Intervention de Michelle Demessine

Réunion du 2 décembre 2006 à 15h45
Loi de finances pour 2007 — Stratégie économique et pilotage des finances publiques

Photo de Michelle DemessineMichelle Demessine, rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques :

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, la mission « Stratégie économique et pilotage des finances publiques » est dotée d'environ 860 millions d'euros pour 2007. Elle comporte essentiellement les crédits de personnel et les crédits de fonctionnement des directions générales du ministère de l'économie et des finances chargées d'aider à définir la politique économique et financière de la France.

Tout en précisant d'emblée que la commission des affaires économiques a émis un avis favorable sur l'adoption de ces crédits, je souhaiterais néanmoins vous faire part de plusieurs observations.

Tout d'abord, cette mission est affectée par des baisses très sensibles. On constate des baisses de crédits, tout d'abord, puisque les autorisations d'engagement du premier programme baissent de 40 %. On note ensuite une réduction des emplois, puisque, M. Copé l'a lui-même indiqué à l'Assemblée nationale, le ministère totalise 2 988 réductions de postes, ce qui signifie que deux départs à la retraite sur trois ne seront pas remplacés.

À titre personnel, je ne peux que déplorer vivement cette évolution, qui me semble faire peser des risques importants sur la qualité du service public. Quant à la commission des affaires économiques, elle salue dans leur principe les importants efforts de modernisation engagés par Bercy, dont la nouvelle démarche interministérielle d'audits de modernisation.

À ce sujet, il faut toutefois relever que le pourcentage des personnels d'encadrement de l'État satisfaits de l'appui apporté par la nouvelle direction à la modernisation de l'État indique une performance moyenne. Surtout, l'objectif cible fixé pour 2008 n'est que de 54 %, ce qui n'apparaît pas très ambitieux. Pouvez-vous nous éclairer, monsieur le ministre, sur les raisons d'une valeur cible aussi basse et sur l'éventualité de son relèvement ?

La fiabilité des prévisions de croissance économique est également marquée cette année par une performance moyenne, alors que cet indicateur est au coeur des objectifs de la mission. Ainsi, le Gouvernement avait tablé sur une croissance de 2, 5 % en 2005 ; finalement, elle n'a été de 1, 2 %, ce qui représente tout de même un écart de 1, 3 point.

Une telle situation est tout à fait regrettable, car cela signifie que le projet de budget se fonde sur une hypothèse erronée et que le vote du Parlement est donc, d'une certaine façon, biaisé. Comme le souligne d'ailleurs la Cour des comptes, aucun des quatre programmes pluriannuels établis entre décembre 2001 et décembre 2004 n'a été exécuté conformément aux prévisions : tous se sont traduits par des résultats très en retrait des ambitions affichées en raison d'hypothèses économiques insuffisamment réalistes.

Au demeurant, l'écart entre les prévisions de croissance et les réalisations ne menace-t-il pas de se répéter pour 2006, du fait de la croissance nulle annoncée par l'INSEE au troisième trimestre ?

Par ailleurs, notre attention a été récemment attirée sur la pertinence de l'indice des prix à la consommation. Il est urgent que l'INSEE engage une réflexion de fond sur cette question. En effet, depuis la création de l'euro, cet institut fournit des statistiques officielles concernant le pouvoir d'achat qui sont en nette contradiction avec la perception qu'en ont nos concitoyens, comme l'a montré le vif débat suscité par l'annonce, au début du mois d'octobre, d'une hausse de 2, 3 % en 2006.

L'estimation repose sur l'indice des prix à la consommation, qui aurait augmenté, toujours selon l'INSEE, de 1, 9 % sur un an. Or cet indicateur est de plus en plus contesté, car il sous-estime le poids réel de certaines dépenses : par exemple, les loyers ne pèsent que 6 % dans la composition de l'indice, alors que les locataires, qui représentent 40 % de la population française, consacrent près d'un quart de leur budget à se loger ; de même, les crédits immobiliers ne sont pas pris en compte par l'INSEE, alors qu'ils grèvent de plus en plus le budget des familles.

En réalité, selon l'indice du coût de la vie, créé en 2004 par Michel-Édouard Leclerc, le pouvoir d'achat n'aurait augmenté que de 0, 5 %, une fois soustraites les charges contraintes, c'est-à-dire le remboursement des crédits, les loyers, les assurances, les transports publics. Entre ces deux estimations, l'Institut national de la consommation évalue à 0, 9 % la hausse du pouvoir d'achat en 2006.

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