Intervention de François Marc

Réunion du 16 février 2005 à 21h30
Modification du titre xv de la constitution — Articles additionnels après l'article 4

Photo de François MarcFrançois Marc :

...en ce qui concerne les trente-neuf articles sur lesquels elle s'est engagée, sur mandat exprès du Président de la République, Jacques Chirac, en 1999.

Il s'agit donc, grâce à l'occasion qui nous est offerte aujourd'hui, de mettre la France en situation de ratifier cette charte.

Bien entendu, les arguments contraires ne manquent pas ; nous en avons entendu quelques-uns.

Première objection : le moment serait mal choisi, dans un débat sur la Constitution européenne, de s'intéresser à ces questions. Au fond, ce n'est jamais le moment ! Le Président de la République fait à tout bout de champ des déclarations sur la nécessité de préserver les langues, mais ce n'est jamais le moment ! La Constitution est faite pour autre chose, les réformes qui nous sont proposées ont d'autres objets ! Si nous procédons de la sorte, il est clair que nous n'aboutirons jamais.

Deuxième objection, que le rapporteur vient encore à l'instant de nous opposer : soutenir les langues régionales, qui ne sont apprises aujourd'hui que par 2 % ou 3 % des enfants dans les régions les plus avancées, créerait « des ferments de division de la République française ». A entendre ce type d'argumentation, nous avons le sentiment d'être revenus au XIXe siècle ou au début du XXe siècle !

Pour ce qui est des objections de nature constitutionnelle que le rapporteur et le ministre ont exprimées, la formulation de l'amendement et les engagements qui ont été pris y répondent très clairement. Elles ne sauraient donc être retenues.

En effet, la référence à l'article 2 de la Constitution, qui dispose, en son premier alinéa, que la langue de la République est le français, permet de récuser l'objection initiale du Conseil constitutionnel, rappelée par le rapporteur. De ce point de vue, une clarification est apportée.

Par ailleurs, la reconnaissance de droits collectifs à quelque groupe que ce soit sur le territoire de la République - deuxième objection d'ordre constitutionnel traditionnellement opposée à la ratification de la Charte - n'est plus à craindre. En effet, à l'article II-82 du traité établissant une Constitution pour l'Europe, il est précisé que « l'Union respecte la diversité culturelle, religieuse et linguistique », ce qui doit s'entendre non seulement pour les rapports entre l'Union et ses Etats membres, mais également au sein de ces derniers.

Il est donc clair que nos propres arguments sont parfaitement recevables. On ne peut plus prétendre que la ratification de la charte des langues régionales pour les trente-neuf articles sur lesquels la France s'est déjà engagée, ratification qui pourrait intervenir après l'entrée en vigueur du traité constitutionnel, serait contraire aux dispositions constitutionnelles qui proscrivent, dans le droit public français, la reconnaissance de droits spécifiques, y compris dans le domaine culturel, à des groupes minoritaires puisque, d'une part, la ratification de la charte sera conforme aux dispositions du traité qui reconnaissent la diversité linguistique et, d'autre part, cette reconnaissance de la diversité linguistique ne pourra conduire à l'attribution de droits collectifs.

Tels sont, mes chers collègues, les arguments essentiels en faveur de la ratification de la charte européenne des langues régionales. Il me semble légitime de préserver un patrimoine linguistique en voie de disparition qui a marqué des siècles de notre histoire dans beaucoup de régions.

Y a-t-il urgence à adopter aujourd'hui des dispositions pour préserver ce patrimoine ? Nous le pensons, car ces langues régionales disparaîtront progressivement si nous ne leur apportons pas un soutien décisif.

Le Gouvernement en a-t-il la volonté politique ? La réponse est, à l'évidence, négative. Les arguments avancés par M. Perben ne correspondent plus à la situation actuelle. Ils sont dépassés par l'argumentation qui sous-tend cet amendement et, aujourd'hui, par le projet de Constitution européenne.

C'est pourquoi, mes chers collègues, nous vous proposons d'adopter cet amendement et de manifester ainsi la volonté politique du Parlement face à l'exigence de préservation de ce patrimoine essentiel de notre belle France !

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