Intervention de Raymond Couderc

Réunion du 25 mai 2011 à 14h30
Débat sur l'état de la recherche en matière d'obésité

Photo de Raymond CoudercRaymond Couderc :

Madame la présidente, madame la ministre, madame la vice-présidente de l’Office parlementaire des choix scientifiques et technologiques, mes chers collègues, l’obésité, et plus particulièrement l’obésité infantile, est devenue un enjeu de santé publique majeur dans la plupart des pays industrialisés. En France, selon l’étude nationale nutrition santé, l’ENNS, le surpoids touche actuellement près d’un enfant sur cinq et 3, 5 % des enfants sont obèses.

Il est aujourd’hui avéré qu’un enfant obèse risque fortement de le rester à l’âge adulte, ce qui entraîne une augmentation considérable des maladies associées, comme les maladies cardiovasculaires et le diabète de type 2, et une diminution de treize ans de son espérance de vie. La prise en charge restant difficile et encore peu évaluée, il est fondamental de prévenir et de prendre en charge dès le plus jeune âge la prise de poids excessive des enfants.

N’étant ni médecin ni chercheur dans le domaine de la médecine ou de la biologie, je préfère vous parler d’expérimentations concrètes que j’ai pu observer dans le domaine de la lutte contre l’obésité. En tant que président du club des maires EPODE, j’aimerais plus spécifiquement vous parler du programme Ensemble prévenons l’obésité des enfants, qui est présent dans plus de 200 villes françaises, ainsi qu’en Belgique, en Espagne, en Grèce, en Australie et même au Mexique.

Je dois d’ailleurs rendre hommage à l’expérience des précurseurs de Fleurbaix-Laventie et notamment de Mme Brigitte Bout qui ont montré le chemin avant que le programme EPODE soit engagé, lequel a concerné dans un premier temps dix villes, avant de connaître l’élargissement que nous constatons aujourd’hui.

L’objectif du programme EPODE est d’aider les familles à modifier en profondeur et durablement leur mode de vie en développant, grâce à la mobilisation de tous les acteurs locaux, une offre de proximité conforme aux recommandations du programme national nutrition santé. Cette offre est principalement axée sur une alimentation équilibrée, diversifiée, abordable et plaisante au niveau familial, sur la pratique d’activités physiques pour tous intégrées dans le quotidien et sur l’encouragement à développer un environnement local favorable à ces bonnes habitudes.

Le programme repose sur quatre piliers : un engagement fort des politiques, au niveau local et au niveau national – c’est actuellement le cas – ; une organisation professionnelle avec une expertise en marketing social ; un financement durable assuré par un partenariat public-privé reposant sur des règles très claires ; une expertise scientifique pour l’évaluation.

Le programme EPODE instaure en premier lieu une démarche de prévention.

Je prendrai pour exemple, et je vous prie de m’en excuser, le cas particulier de la ville dont je suis maire : Béziers.

Le choix y a été fait de promouvoir une approche globale de la question de l’obésité infantile. Souvent édifiée à partir des écoles, la démarche de prévention s’est peu à peu étendue à tous les aspects de la vie communale, à savoir les familles, les associations sportives et sociales, les institutions, les acteurs privés. Plusieurs projets ont été réalisés dans ce cadre.

Ainsi, chaque année depuis 2006, plus de 1 000 enfants participent à la randonnée des écoles en partenariat avec l’Éducation nationale. Quatre parcours de huit à seize kilomètres sont proposés, avec découverte du patrimoine et sensibilisation à un pique-nique équilibré.

Un petit-déjeuner pédagogique est également organisé une fois par an dans plusieurs écoles de la ville. Les enfants et leurs parents sont conviés à partager un petit-déjeuner, avec une réunion d’information faite par une diététicienne.

Des ateliers sensoriels sont mis en place pour permettre l’éveil aux différents goûts. Menés dans les maternelles et les crèches, ils concernent aussi un centre pour enfants handicapés.

Enfin, un atelier a été proposé aux familles défavorisées – on sait aujourd’hui qu’elles sont particulièrement à risque dans ce domaine – afin de les conseiller pour gérer leurs achats, notamment en lisant plus attentivement les étiquettes, en repérant les graisses et sucres cachés. Des propositions de menus diététiques leur sont aussi faites.

En deuxième lieu, le programme EPODE met en place une démarche de prise en charge.

Au-delà de l’approche globale, un programme spécifique de prise en charge des enfants détectés comme étant en surpoids a également été mis en place à Béziers.

Chaque année, environ 1 200 élèves sont examinés.

La campagne d’information touche les enfants de zéro à vingt-cinq ans. Un dépistage scolaire est réalisé. Enfin, une prise en charge médicale de la surcharge pondérale des enfants et adolescents dépistés est menée par l’association « Croque Santé » et par le Collège des médecins de la région biterroise, qui rassemble 150 médecins.

Il s’agit ainsi de prendre en charge les enfants dépistés essentiellement sur le plan diététique et, si besoin, psychologique, notamment en travaillant sur l’image du corps que peuvent avoir les enfants. Environ 535 enfants ont été accompagnés depuis 2006.

Cette prise en charge, avec l’aide des médecins de ville, a permis une baisse de la corpulence moyenne des enfants accompagnés allant de moins 10 % chez les 324 enfants suivis en 2007 jusqu’à moins 49 % chez les 256 enfants suivis en 2010.

En troisième et dernier lieu, le programme EPODE permet l’accompagnement des enfants en situation d’obésité.

Une donnée cependant n’était pas encore prise en compte dans ce programme, malgré ses bons résultats. Aussi, un second projet a été mis en place très récemment. Le projet expérimental LIPOMAX consiste ainsi en une réadaptation à l’activité physique des enfants dépistés obèses dans le cadre du programme EPODE et suivis par Croque Santé, en collaboration avec le service des sports et le centre médico-sportif.

Plus précisément, douze enfants ont été entraînés pendant huit semaines par un éducateur sportif stagiaire en master Activités physiques adaptées, en lien avec le service des sports de la ville de Béziers.

Les résultats préliminaires semblent montrer, dans la plupart des cas, l’amorce d’une baisse significative de la masse grasse de ces enfants au profit de la masse maigre et donc d’une prise de muscles au détriment de la masse grasse. Cette étude prometteuse mérite par conséquent d’être continuée et analysée sur une plus grande population, puisqu’elle semble apporter quelques réponses positives au problème que peut poser l’obésité infantile.

Par ses 149 actions menées en 2009, par le dépistage qu’il propose ou par la communication directe, le programme de prévention EPODE a ainsi réussi à toucher 12 000 personnes sur la ville de Béziers.

Il serait donc intéressant d’étendre ce type d’action à toutes les villes, afin de mettre à disposition des familles, des médecins et des élus un outil de promotion du sport et d’une alimentation saine et variée pour lutter contre les maladies que peut engendrer l’obésité des enfants.

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