Intervention de Jean Bizet

Réunion du 2 décembre 2006 à 15h45
Loi de finances pour 2007 — Écologie et développement durable

Photo de Jean BizetJean Bizet, rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques :

Monsieur le président, madame la ministre mes chers collègues, s'agissant des crédits de la mission « Écologie et développement durable », je partage l'analyse de ma collègue Fabienne Keller. J'ajouterai simplement que les choix opérés en faveur de la protection de la biodiversité à travers la politique des parcs nationaux et le réseau Natura 2000 ont reçu l'aval de notre commission des affaires économiques qui a émis un avis favorable à l'adoption des crédits de la mission.

Dans le temps qui m'est imparti, je souhaite insister sur l'importance des enjeux internationaux en matière de développement durable et de protection de l'environnement, en illustrant mon propos par l'exemple de la politique de lutte contre le changement climatique.

Celle-ci s'inscrit en effet pleinement dans une démarche de développement durable et les conclusions du rapport Stern, établi à la demande du gouvernement britannique, sont, à cet égard, sans appel, évaluant le coût économique du « laisser-faire » au niveau mondial.

Il est donc essentiel d'appliquer les instruments mis en place et même d'aller au-delà, à l'échelle tant internationale qu'européenne et nationale.

Ainsi en est-il du protocole de Kyoto, signé en 1997 et entré en vigueur le 1er février 2005, qui met en place un cadre ambitieux de réduction des émissions de gaz à effet de serre sur la période 2008- 2012.

Il importe de préparer, au niveau politique, les négociations pour la période ultérieure. En outre, l'engagement de la communauté internationale, lors du sommet de Nairobi, d'entamer le processus de révision du protocole de Kyoto en 2008 constitue un signal important quant à la pérennité du dispositif.

Les pays ayant ratifié le protocole de Kyoto, y compris les pays en développement, ont reconnu la nécessité de diviser au moins par deux les émissions de gaz à effet de serre à l'échelon mondial. Cette reconnaissance partagée représente, de mon point de vue, une avancée importante en vue de la mise en place d'objectifs pour l'après-2012.

J'ajoute que la conférence a pris date pour une revue complète du protocole de Kyoto en 2008, alors que l'Union européenne sera sous présidence française ; notre mobilisation et notre force de conviction seront alors déterminantes.

Cette perspective apporte un éclairage particulier sur les négociations en cours avec la Commission européenne à propos de notre plan national d'allocations de quotas dans le cadre du système européen des quotas pour la période 2008 - 2012.

La presse s'est fait l'écho du refus opposé au projet transmis par le Gouvernement en septembre dernier, ce qui vous a conduit, madame la ministre, à le retirer pour le renégocier avec l'ensemble des acteurs économiques et diminuer sans doute le volume des quotas alloués.

Il me paraît essentiel de tout mettre en oeuvre pour que le marché européen des permis d'émission soit réellement incitatif, au risque, sinon, de discréditer notre position, tout au moins de conforter les pays opposés au protocole de Kyoto, à savoir les États-unis et l'Australie, voire le Canada, tentés par un revirement. À cet égard, je ne puis que déplorer la dérive à laquelle ces pays sont entraînés ; je pense notamment à l'augmentation, en l'espace de dix ans, de plus de 26 % de leur tonnage en CO2. Comment, dans ces conditions, pourrions- nous convaincre des pays émergents et gros émetteurs de CO2 tels que la Chine, l'Inde ou encore le Brésil d'accepter des engagements de réduction ?

Or il est certain que le marché d'échanges de quotas ne saurait fonctionner si l'offre excède largement la demande, ce qui s'est produit durant la première période.

À l'inverse, il convient d'être attentif, mais je sais que vous l'êtes, madame la ministre, à la nécessaire prise en compte de la croissance économique et de la compétitivité des entreprises européennes.

La lutte contre le changement climatique doit se traduire non pas par moins de croissance mais par plus de science et de technologie, afin d'aider les entreprises à innover en matière d'efficacité énergétique. Or il me semble que la France dispose à cet égard de nombreux atouts et que lui sont ouvertes des perspectives fort encourageantes.

Dans ce contexte, la proposition du comité interministériel du développement quant à la mise en place d'une « taxe carbone » sur les importations en provenance des pays refusant de s'engager dans le protocole de Kyoto au-delà de 2012 prend tout son sens.

Bien entendu, cette disposition doit être examinée à l'aune des exigences de l'Organisation mondiale du commerce, l'OMC, mais, pour ma part, j'ai toujours été convaincu de la nécessité d'intégrer le respect de l'environnement dans les règles du commerce international.

De la même façon, il convient de soutenir la proposition de la Commission européenne d'intégrer le secteur des transports dans le système d'échanges européen afin de ne pas faire porter la charge exclusive de l'effort sur le secteur industriel qui, pour ce qui est de la France, a déjà réduit ses émissions de CO2 de plus de 21 % entre 1990 et 2002.

Vous avez également raison, madame la ministre, de défendre la spécificité française qui tient à la taille notre parc nucléaire ; celui-ci nous permet d'émettre moins de gaz à effet de serre que d'autres pays.

Il faut également mettre en avant le contenu du plan national sur le climat en matière de transports et d'habitat.

Pour bénéficier d'une meilleure lisibilité de cette politique, il est indispensable, dans le cadre de la LOLF, de mettre en place un document de politique transversale sur la politique du climat et j'avoue être un peu déçu de ne rien trouver à ce sujet dans le projet de loi de finances rectificative pour 2006, contrairement aux engagements que vous aviez pris, madame la ministre. Pouvez-vous nous éclairer sur ce point ?

Tout ce qui vient d'être dit ne fait montrer un peu plus combien il est nécessaire de mettre en place une véritable gouvernance mondiale en matière d'environnement, et je souscris totalement à la volonté du Président de la République d'avancer dans la voie de cette réforme institutionnelle.

Il faut tout à la fois mettre de la cohérence dans la multiplicité des accords internationaux signés en matière d'environnement et se donner les moyens d'établir un corpus de règles en matière de respect de l'environnement par tous les pays.

Le projet de transformation du programme des Nations unies pour l'environnement doit nous mobiliser. Sur ce point, j'en suis convaincu, chacun saura prendre ses responsabilités.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion