Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, la nomenclature budgétaire définie par la LOLF est, dans ses grandes lignes, semblable à l'architecture arrêtée l'année dernière dans le domaine de la justice : le programme « Conseil d'État et autres juridictions administratives », rattaché depuis 2006 à une mission distincte « Conseil et contrôle de l'État », se singularise toujours des autres programmes de la mission « Justice ».
Monsieur le ministre, je formulerai deux observations et je poserai quatre questions.
Première observation : comme l'année dernière, plus de la moitié - 53, 5 % - des crédits alloués à la mission « Conseil et contrôle de l'État » par le projet de budget pour 2007 sont consacrés au financement du programme 165 « Conseil d'État et autres juridictions administratives ».
Hors fonds de concours, ce poste budgétaire - en hausse de près de 5, 3 % - progresse plus que le budget général de l'État - en hausse de 0, 8 % - et même légèrement plus que le budget alloué à la mission « Conseil et contrôle de l'État » - en hausse de 5, 1 %.
La justice administrative devrait ainsi bénéficier en 2007 de près de 251 millions d'euros de crédits de paiement et de 253 millions d'euros d'autorisations d'engagement.
Ma seconde observation concerne l'évaluation des frais de justice.
Le Gouvernement a réévalué le montant de la dotation allouée aux frais de justice pour la porter à 8, 8 millions d'euros - soit une hausse de 1, 2 million d'euros par rapport à la dotation prévue en loi de finances initiale pour 2005.
Toutefois, force est de constater que cet abondement dépasse seulement de 8 % la consommation constatée en 2005. Compte tenu de l'accélération du rythme des dépenses depuis 2003, lequel n'a jamais été inférieur à 10 %, et dans le contexte d'une activité contentieuse dense, il est à craindre que la somme allouée cette année soit insuffisante pour financer les besoins réels.
Or la suppression du caractère évaluatif de ces dépenses qui, aux termes de la LOLF, revêtent désormais un caractère limitatif impose que l'évaluation en loi de finances soit fixée au plus près de la consommation effective.
Cette analyse rejoint celle de notre collègue Jean-Claude Frécon, rapporteur spécial, qui doute, comme il vient de l'indiquer, de la sincérité budgétaire de ce poste.
J'en viens à mes quatre questions.
Tout d'abord, le taux de réalisation prévisionnel de la loi d'orientation et de programmation pour la justice en matière de créations d'emplois, qui s'établit à un peu plus de 71 %, se révèle décevant. Ainsi, seulement 342 postes sur les 480 postes attendus ont été effectivement créés, le solde des créations d'emplois non exécutées s'élevant à 138 postes - 54 magistrats et 84 agents de greffe.
Le présent projet de budget, compte tenu du contexte budgétaire contraint, n'a ainsi pu rattraper le retard observé depuis 2005.
Dans ces conditions, monsieur le ministre, le plan quinquennal adopté en 2002 pourra-t-il être respecté ? Pouvez-vous m'assurer qu'un rattrapage interviendra l'année prochaine ? Quel sera son ordre de grandeur ?
Ensuite, et je souhaite insister tout particulièrement sur ce point, car il s'agit d'un sujet important dont nous aurons sans doute à reparler, une nouvelle extension des matières ressortissant à la compétence du juge unique est annoncée depuis l'année dernière par le Gouvernement.
Le décret du 28 juillet 2005 a opéré un premier élargissement du recours au juge unique. Cette réforme concerne les requêtes relevant d'une série de requêtes formées devant toutes les juridictions, ainsi que les affaires les plus simples soumises à la procédure d'admission des pourvois en cassation devant le Conseil d'État.
La perspective d'une nouvelle extension inquiète fortement les magistrats administratifs, traditionnellement attachés à la collégialité de la formation de jugement.
Le renoncement à la collégialité constitue un pis-aller pour remédier à l'encombrement des juridictions administratives. Telle est la raison pour laquelle le recours au juge unique doit être strictement cantonné aux affaires les moins complexes et dépourvues d'enjeu à l'égard des libertés et droits fondamentaux.
Monsieur le ministre, le Gouvernement peut-il nous assurer que l'extension envisagée ne viserait qu'un contentieux très ciblé et répétitif dans des domaines où la jurisprudence est stable et bien établie ?
S'agissant plus particulièrement des nouvelles règles envisagées par le Gouvernement en application de la loi du 24 juillet 2006 relative à l'immigration et à l'intégration en matière de recours à l'encontre d'un titre de séjour, il paraît essentiel que la procédure contentieuse ne soit pas trop raccourcie afin de laisser au justiciable le temps de présenter tous ses arguments.
Ainsi, le délai de quinze jours au-delà duquel il n'est plus possible de présenter un mémoire complémentaire annoncé par le requérant et que le Gouvernement prévoit, semble-t-il, nous paraît un peu court et mériterait d'être allongé. Que pense le Gouvernement de cette proposition ?
Enfin, je me félicite de la bonne exécution du programme immobilier. Toutefois, en tant qu'élu gardois, je souhaiterais insister sur le nouveau tribunal administratif de Nîmes.
Alors que la façade du palais de justice et de la préfecture ont été dernièrement réhabilitées, il manque 450 000 euros pour le ravalement de la façade du tribunal administratif, qui fait partie du même ensemble architectural.
Ne serait-il pas possible d'envisager un cofinancement de cette opération avec les collectivités locales - la ville de Nîmes, le conseil général et le conseil régional -, afin de finaliser l'établissement de ce nouveau tribunal ?
Sous le bénéfice de ces observations, la commission des lois a émis un avis favorable sur l'adoption des crédits consacrés au programme « Conseil d'État et autres juridictions administratives » dans le projet de loi de finances pour 2007. (