Intervention de Claire-Lise Campion

Réunion du 14 novembre 2005 à 15h00
Financement de la sécurité sociale pour 2006 — Discussion d'un projet de loi

Photo de Claire-Lise CampionClaire-Lise Campion :

En ce qui concerne maintenant les engagements, je relèverai que l'article 54 du présent projet de loi remet en cause une mesure inscrite dans la loi de financement de la sécurité sociale pour 2004. Les parents des enfants nés avant le 1er janvier 2004 seront donc privés de la PAJE, dont ils auraient dû bénéficier à compter de 2007.

Cette disposition permettra une économie substantielle de 430 millions d'euros sur trois ans, qui viendra indirectement financer le complément optionnel de libre choix d'activité et les aménagements de l'allocation de présence parentale présentés dans le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2006.

Certes, les familles concernées continueront de percevoir l'AFEAMA, l'aide à la famille pour l'emploi d'une assistante maternelle agréée, et l'AGED, l'allocation de garde d'enfant à domicile, mais le principe est pour le moins choquant. Est-ce ainsi que vous entendez redonner aux Français confiance en leurs responsables politiques ?

À la lecture des cinq articles consacrés à la politique familiale, j'ai vraiment eu le sentiment, monsieur le ministre délégué, que l'on déshabillait Pierre pour habiller Paul.

Alors que les familles attendent des avancées en matière de modes de garde hors du domicile familial, vous annoncez un plan « crèches » limité à 15 000 places et lancez un complément optionnel du libre choix d'activité, d'une durée d'un an, pour les familles accueillant leur troisième enfant.

Si ce complément s'adresse tant au père qu'à la mère, amélioration que nous devons à l'initiative de notre collègue députée Marie-Françoise Clergeau, que je salue ici, il ne répond pas, pour autant, aux attentes des familles qui sont à la recherche d'un emploi.

En effet, ces dernières ne peuvent accéder aux modes de garde collectifs, ce qui relance le débat sur la nécessité d'instituer un service public d'accueil des jeunes enfants. L'indemnisation est forfaitaire, et d'un montant relativement faible, à savoir 750 euros, alors que, en contrepartie de la limitation à un an de la durée de versement, le rapport d'Hubert Brin préconisait de porter ce montant à 70 % du dernier salaire, avec un plancher fixé à 700 euros et un plafond à 1 000 euros.

Ce congé optionnel ne sera pas non plus à l'origine d'un bond de la natalité dans les familles qui s'interrogent sur l'opportunité de la venue d'un troisième enfant. Pour assurer le renouvellement des générations, il eût fallu prendre des mesures quelque peu plus attrayantes et en phase avec la vie quotidienne des familles.

En effet, avec un taux de fécondité de 1, 9 enfant par femme, notre pays, s'il veut inciter les foyers à accueillir un enfant supplémentaire, notamment un troisième, doit nécessairement remettre à plat l'ensemble des mesures concernant les familles, le niveau de vie de ces dernières étant inversement corrélé au nombre d'enfants. Les foyers sont de plus confrontés à une augmentation des loyers, du prix du chauffage et des dépenses de santé. On ne peut donc se borner à instaurer une disposition unique, totalement insuffisante car d'application limitée à la seule première année du troisième enfant.

Dans le domaine du logement, vous entendez imposer à la branche famille, déjà en déficit, une augmentation de 270 millions d'euros des charges qu'elle supporte. Par ailleurs, les familles seront pénalisées par le faible relèvement, à hauteur de 1, 8 %, des aides au logement, qui n'ont pas été revalorisées depuis 2003.

J'en viens maintenant à la seconde mesure phare du projet de loi de financement de la sécurité sociale concernant la famille : la réforme du congé et de l'allocation de présence parentale.

Ce congé a été créé en 2001 sur la proposition de Ségolène Royal, alors ministre de la famille, afin de répondre aux situations dramatiques rencontrées par les parents d'enfants gravement malades ou victimes d'un accident grave. Cette mesure fut accompagnée de l'institution d'une allocation de présence parentale, accordée par la CAF.

Ce nouveau dispositif a permis de combler un vide juridique, en régularisant la situation des parents concernés, qui conservent ainsi leurs droits de salariés de leur entreprise d'origine et bénéficient d'une protection sociale.

Le montant de l'allocation a été fortement revalorisé depuis ; il est actuellement de 840 euros. Cependant, malgré les améliorations apportées, seules 4 000 familles ont demandé à bénéficier de cette mesure, alors que 13 000 familles étaient potentiellement concernées.

Il nous est proposé, au travers du PLFSS, de modifier le dispositif en prévoyant le remplacement des périodes de quatre mois par un compte-crédit de 310 jours ouvrés à prendre sur une période de trois ans, ainsi que la création d'un complément mensuel de 100 euros pour la prise en charge des frais occasionnés par une hospitalisation loin du domicile. Nous présenterons, pour notre part, des amendements tendant à améliorer encore ces dispositions.

Certes, le complément mensuel était attendu par les familles d'enfants gravement malades. Toutefois, vous avez tenu à distance les associations regroupant les parents de ces enfants et cela vous a empêché de prendre en compte un certain nombre d'éléments, ce qui aurait pourtant contribué à une nette amélioration de leur situation.

En conclusion, monsieur le ministre délégué, je pense qu'il est nécessaire d'ouvrir un débat national sur les questions concernant la famille, et de donner enfin une vision globale et cohérente de la politique familiale. Le congé de paternité, les allocations familiales, les modes de garde et d'accueil, la pauvreté, la maltraitance sont autant de sujets à inscrire dans le champ d'une discussion large, menée à l'échelon national.

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