Intervention de Christian Demuynck

Réunion du 2 décembre 2006 à 15h45
Loi de finances pour 2007 — Écologie et développement durable

Photo de Christian DemuynckChristian Demuynck :

En cette dernière discussion budgétaire avant les élections législatives, madame la ministre, je tenais tout d'abord à saluer votre combativité et votre action au sein du ministère de l'écologie et du développement durable. Vous avez agi avec passion et efficacité au sein d'un ministère qui n'a malheureusement pas la dimension qui devrait être la sienne, et ce depuis bien des années.

En effet, malgré l'augmentation notable de votre budget pour 2007 - et il faut la souligner -, on ne peut que déplorer le fait que l'écologie ne représente que 0, 39 % du budget de l'État, alors que l'urgence environnementale à laquelle nous sommes aujourd'hui confrontés doit mobiliser tout le monde, au-delà de nos clivages politiques et bien au-delà de nos frontières géographiques.

On le voit bien, une prise de conscience collective s'amorce sur le fait que notre planète n'est pas interchangeable et que nous courons à la catastrophe si nous ne changeons pas nos pratiques et nos habitudes.

À ce propos, madame la ministre, je souhaite souligner l'efficacité du message de la campagne publicitaire lancée par votre ministère sur les économies qu'individuellement nous pouvions réaliser. Il est vrai que, à l'échelle de chaque citoyen, les petits gestes peuvent paraître dérisoires, mais, multipliés par plusieurs dizaines de millions, ils prennent une tout autre dimension !

Il convient de poursuivre dans cette voie pédagogique et de continuer à engager nos concitoyens à adopter des comportements écoresponsables. C'est l'une des actions pour préserver notre planète.

En 2002, le Président de la République Jacques Chirac rappelait à Johannesburg : « Notre maison brûle et nous regardons ailleurs. La nature, mutilée, surexploitée, ne parvient plus à se reconstituer et nous refusons de l'admettre. L'humanité souffre. » Ce message résonne encore dans nos esprits et reste plus que jamais d'actualité.

J'entends ici et là certains condamner la « starification » de la cause environnementale. S'il ne faut évidemment pas réduire ce débat à la forme, le fait que des personnalités comme Nicolas Hulot aient contribué à sensibiliser l'opinion est très positif. Avoir assisté à la course à la photo des candidats à la présidentielle ou des ex-présidentiables avec le présentateur vedette de TF1, ou bien encore avoir entendu le candidat malheureux Laurent Fabius annoncer vouloir faire de Nicolas Hulot son vice-premier ministre, tout cela m'a beaucoup amusé.

Néanmoins, l'année 2007, avec ses rendez-vous électoraux majeurs, doit être l'occasion de porter sur le devant de la scène la question environnementale. Il faut surtout que les candidats s'engagent, au-delà des effets d'annonce et des envolées lyriques, à mettre en oeuvre un programme réellement ambitieux, à donner à ce ministère des moyens financiers mais surtout à renforcer ses compétences. À ce titre, la création d'un grand ministère de l'environnement me paraît à terme une nécessité tant le champ d'action en matière environnementale est grand et tant le cloisonnement ministériel actuel constitue un frein à une action réellement globale.

Ainsi, en matière de lutte contre le réchauffement climatique, le secteur du logement et celui des transports sont parmi les grands responsables des émissions des gaz à effet de serre.

Concernant le logement, la consommation d'énergie représente près de 25 % des émissions. Il convient donc d'augmenter l'effort que le Gouvernement a entrepris avec la mesure incitative du crédit d'impôt. En effet, le soutien aux équipements les plus performants, tels les chaudières à basse température ou à condensation, les dispositifs de régulation ou les appareils utilisant les énergies renouvelables comme les pompes à chaleur, doit être maintenu mais surtout développé, afin que les habitudes de consommation continuent à évoluer.

