Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, pouvons-nous encore, alors que nous avons célébré cette année le soixantième anniversaire de la sécurité sociale, affirmer que la nation garantit la protection de la santé à tous, notamment « à l'enfant, à la mère et aux vieux travailleurs » ainsi que le prévoit le onzième alinéa de la Constitution de 1946 ?
On peut raisonnablement en douter, même après avoir entendu les propos très incisifs de M. le ministre concernant l'augmentation du taux de prise en charge des soins de ville par les régimes obligatoires de base.
Je constate en effet, monsieur le ministre, que, depuis trente ans, la situation, n'a cessé de se dégrader : le taux de couverture par les régimes de base obligatoires, qui s'élevait à 90 % en 1975, n'est plus aujourd'hui que de 76 %. Cela constitue un excellent baromètre pour apprécier la vitalité d'un système de protection sociale !
Dans le même temps, dix-sept plans successifs ont vu le jour et aucun - pas plus le vôtre, monsieur le ministre, que ceux de vos prédécesseurs - n'est parvenu à restaurer durablement notre système de protection sociale dans la plénitude de ses fonctions historiques et dans le respect de ses équilibres financiers. C'est dire s'il y a lieu de s'inquiéter !
Nous sommes bien obligés de reconnaître que votre politique, contrairement à ce que vous affirmez, n'a rien résolu.
La nouveauté de votre plan, après la réforme des retraites, c'est qu'il a mis en place les outils permettant désormais la privatisation de notre système de santé. En effet, le taux d'évolution quadriennal des dépenses d'assurance maladie - que vous présentez de façon beaucoup trop laconique dans les annexes du projet de loi, monsieur le ministre, je suis d'accord sur ce point avec M. le président de la commission des affaires sociales -, est délibérément très faible afin de rendre inéluctable l'intervention du comité d'alerte créé par la loi d'août 2004, et non moins inéluctables les mesures de déremboursement que ce comité d'alerte sera amené à préconiser : je suis prêt à parier qu'il le fera dès juin 2006.