Il n'y a là aucune défiance envers l'administration pénitentiaire. Simplement, l'administration ne disposant pas de certaines informations, elle ne peut en tirer d'enseignements. Ainsi, combien de fois a-t-on relevé l'insuffisance, voire la quasi-absence de relations entre les services pénitentiaires et psychiatriques d'un établissement, entre les membres du SMPR, le service médico-psychologique régional, et le personnel pénitentiaire ? Si le contrôleur général dispose d'une information couverte par le secret justifiant, par exemple, une mesure immédiate aussi banale que l'encellulement individuel sur l'heure d'un détenu, va-t-on le priver du droit de l'imposer à l'administration pénitentiaire et prendre le risque d'un drame dont l'actualité des prisons n'est malheureusement pas si avare ?
Enfin, je poserai de nouveau la question de l'opportunité de confier au Médiateur de la République le contrôle extérieur et indépendant des lieux de privation de liberté. J'y étais favorable hier lorsque votre prédécesseur, madame le garde des sceaux, a annoncé la décision du précédent Gouvernement de lui confier ce rôle, je n'ai pas changé d'avis.
De nombreux arguments plaident en faveur de ce choix : la volonté de s'appuyer sur la légitimité acquise et respectée du Médiateur, sa connaissance de l'univers carcéral, son savoir-faire en matière de réformes préventives et les importants pouvoirs dont il dispose déjà en l'état actuel de notre droit. S'y ajoute le souci d'éviter la dispersion des crédits publics, dans la mesure où l'extension des compétences d'une structure existante permettrait de diminuer notablement le coût budgétaire.
Or l'ambition du projet de loi, qui devrait concerner 5 500 lieux privatifs de liberté - 5 788, avez-vous dit, madame le garde des sceaux -, ambition que nous approuvons tous, nécessite la mise à disposition de moyens importants.
Enfin, nous sommes nombreux à déplorer la multiplication à l'infini des autorités indépendantes. Dans le rapport, de l'Office parlementaire d'évaluation de la législation, Les autorités administratives indépendantes : évaluation d'un objet juridique non identifié, notre éminent collègue Patrice Gélard recommande notamment de faire précéder la création de toute nouvelle autorité d'une évaluation afin de déterminer si les compétences qui lui sont confiées ne pourraient pas être exercées par une entité existante.