il nous semble indispensable de maintenir l’obligation du paiement de l’agent par le sportif. La question du double mandatement est, en effet, au cœur de la proposition de loi aujourd’hui soumise à notre examen. Comme je l’ai rappelé lors de la discussion générale, on va légaliser l’illégalité, ce qui s’apparente tout de même à une sorte d’aveu d’impuissance de la puissance publique. Jusqu’à présent, on a laissé faire. Ainsi, la quasi-totalité des agents sont rémunérés par les clubs et non pas par leur cocontractant. Non seulement on ferme les yeux mais, aujourd’hui, on veut normaliser une situation frauduleuse. En d’autres termes, on plie devant la réalité au lieu de la réformer !
Cette situation, disons-le, risque de faire émerger l’idée d’une justice à deux vitesses, ce que nous ne pouvons cautionner. Sans rappeler les rémunérations exorbitantes des joueurs concernés, qui bénéficient de ce système marchand, je précise que le dispositif préconisé est de nature à conforter le sentiment d’impunité chez certains sportifs.
Or, contrairement à ce que l’on peut lire ici ou là, la pratique du double mandatement ne fait pas consensus.
À titre d’exemple, l’UEFA est contre. Son président, que je cite de nouveau, a ainsi déclaré : « Si le club verse une commission élevée à l’agent, c’est souvent parce qu’elle permet de dissimuler une rétrocommission. Il n’y a qu’une seule solution : que les joueurs paient leurs agents, et qu’il soit interdit aux clubs de le faire. Cela règlera le problème. Car les joueurs ne paieront que jusqu’à un certain point ».
Je pourrais également rappeler la position du syndicat des joueurs professionnels de football, et notamment de son président Philippe Piat, ou certaines interventions de Sepp Blatter, le président de la FIFA. Quant aux syndicats des agents sportifs eux-mêmes, ils sont très largement partagés sur ce point.
Aussi nous appartient-il, à nous législateurs, d’arbitrer : ce texte de loi devrait imposer la rémunération de l’agent par le sportif, et exclusivement par lui.