En application de l’article 15 de la loi organique du 15 avril 2009, le Gouvernement doit désormais traiter, dans les études d’impact, des diverses conditions de mise en œuvre de la loi, y compris sur le plan des moyens.
Il ne faut donc pas dire que rien n’est fait, rien n’est prévu. Ce serait une omission grave. Ces études d’impact prévoient que l’on dresse la liste prévisionnelle des textes réglementaires d’application qui conditionneront cette mise en œuvre. Il s’agit bien d’une liste, et non pas des textes eux-mêmes, ce qui, je l’ai dit, n’aurait pas de sens.
Il est certes un peu tôt pour établir le bilan complet de cette réforme, qui vient seulement d’être mise en application et ne produit ses effets que depuis le 1er septembre 2009, c'est-à-dire pour les projets de loi déposés depuis moins d’un an et demi. Toutefois, cet effort d’anticipation est manifestement la clé des derniers progrès qu’il reste à accomplir.
Je tiens à remercier la majorité d’avoir permis au Gouvernement de disposer de ce moyen, qui renforce l’information et les pouvoirs du Parlement, pour une meilleure mise en œuvre des lois.
Monsieur Gélard, je rejoins votre souhait de voir accorder plus de soin à la rédaction de ces études d’impact. Il y a certainement des progrès à faire dans ce domaine.
En revanche, je ne partage pas votre sentiment quant à la nécessité d’envisager le contenu des futurs décrets dans le cadre des études d’impact. En effet, comme je l’ai souligné, une fois le travail du Parlement accompli en matière de transformation et de construction de la loi, tous les décrets seraient à refaire. Par conséquent, à l’évidence, le Gouvernement ne saurait rédiger les décrets d’application de la loi avant même que le Parlement n’ait délibéré de la loi.
Monsieur Collin, c’est avec un grand intérêt que j’ai écouté votre description du tableau de l’application des lois en ce début d’année 2011 et vos propositions destinées à le clarifier.
La loi est bavarde. Renaud Denoix de Saint Marc, qui a été directeur adjoint du cabinet dont j’étais membre au ministère de la justice en des temps anciens, l’a certes dit, mais le premier qui en a parlé, c’est Montesquieu. Et je ne suis pas sûr que les choses se soient améliorées depuis… Quels que soient les gouvernements qui se succèdent, la loi est en effet bien souvent bavarde.
À cet égard, des efforts sont nécessaires. Certes, je vous surprendrais si, en tant que ministre chargé des relations avec le Parlement, je promettais des effets immédiats. En revanche, je m’engage à faire tout mon possible pour convaincre mes collègues, au cours des mois à venir, d’éviter de rentrer trop dans le détail lors de la rédaction des textes de loi.
S’agissant de la multiplication des textes déposés devant les assemblées parlementaires, j’ai en effet parlé d’un ordre du jour « plein à craquer ». J’assume totalement cette situation.
Nous sommes dans une période de construction. Le Président de la République a été élu en 2007 sur un projet pour la France. Mesdames, messieurs les sénateurs, cinq ans pour mettre en œuvre un tel projet est une période très courte, a fortiori lorsque la crise vient compliquer les choses, mais je me garderai d’ouvrir ce débat politique.
En tout état de cause, dans un temps si court, il faut que les lois soient votées rapidement. Une multiplicité de textes est nécessaire pour que les choses changent dans les domaines de l’économie, la politique sociale, la sécurité, la justice.
Cela explique le recours à la procédure accélérée. Elle n’a rien à voir avec l’application de la loi, madame Borvo Cohen-Seat. Il s’agit d’un moyen donné au Gouvernement pour faire voter un texte en toute sécurité afin que les navettes n’empêchent pas l’aboutissement de son examen. Dès lors que le texte est voté, le Gouvernement a naturellement à cœur de l’appliquer. Il n’y a donc pas de relation de cause à effet.
Monsieur Collin, l’ordre du jour comprend également les propositions de loi. Vous n’êtes pas étranger à ces dernières… J’en profite pour féliciter les sénatrices et les sénateurs de l’imagination dont ils font preuve et de la créativité avec laquelle ils s’appliquent à charger encore l’ordre du jour du Parlement. §Il faut que nous gérions cela ensemble, en bonne intelligence !
La situation que vous avez dépeinte est bien moins celle de 2011 que celle qui précédait cette législature, c'est-à-dire avant 2007. Sans aucune polémique déplacée, je veux simplement rappeler quelques éléments – ils sont vérifiables par tous nos concitoyens – qui démontrent à quel point un changement profond est à l’œuvre depuis 2008 dans le domaine que vous avez évoqué.
S’agissant du taux d’exécution des lois, le Gouvernement s’astreint désormais à rendre publics des bilans semestriels. Ces bilans, transmis tous les six mois aux présidents des assemblées, sont à l’origine d’éléments très positifs. Je ne reviens pas sur ce point.
On ne saurait exiger du Gouvernement qu’il prenne, au lendemain de la publication de lois parfois riches, l’ensemble des textes réglementaires qu’elles appellent.
Je citerai le cas de la loi Grenelle II, qui nécessite cent soixante-douze textes d’application. La complexité de leur mise en œuvre implique un délai supérieur à six mois. Chacun peut le comprendre : de nombreuses réunions interministérielles sont nécessaires et une multitude d’administrations sont concernées par la rédaction des décrets. Il faut leur laisser le temps de se mettre d’accord pour proposer des textes réglementaires cohérents et à même d’être validés par le Gouvernement. Cela prend certes du temps, mais il vaut mieux le prendre plutôt que de mal appliquer une loi.
J’appelle de mes vœux, solennellement, une harmonisation des critères d’évaluation entre les pouvoirs exécutif et législatif, afin d’éviter des différences concernant l’échelle de temps et les modalités de comparaison. Pour comparer, il faut partir d’éléments similaires.
À cet effet, je propose – je vous le dis à titre personnel, mais je ferai le nécessaire pour que ma suggestion devienne réalité – que le Gouvernement prenne l’initiative de rencontrer le Sénat et l’Assemblée nationale tous les ans pour rendre compte, en se fondant sur des critères parfaitement établis, de son action en matière d’application des lois au cours de l’année civile écoulée, afin de permettre à chacun de disposer des éléments de comparaison nécessaires pour pouvoir débattre.
Voilà une proposition que, je l’espère, vous accepterez.