Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, c'est un honneur pour moi de présenter, pour la deuxième fois devant le Sénat, le budget du ministère de l'écologie et du développement durable.
Dans le cadre de la LOLF, ses crédits sont répartis en deux missions et quatre programmes. Trois programmes constituent la mission « Écologie et développement durable » et sont dotés de 637 millions d'euros ; il s'agit d'un programme de prévention des risques et de lutte contre les pollutions s'élevant à 133 millions d'euros, d'un programme de gestion des milieux et de la biodiversité à hauteur de 188 millions d'euros et d'un programme relatif à la conduite et au pilotage des équipes environnementales et du développement durable pour 316 millions d'euros. Ce dernier programme porte l'ensemble des 3 775 équivalents temps plein travaillé, les ETPT, attribués au ministère dans ce budget. Dans le cadre de la mission interministérielle de la recherche et de l'enseignement supérieur, le ministère pilote un programme de recherche dans le domaine des risques et des pollutions, pour 278 millions d'euros.
La progression des crédits s'élève à 22, 4 millions d'euros pour la mission « Écologie et développement durable » et le programme « Recherche », soit une augmentation de 2, 5 % pour l'ensemble du budget si l'on s'en tient au seul projet de loi de finances.
Mais si l'on prend en compte l'ensemble des crédits mis en oeuvre pour la protection de l'environnement, l'augmentation est beaucoup plus importante.
En effet, je le rappelle, d'autres ressources financières que les crédits budgétaires contribuent à financer les politiques dont j'ai la charge : le fonds de prévention des risques naturels majeurs, dit « fonds Barnier », est doté de 50 millions d'euros supplémentaires cette année ; le produit des taxes affectées à des établissements publics s'élève à 376 millions d'euros, l'ADEME voyant ainsi ses moyens financiers d'intervention assurés et confortés.
De même, le programme des interventions territoriales de l'État, le PITE, représente, pour les actions relatives à l'environnement, 16 millions d'euros.
La prise en compte de ces différents financements nous permet d'apprécier la véritable augmentation des moyens mis en oeuvre, qui s'élève, au total, à 9, 3 %.
Pour ce qui concerne les effectifs, l'augmentation est de 58 ETPT, ce qui permet la création nette de 40 emplois, les 18 autres correspondant à des transferts d'emplois existants. Ces 40 créations sont prioritairement affectées au dispositif Natura 2000, à l'évaluation environnementale, à l'inspection des installations classées et à la mise en oeuvre du futur règlement REACH.
Cela constitue un effort substantiel dans le cadre contraint qu'est celui des finances publiques aujourd'hui.
Je ne peux pas parler des moyens de mon ministère sans élargir mon propos au service public de l'environnement. Les politiques de l'environnement, dont mon ministère a la responsabilité, associent de très nombreux établissements publics. Les autres ministères, quant à eux, participent chacun dans son domaine à la mise en oeuvre des politiques de l'écologie et du développement durable et je souhaite définir et renforcer avec chacun d'entre eux les actions qu'il convient de mettre en oeuvre en 2007.
Prendre en compte cette réalité laisse entrevoir l'importance, y compris financière, des champs couverts de façon transversale par mon ministère et de la politique conduite par le Gouvernement.
Ce service public de l'environnement pèse plus de 3 milliards d'euros et emploie plus de 13 000 personnes.
Encore plus que sur la croissance de mon budget, j'attire votre attention, mesdames, messieurs les sénateurs, sur la manière dont mon ministère anime cet ensemble.
En ce qui concerne les programmes LOLF, je dois souligner que leur structure actuelle ne me satisfait pas totalement. Sur le fond, je considère, en effet, que mon ministère mène trois grandes politiques sectorielles : outre le développement durable et la lutte contre l'effet de serre, qui sont des politiques transversales, il y a la lutte contre les risques, la biodiversité et l'eau. Chacune de ces politiques relève logiquement d'une direction d'administration centrale. Il me semble anormal que n'ait pas été attribué à chacune d'elles un programme budgétaire.
Par conséquent, quand on fera le bilan de la LOLF et que l'on envisagera des restructurations, il faudra mettre la politique de l'eau sur le même pied que les deux autres, en créant un programme « Eau ».
Comme vous le constatez, nous avons recherché, comme l'an dernier, l'affectation des moyens les plus pertinents pour atteindre les objectifs et la performance demandés à l'action publique.
La part du budget de mon ministère dans le budget civil de l'État augmente depuis 2005 dans des proportions notables et atteindra 0, 40 % en 2007. Il est vrai que nous sommes encore loin de ce que devrait être l'objectif, à savoir représenter 1 % du budget civil de l'État. Mais eu égard aux deux années qui viennent de s'écouler, qui se caractérisent par des augmentations substantielles, je peux dire, même si je ne suis pas tout à fait satisfaite, que nous sommes sur la bonne voie. Si de telles augmentations interviennent chaque année, cet objectif pourra être atteint rapidement. Ce seuil de 1 % est certes symbolique mais il serait pertinent, dans la mesure où ce budget représente un levier extraordinaire afin de mobiliser des ressources pour la protection de l'environnement. En effet, un euro investi par mon ministère sur un projet est le plus souvent complété par trois euros supplémentaires d'autres provenances.
