Or, nous le savons bien, ces opérations favorisent les « frictions indésirables » au moment des arbitrages budgétaires.
A ce stade, parmi les recettes figurant au budget de l'Etat, seule la TVA me semble présenter cette caractéristique. L'affectation de points de TVA à la sécurité sociale aurait en outre l'immense mérite de satisfaire le voeu, maintes fois réitéré par la commission des finances, d'asseoir, au moins en partie, le financement de la protection sociale sur une taxe sur la consommation.
Les deux autres garanties que je considère indispensables à une débudgétisation du financement de la compensation relèvent plutôt de la procédure : il s'agit, en premier lieu, d'instituer une « clause de revoyure » ou une dotation budgétaire d'équilibre effective, qui assurera l'intégralité de la compensation dans l'hypothèse où le produit de l'impôt affecté n'y suffirait pas, monsieur le ministre du budget ; il s'agit, en second lieu, d'identifier la compensation dans une structure de gestion dédiée à cet objet. Ce peut être un fonds autonome ou une ligne de comptabilité indépendante à l'Agence centrale des organismes de sécurité sociale, l'ACOSS, du moment que cette structure permet de faire clairement apparaître l'effectivité de la compensation.
Vous l'avez compris, mes chers collègues, la commission des affaires sociales écarte, aujourd'hui comme hier, toute dissolution des allégements au sein de chaque branche, c'est-à-dire l'affectation d'un impôt pour solde de tout compte à un régime au titre de l'indemnisation des allégements de ses cotisations. Il lui paraît tout aussi inopportun d'instaurer une « barémisation » des cotisations sociales qui, en intégrant l'allégement directement dans le taux de cotisation appliqué, ferait perdre son caractère concret à la politique d'exonération et à la compensation.
Dans son rapport, Gilles Carrez préfère une solution concurrente qui présente, me semble-t-il, beaucoup d'avantages. Elle consiste à créer un nouveau prélèvement sur recettes au profit de la sécurité sociale, qui s'ajouterait aux deux prélèvements existant actuellement en faveur des collectivités locales et de l'Union européenne. Comme le souligne à juste titre le rapporteur général du budget de l'Assemblée nationale, cette procédure « inscrirait la relation financière entre l'Etat et la sécurité sociale dans une dimension quasi contractuelle », à l'image des relations qu'entretient l'Etat avec ses autres partenaires financiers principaux. Elle présenterait en outre l'indéniable mérite de ne pas remettre en cause le choix opéré en 2003, tout en démontrant la capacité du Gouvernement et du Parlement à trouver des solutions innovantes.
Nous n'avons pas nous-mêmes évoqué cette piste, car il faut pour cela, nous en avons bien conscience, modifier la LOLF et il nous avait semblé qu'une telle modification était considérée comme inopportune. Mais, dès lors que la proposition émane de la commission des finances de l'Assemblée nationale et que le projet de loi organique relatif aux lois de financement de la sécurité sociale permettrait encore de procéder à cet ajustement, je fais dès à présent part de notre disponibilité pour étudier dans les jours qui viennent, en bonne intelligence avec notre commission des finances, cette perspective intéressante.