Prenons l'exemple de la politique agricole commune, dont nous savons qu'elle n'a pas que des amis au sein de l'Union européenne, au point que des pressions assez fortes s'exercent parfois pour obtenir sa révision.
C'est d'ailleurs ce qui s'est produit assez récemment, et il a fallu procéder à une révision de cette politique agricole commune.
Imaginez que tous les actes que le Gouvernement était susceptible de prendre aient été éligibles à une motion. Ne croyez-vous pas qu'il y aurait eu une mobilisation formidable de toutes les organisations syndicales agricoles, de toutes les forces vives de la France agricole ? On les imagine sans peine intervenir auprès de nous, parlementaires, pour nous demander avec vigueur de voter une motion enjoignant au Gouvernement de ne céder en rien sur la politique agricole commune.
Si une telle motion avait existé, le ministre de l'agriculture d'alors, M. Hervé Gaymard, qui a pu négocier à Berlin un accord équilibré et acceptable, en aurait été totalement empêché.
En effet, de quelle autorité aurait disposé le ministre de l'agriculture arrivant à Bruxelles porteur d'une motion extrêmement sévère et contraignante, bref, d'un mandat impératif, pour reprendre l'expression, tout à fait pertinente en l'occurrence, de M. Bret ?
De quelle autorité pourrait disposer un ministre dans ces conditions ? Aurait-il une capacité de négocier à Bruxelles ? Quelles concessions pourrait-il faire ? Pratiquement aucune ! Et je vous laisse imaginer ce qui pourrait se produire si le ministre revenait devant les parlementaires après avoir fait des concessions...
Voilà pourquoi l'amendement de M. Fauchon aboutirait, s'il était adopté, à corseter le Gouvernement, à lui lier les mains. Or, dans un très grand nombre de domaines, l'exécutif, du Président de la République aux ministres, en passant par le Premier Ministre, a tout de même besoin d'une certaine marge de manoeuvre à Bruxelles. Il faut parfois se réserver une possibilité de concession ; dans certains cas, c'est même indispensable !