L'écologie a besoin de tout le monde. Je sais pouvoir compter sur votre soutien, mesdames, messieurs les sénateurs, lors du vote de ce projet de budget.
Je souhaite maintenant répondre aux différents orateurs.
Madame le rapporteur spécial, je connais votre investissement et le combat que vous menez pour l'environnement et le développement durable, ainsi que toutes les actions que vous avez mises en oeuvre dans votre ville. Je sais les raisons pour lesquelles vous tenez des discours très fermes. Sachez que je vous en sais gré.
Pour en revenir au plan de renforcement des effectifs de l'inspection des installations classées en DRIRE, je reconnais qu'il n'a pu être mené à son terme, et je le regrette.
Je partage avec vous la conviction que cette mission est fondamentale pour la sécurité de nos concitoyens et l'amélioration de la qualité de l'environnement.
Je sais, comme vous, que ces services font face à de très importants chantiers, tant dans le domaine de la prévention des risques technologiques - avec le renforcement des mesures de sécurité sur les sites Seveso ou la mise en place des plans de prévention des risques technologiques - que dans celui de la prévention des pollutions chroniques. Citons par exemple le plan santé-environnement, avec la prévention des émissions de légionelles, ou la mise en conformité des installations de traitement de déchets. Je rappelle que nous sommes parvenus en 2005 à ce que toutes les usines d'incinérations soient aux normes. Celles qui ne l'étaient pas ont été fermées.
Le Gouvernement a cependant entrepris un effort sans précédent de renforcement des effectifs des DRIRE, en créant 150 postes en 2002, puis 206 sur la période 2004-2007. C'est dans ce cadre que le projet de budget pour 2007 prévoit la création de 10 postes complémentaires d'inspecteur des installations classées. Certes, l'objectif de 400 postes nouveaux n'est pas atteint.
Je soulignerai d'autre part que ce renforcement des effectifs a été obtenu dans un contexte budgétaire particulièrement contraint, alors que très peu de ministères avaient la possibilité de créer des emplois.
Je partage également avec vous la conviction qu'il faut doter l'inspection des installations classées, que ce soit en DRIRE ou dans les directions départementales des services vétérinaires, de moyens adaptés à ses missions, qui ne sont certes pas en décroissance. Je puis vous assurer que j'y serai très attentive dans le cadre des réflexions que je conduirai dans les mois à venir, en faisant le bilan du plan de renforcement et de modernisation 2004-2007, et en demandant aux services de faire de nouvelles propositions d'évolution pour les années à venir.
Le Premier ministre a décidé de renforcer les moyens de l'ADEME dans le cadre de l'actualisation du plan Climat récemment adoptée en comité interministériel.
Les moyens d'intervention supplémentaires alloués à l'ADEME s'élèveront à 30 millions d'euros. Ils seront financés d'une part par la création d'une nouvelle taxe sur la consommation de charbon, à hauteur de 5 millions d'euros et, d'autre part, par l'affectation d'une partie des recettes de la taxe générale sur les activités polluantes, pour 25 millions d'euros. Notons que les taux de cette taxe seront augmentés pour rattraper leur non évolution depuis 1999.
Je pense que cela vous rassurera pleinement quant au renforcement des moyens de l'ADEME.
En ce qui concerne l'utilisation de ces moyens nouveaux, je peux vous confirmer que le Gouvernement et le conseil d'administration de l'Agence ont récemment validé les priorités d'emploi de ces crédits.
L'Agence mobilisera 20 millions d'euros pour doubler l'effort en faveur de l'accompagnement de la production de chaleur à partie d'énergies renouvelables.
Elle consacrera 3 millions d'euros à la poursuite et au renforcement des campagnes d'information sur la lutte contre le changement climatique.
Elle vouera 3 millions d'euros au doublement du nombre d'espaces « info-énergie » destinés à l'information du grand public, dont nous constatons qu'ils font face à une demande sans cesse croissante.
Elle consacrera enfin 4 millions d'euros au renforcement du budget des aides à la décision, à l'aide à la création de centres régionaux de ressources sur la qualité environnementale du bâti tournés vers les professionnels et au développement des capacités d'observation dans le domaine de l'énergie.
Comme vous pouvez le constater, l'ambition est forte, et le Gouvernement l'assume budgétairement en dotant substantiellement l'ADEME, qui s'engagera résolument dans ce défi.
Madame le rapporteur spécial, vous vous interrogez aussi sur la nécessité d'un programme « Eau » - je crois y avoir répondu et vous avoir montré combien je partage votre souci -et vous proposez d'établir en place de ce programme un document de politique transversale.
