Intervention de Alima Boumediene-Thiery

Réunion du 5 juillet 2007 à 21h45
Récidive des majeurs et des mineurs — Article 7

Photo de Alima Boumediene-ThieryAlima Boumediene-Thiery :

Cet article vise à étendre l'obligation de l'injonction de soins à la procédure de surveillance judiciaire instituée par la loi du 12 décembre 2005.

Dès leur libération, les personnes considérées comme dangereuses devront se soumettre à une injonction de soins.

Dans cette distribution généralisée de l'injonction de soins, intervenant autant dans le cadre de la surveillance judiciaire que dans le cadre d'un sursis avec mise à l'épreuve ou du suivi socio-judiciaire, il est évident que la question des moyens se pose.

Vous justifiez cette généralisation en invoquant la nécessité de lutter efficacement contre la récidive. Avec quels moyens comptez-vous réaliser une telle généralisation ?

Comment convaincrez-vous les médecins coordonnateurs d'oeuvrer pour cette généralisation, alors qu'un suivi complet par individu leur rapporte seulement 426 euros à l'année ?

Vous n'êtes pas sans savoir que les juridictions ont de grandes difficultés à recruter ces médecins chargés de faire l'interface entre le juge d'application des peines et le médecin traitant. Comme l'a dit M. Badinter, il n'existe que 90 médecins coordonnateurs et plus de la moitié des tribunaux de grande instance ne disposent pas d'un tel médecin.

Les effectifs actuels de médecins et de psychiatres ne sont déjà pas suffisants : comment comptez-vous faire face à l'accroissement des injonctions qui vont découler, fatalement, de l'application de cette loi ? Obligerez-vous les médecins à prendre en charge un détenu libéré ?

Si l'objet de ce projet de loi est de permettre un meilleur suivi du délinquant à sa sortie de prison et de lutter contre la récidive, vous devez, madame la ministre, vous donner les moyens de cette politique.

Vous nous dites que vous allez lancer, l'an prochain, un grand plan de recrutement de médecins coordonnateurs, mais vous n'évaluez pas les conséquences pratiques, notamment en termes de coût, des dispositions que vous proposez.

Comment est-il possible d'évaluer toutes les conséquences des dispositions relatives à l'injonction de soins quand celles-ci ont été déposées, à la hâte, le 27 juin au Sénat pour un débat en séance publique le 5 juillet ?

Comment est-il possible d'évaluer la faisabilité d'un tel projet sans avoir, au préalable, rencontré les principaux intervenants - médecins, psychiatres, infirmiers - qui oeuvrent dans ce domaine ?

Comment est-il possible d'élargir à ce point le champ de l'injonction de soins, sans avoir auparavant dressé un bilan pour évaluer l'efficacité et le coût de l'injonction de soins déjà mise en place par la loi du 12 décembre 2005 ?

Comment pouvez-vous valablement étendre l'application d'un système qui fonctionne mal, faute de moyens et de personnel, et vouloir le généraliser ?

Le temps, la concertation, la maturité et des moyens importants auraient pu rendre ce texte applicable et acceptable. Toutefois, en l'état, sa mise en oeuvre est impossible.

C'est la raison pour laquelle nous avons déposé un amendement visant à supprimer cet article

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