S'agissant des transports, qui représentent 26 % des émissions de gaz à effet de serre, j'entends souvent certains s'offusquer de l'utilisation excessive de la voiture pour se rendre à son travail. Si ce constat se révèle exact - il suffit de prendre le boulevard périphérique parisien à n'importe quelle heure de la journée pour constater qu'il est saturé et que, dans 90 % des cas, le véhicule n'est occupé que par son conducteur -, il faut néanmoins s'interroger sur la principale cause de ces pratiques, à savoir une inadaptation de notre réseau de transports en commun.

En effet, tant que les transports collectifs ne seront pas adaptés et attractifs, il ne faut pas espérer que nous changerons nos habitudes. Tant que les voyageurs seront entassés aux heures de pointe, tant que les transports ne seront pas mieux sécurisés, tant qu'ils n'arriveront pas à l'heure et tant que des grèves à répétition se succéderont sans même qu'un service minimum digne de ce nom soit assuré, n'imaginons pas que les voitures resteront au garage !

En outre, si l'effort à l'endroit des transports doit être quantitatif, il lui faut également être qualitatif.

Sur ce sujet encore, je constate une spécificité française, quand j'apprends que certains souhaitent taxer les poids lourds pour permettre le développement du fret ferroviaire et fluvial. Cette mesure coercitive, qui instaure un rapport de force et accable les entreprises de transports - qui sont souvent des PME -, ne me semble pas la meilleure solution.

S'il faut bien entendu agir pour développer le fret ferroviaire et fluvial, il conviendrait plutôt de le rendre attractif au lieu de créer une contrainte par le biais d'une pression fiscale supplémentaire. Il s'agirait aussi peut-être de permettre à la recherche de faire en sorte que le transport routier soit moins polluant.

À ce titre, pourquoi le Gouvernement ne s'impliquerait-il pas davantage dans le développement d'une nouvelle génération de véhicules et de carburants qui réduisent les émissions de CO2 en soutenant la recherche des constructeurs ? Par ailleurs, pour les transporteurs, et à l'instar de ce qui est fait pour le logement avec le crédit d'impôt, pourquoi ne pas mettre en place une fiscalité particulière pour les véhicules qui utilisent des techniques avancées d'un point de vue environnemental ?

En tout état de cause, je tiens à saluer le travail de l'ADEME, qui, grâce à la valorisation des énergies renouvelables et aux économies d'énergie, s'inscrit dans une posture plus incitative et informative que coercitive, ce qui me semble, à terme, beaucoup plus constructif. Je crois donc qu'il convient de maintenir, voire d'accentuer l'effort gouvernemental en faveur de l'ADEME, qui contribue efficacement au changement des pratiques et des mentalités.

J'insisterai également sur l'éducation des jeunes générations, qui me paraît un préalable à l'émergence d'automatismes écoresponsables. De la même façon que l'éducation civique a été réintroduite dans les programmes scolaires, je ne serais pas choqué que l'écocitoyenneté ait sa place à l'école.

Je terminerai mon propos en renouvelant, madame la ministre, mes félicitations pour votre action au sein de ce ministère difficile. Je prendrai pour illustrer mon propos deux exemples qui me semblent révélateurs.

D'une part, concernant les risques naturels et technologiques, depuis la catastrophe d'AZF, l'ensemble des élus, les administrations et les industries ont su, sous l'égide de votre ministère, prendre des mesures appropriées. Je pense notamment aux plans de prévention des risques naturels prévisibles, les PPR, dont le succès ne se dément pas.

D'autre part, pour revenir sur une actualité européenne très récente, je tenais à rendre hommage à votre action concernant le deuxième plan national d'affectation des quotas de CO2. Je mesure votre difficulté à imposer vos positions, puisqu'elles prennent le contre-pied d'intérêts qui relèguent les considérations environnementales au second plan, ce qui est regrettable, mais je suis sûr que cela changera un jour.

Il convient, par conséquent, de rappeler au prochain Président de la République ses devoirs : il aura la lourde tâche de relever le défi qui engage des générations futures, celui de notre Terre.

Parce que j'ai la certitude que l'écologie prendra la place qu'il est aujourd'hui nécessaire de lui donner, je voterai les crédits de cette mission.

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