Je n'ai aucune hésitation sur la nécessité de créer ce programme, comme je l'ai dit. Il faut absolument un système de pilotage fort sur une politique mobilisant 4 400 agents pour le seul ministère de l'écologie et du développement durable - 1 800 fonctionnaires et 2 600 agents dans les agences de l'eau et au Conseil supérieur de la pêche - et un budget consolidé de plus de 2 milliards d'euros par an.
C'est un comble de constater que ce pilotage qui était permis par l'ordonnance du 2 janvier 1959 est interdit par la LOLF, qui met pourtant l'accent sur l'efficacité des politiques et les indicateurs de suivi de performance. Où se trouve la disposition de la LOLF qui me permet d'établir des indicateurs « transprogrammes » ?
Par ailleurs, le découpage actuel ne permet pas non plus d'inscrire certaines dépenses de façon transparente, dépenses qui correspondent pourtant à des pans majeurs de notre politique. Où inscrire les dépenses liées à l'eau potable ou à la création de ressources nouvelles dans la nomenclature actuelle ? Où inscrire les dépenses liées à la gestion de la sécheresse ?
Pire, une partie importante des actions liées à l'eau relève de deux programmes. Elle peut ainsi être imputée sur l'un ou sur l'autre, au gré des humeurs.
Il en est ainsi de l'entretien des rivières, ou de certains éléments du système d'information sur l'eau, par exemple l'hydrométrie, qui servent à la prévention des inondations - programme 181 - et à la mesure de la sécheresse - imputation, faute de mieux, sur le programme 153. Où inscrire les crédits : sur le programme 153, comme je l'ai fait en 2006, ou sur le programme 181, comme je le propose en 2007, parce que les services qui ont besoin des crédits sont des unités opérationnelles du programme 181 ?
Je donnerai un autre exemple : si l'État est condamné au contentieux pour un défaut de police de l'eau - programme 153 - qui serait révélé à l'occasion d'une inondation - programme 181 -, où devrons-nous imputer la dépense ?
Ces exemples montrent que nous avons dû séparer une partie des instruments des politiques qu'ils servent, ce qui me semble être à l'opposé de la philosophie de la LOLF.
Enfin, que dire des agences de l'eau, dont une grande partie des moyens sont rattachés au programme 181, alors que leurs objectifs relèvent en totalité du programme 153, depuis la transposition de la directive-cadre sur l'eau ?
Votre proposition d'établir un document de politique transversale ne permet qu'une addition de dépenses prévues ou constatées, et ne me semble donc régler aucun de ces problèmes, en particulier celui du pilotage et de l'évaluation.
Certains font remarquer que créer un programme « Eau » conduirait à reproduire dans la nomenclature l'organigramme du ministère de l'écologie et du développement durable. Toutefois, cet organigramme a justement été modelé sur les politiques du ministère, et c'est l'adoption de la loi sur l'eau de 1992 qui a entraîné la création de la direction de l'eau.
Cette politique est au coeur des préoccupations des Français, et son importance ne cesse de croître, y compris au niveau mondial.
Pour ma part, je milite pour que les instruments soient subordonnés aux politiques dont l'État a la charge, et non l'inverse.
Madame le rapporteur spécial, vous avez également demandé des éclaircissements sur les échéanciers de crédits de paiement associés aux autorisations d'engagement. Vous faites ici référence aux dettes de mon ministère. Je souhaite donc vous apporter les précisions suivantes.
Cet échéancier ne donne qu'une vision strictement comptable et partielle du problème. En effet, la différence entre les autorisations d'engagement et les crédits de paiement qui les couvrent correspond à une vision pluriannuelle, parfaitement légitime. Elle ne peut cependant être rapportée au seul projet de loi de finances : les opérations se mènent sur plusieurs années, vous le savez, et si les autorisations d'engagement sont engagées sur un seul exercice, les crédits de paiement associés sont consommés sur plusieurs exercices, le plus souvent sur cinq ans. La loi de finances ne peut donc permettre de couvrir toutes les autorisations d'engagement ouvertes.
De surcroît, dans le cadre du dialogue de gestion entre les responsables de programme et les responsables de budgets opérationnels de programme, les BOP, la question des dettes a été constamment abordée. Il en ressort que le paiement des dettes est un souci que tous partagent. Les responsables de BOP ont prévu de consacrer des crédits de paiement au remboursement des dettes dans une proportion un peu supérieure à celle qui était envisagée dans le projet annuel de performance, sans toutefois aller jusqu'à remettre en question le financement d'opérations nouvelles que nous appelons tous de nos voeux. Le calcul définitif de cet abondement est en cours de consolidation, et je ne manquerai pas de vous informer du résultat.
Pour accompagner les efforts de désendettement de ce ministère, qui était lourdement endetté, le Premier ministre a accepté une contribution exceptionnelle du fonds Barnier, à hauteur de 40 millions d'euros.
Ce prélèvement est inscrit à l'article 16 ter du projet de loi sur l'eau et les milieux aquatiques, dont je vous rappelle à quel point je souhaite le voir aboutir. Je vous annonce d'ailleurs ici que cette loi sera adoptée avant la fin de l'année, et non l'année prochaine.