Cet amendement a pour objet de soumettre aux obligations de service public les éventuelles futures filiales de la société unique France Télévisions, filiales dont la création est rendue possible par l’article 3 du projet de loi.
Toutefois, une remarque préalable s’impose : en offrant cette possibilité, l’article 3 pose en fait la question du financement de la modernisation du service public dans un contexte de fragilisation de son modèle économique. Il soulève implicitement celle de ce nouveau sésame que vous appelez « média global » et révèle les contradictions profondes du projet de loi, qui affiche une ambition, mais vise à en instaurer une autre.
Il est légitime de s’interroger sur les possibilités financières offertes à France Télévisions pour multiplier les supports de diffusion, de la télévision à internet, en passant par la télévision mobile personnelle, ou encore pour aller vers des offres complémentaires, de nouvelles chaînes thématiques et des portails de vidéo à la demande. Ces moyens lui permettraient de trouver autrement son public, voire de trouver un autre public.
Or, à l’exception de cet article 3 qui renvoie à une filialisation de la diversification, rien n’a été prévu dans ce sens. Cette réforme révèle ainsi soit ses contradictions internes, soit sa véritable nature, à savoir un projet qui, dans les faits, ne s’occupe ni des intérêts ni du développement du service public et de son périmètre.
J’en viens à l’objet de cet amendement. Il est difficilement compréhensible qu’aucune obligation de service public ne soit imposée à ces futures filiales, dont le métier sera, dans l’idéal, de donner de l’élan aux programmes du service public. Les exonérer de ces obligations reviendrait à les exclure du périmètre de ce dernier. Une telle exclusion nous laisserait perplexes et encore plus inquiets pour l’avenir du service public que nous ne le sommes déjà aujourd’hui.
Lors du débat sur cette question à l’Assemblée nationale, un argument a été avancé selon lequel ces filiales, du fait de leur activité commerciale, ne pouvaient être financées par la redevance et, donc, remplir des missions de service public.
Autrement dit, l’État mène aujourd’hui une réforme de l’audiovisuel public au nom de sa soustraction au marché et de sa modernisation, mais il prépare la marchandisation de cette même modernisation.
On invoque la « qualité de son service » pour justifier le souhait d’une entreprise très centralisée et sans publicité. En même temps, on répète à l’envi que l’enjeu pour le service public consiste à se tourner vers les nouvelles technologies et les nouveaux formats. Personne ne conteste que ceux-ci représentent l’avenir de l’audiovisuel. Néanmoins, on prépare ainsi un système dans lequel de petites filiales, organisées selon un modèle marchand, prendront en charge les fruits de cette modernisation, qui pourront très bien être soumis à la publicité.
Nous nous opposons à cette réduction détournée du périmètre du service public et, si le Gouvernement et la majorité sont sincères lorsqu’ils affirment vouloir travailler à en garantir le périmètre et à en développer les moyens, je ne doute pas qu’ils voteront cet amendement avec nous.