Tout d'abord, monsieur le ministre, je voudrais vous remercier de votre écoute, du temps que vous avez bien voulu consacrer à ce sujet, de votre présence aujourd'hui et de votre soutien à cette démarche.
Je voudrais ensuite particulièrement remercier le rapporteur de la commission des affaires culturelles, Jacques Legendre, par ailleurs secrétaire général de l'assemblée parlementaire de la francophonie, qui, depuis très longtemps, s'efforce de conjuguer tous les moyens nécessaires, avec les convictions que nous lui connaissons, pour que le français conserve et développe toute sa place dans le monde.
La présente proposition de loi est très modeste ; il s'agit d'adapter sur quelques points, plus de dix ans après son vote, la loi Toubon, en respectant l'ordre public international - c'est-à-dire le droit communautaire -, par exemple dans le domaine des marques et de la propriété industrielle.
La voie est parfois étroite, mais nous nous sommes efforcés, et la commission des affaires culturelles a très précisément ajusté le dispositif, de bien raisonner en termes d'explicitation pour les consommateurs francophones, afin que les dispositions ici préconisées ne contreviennent pas au droit communautaire.
La commission des affaires culturelles, monsieur le rapporteur, a fait un travail tout à fait remarquable. Grâce à ce travail d'audition, de concertation, vous avez abouti à un texte dans lequel l'auteur de la proposition de loi se retrouve tout à fait.
Vous y avez même ajouté quelques initiatives, notamment en matière de transport aérien, et je ne puis qu'y être sensible.
Je voudrais souligner à mon tour, après l'orateur du groupe socialiste, que cette démarche ne saurait être perçue comme défensive ou purement défensive.
Certes, la langue est le creuset de notre citoyenneté - le ministre l'a rappelé - et nous pouvons le réaliser encore davantage aujourd'hui. Si la république a un sens, si elle refuse les communautarismes, si elle propose des valeurs universelles, c'est bien à partir de notre langue : le français.
Au demeurant, monsieur le ministre, je voudrais rappeler que l'idée de ces quelques dispositions m'est venue de la pratique de trois fonctions que j'exerce.
D'abord, la fonction de maire, qui est à la base de tout, car elle nous met en contact avec les réalités les plus diverses de la société.
Quand un maire voit se multiplier des enseignes qui ne sont plus francophones, quand il les voit se répandre sur les façades des immeubles, sur les devantures, et quand il voit cette situation évoluer d'année en année, il se pose bien sûr des questions. Quand il entend les plus jeunes s'exprimer, quand il constate combien ils sont conditionnés « culturellement parlant » par une mondialisation largement anglo-saxonne, là aussi le maire se pose des questions. Quelle sera notre société ? Quelle sera la réalité de cette diversité culturelle dans le monde de demain ou d'après-demain ?
Nous devons non pas gérer « à la petite semaine » mais essayer de nous interroger sur ce que sera l'environnement de nos enfants, de nos petits-enfants, dans vingt ans, trente ans, cinquante ans ou cent ans.
Mes chers collègues, nous devons être capables de léguer notre langue, si cela est possible, encore plus belle, encore plus forte que lorsqu'elle nous a été remise.
Président du groupe interparlementaire France-Québec, je ne pouvais, là aussi, qu'être très sensible à cette priorité de la langue française, facteur d'identité et de citoyenneté.
Quel plus bel exemple en effet, monsieur le ministre, sur une échelle multiséculaire, que celui de cette société québécoise qui sait être fidèle à ses origines et à ses traditions tout en étant extrêmement ouverte au monde d'aujourd'hui ? Il n'est nulle société plus ouverte économiquement, socialement, j'allais dire « sociétalement », que cette société québécoise. Nous le savons par tous les développements qu'elle a connus dans les domaines des arts et des prestations culturelles. Combien d'artistes francophones nous viennent du Québec, qui a su un jour se réveiller, s'ouvrir dans une révolution tranquille, et qui a su se doter d'une charte de la langue française !
En vérité, l'idée de ces quelques dispositions m'est venue il n'y a pas si longtemps, à la table du Premier ministre Jean-Pierre Raffarin qui recevait le Premier ministre québécois Jean Charret dans le cadre des réunions annuelles entre les premiers ministres québécois et français. Nous en sommes venus, dans le cours de la conversation, à parler de ces rues de certains quartiers de Paris où il est possible de parcourir plusieurs centaines de mètres sans voir aux devantures des magasins ou sur les enseignes un mot de français, ni même parfois un mot articulé en caractère latin.
N'en déplaise à Mme Payet, le génie de notre pays et de sa capitale réside dans le fait que les français francophones puissent comprendre ce qui est écrit sur les murs et aux devantures des magasins !